Sur la relance économique, l’Etat reste d’un optimisme prudent

De nouveautés réglementaires et de décisions programmées en 2022

En cette fin d’année 2021, l’Algérie affiche un bilan économique plutôt mitigé, mais tente progressivement de retrouver un certain équilibre antérieur à la crise sanitaire afin de reconstruire un nouveau modèle économique plus cadencé, inclusif et solidaire.

Elle n’est pas le seul pays à ne pas atteindre le niveau de PIB et de croissance anticipé il y a deux ans, ce qui a engendré d’importantes pertes définitives pour l’Etat et un déficit budgétaire de plus de 4.200 milliards de dinars, selon la LF 2022. Une situation inédite qui pourrait influencer les comportements et les décisions futurs des pouvoirs publics qui ont élaboré un Plan de relance économique et industrielle ambitieux, constituant l’ultime bataille de la remise en état d’une économie doublement peinée.
Plusieurs mesures ont été prises dans l’objectif de la concrétisation des projets de renouveau économique, et ce, malgré les grandes divergences qui s’accentuent entre les régions du pays et l’état de choc de la crise sanitaire depuis mars 2020.
Les autorités s’attendent à un rebond soudain ou un retour sur un ordre dispersé de l’activité économique en raison de l’instabilité sanitaire et du marché pétrolier. Des conditions optimales pour relancer l’économie nationale ont été réunies en 2021, annonçant la couleur des perspectives de 2022. A cet effet, des mécanismes de régulation et des restrictions ont été mis en place durant l’année en cours pour tenter d’accorder tous les secteurs économiques sur les mêmes lignes de reprise après la Covid-19. A commencer par la rénovation du secteur public.
Une situation conjoncturelle qui pourrait être bénéfique pour reconstruire l’économie nationale qui a perdu des décennies. C’est le défi lancé par le président de la République Abdelmadjid Tebboune au Gouvernement et aux autorités locales ainsi qu’aux investisseurs et aux compétences algériennes pour réussir les réformes structurelles et économiques pour évoluer vers l’économie du marché.

Tebboune donne le cap aux investisseurs
« L’année 2022 sera celle des réformes », a déclaré le chef de l’Etat lors de la Conférence nationale sur la relance industrielle qui s’est tenue au début du mois de décembre en cours. Il a appelé à renforcer les infrastructures, la logistique, les transformations numérique et industrielle ainsi que la valorisation du label algérien « made in Algeria », à travers le soutien de l’investissement et du secteur agricole.
Ce sont les jalons de l’Algérie de demain. Des mesures d’ampleur ont été prises durant l’année 2021 qui devra s’achever dans deux jours sur une note « notable » sur le plan décisionnel et réglementaire et « mitigée » sur le plan de mise en œuvre. Certaines de ces mesures concernent le déblocage des projets d’investissements gelés au niveau du Conseil national de l’investissement qui devrait être dissout, selon la nouvelle version du code de l’investissement (fin prête), la création de l’Agence nationale du foncier industriel (ANFI) et l’abrogation de la règle 51/49% régissant l’investissement étrangers, en repli depuis plusieurs années. Sauver entre autres le secteur public du cauchemar de l’effondrement à travers la restructuration des entreprises publiques (l’Etat a injecté plus de 1.200 milliard dinars pour les sauver) pour une meilleure gouvernance afin de les rendre plus performantes. Entrer dans la course de la relance et s’associer au secteur privé par des partenariats gagnants-gagnants bénéfique pour l’économie nationale, et ce, conformément à la nouvelle loi sur le partenariat public/ privé en cours d’élaboration.
Faire dissiper les complexes inutiles entre les deux secteurs qui doivent s’affronter en duel et marcher en duo dans l’intérêt de l’économie nationale. Dans le même intérêt, les autorités ont décidé de réviser, d’assainir et de mettre à jour le fichier des importateurs d’où l’élaboration d’une nouvelle liste des marchandises interdites ou suspendues à l’importation pour encourager la production nationale et favoriser la consommation du produit local, qualitatif et compétitif. La remise à niveau du secteur industriel est un défi de taille qui paraît «  difficile » à atteindre avec un contexte sanitaire, financier et social compliqué. Bien que la pandémie soit loin d’être maitrisée, les perspectives d’une reprise économique se dessinent de plus en plus clairement, selon les objectifs planifiés par le Gouvernement qui a pris le temps ces deux dernières années pour mettre en place un nouvel arsenal juridique et réglementaire devant étayer chaque action du Plan de relance.
Quelques textes juridiques et réglementaires ont été élaborés au cours de l’année 2021, tandis que d’autres ont fait l’objet de révision pour les adapter aux mutations du marché économique mondial et effacé les traces d’une gestion chaotique du secteur public. Se libérer de la dépendance aux produits étranger et devenir plus autonome. D’où l’importance accordée à l’investissement dans les secteurs industriel, agricole et énergétique et la révision du code de l’investissement. Un texte plus attractif et plus cohérent avec les exigences du marché actuellement. Plusieurs activités industrielles seront désormais soumises à de nouveaux cahier des charges à l’instar de celui de l’industrie automobile qui devrait être dévoilé durant le mois de janvier 2022, selon le ministère de l’Industrie, ce qui pourrait relancer l’activité de l’importation des véhicules neufs et lancer la construction automobile.

Maintien de la main tendue aux entreprises publiques
Excluant le retour au gonflage pneumatique et de l’assemblage, ce qui est peu convaincant, selon de nombreux experts qui pointent le manque de moyens financiers, de main-d’œuvre qualifiée et d’expertise pour asseoir une véritable industrie automobile. Les autorités retrouvent leur optimisme, depuis plusieurs mois, imprimant en gras les marques de leur nouvelle politique de relance.
Elles visent à mettre à profit toutes les opportunités et défendre l’attractivité du marché national à travers notamment le soutien des jeunes porteurs de projets à travers la création d’un fonds spécial de soutien des start-ups et la réactivation de l’Agence nationale d’appui et de développement de l’entrepreneuriat (Anade), anciennement Agence nationale de soutien à l’emploi des jeunes (Ansej). Également, le lancement d’un programme de relance de 51 entreprises économiques publiques en partenariat avec des opérateurs nationaux ou étrangers. L’Etat a dépensé plus de 1.200 milliards de dinars pour leur assainissement ces dernières années et mettre sous sa tutelle aussi les entreprises dont les propriétaires sont emprisonnés. Des entreprises déficitaires qui peinent depuis des mois et même des années à se remettre sur l’orbite du développement à cause de la mauvaise gouvernance et la bureaucratie associée, à l’origine des déboires de l’économie nationale. Parmi les entreprises concernées par ce plan « le complexe sidérurgique d’El-Hadjar, confronté ces dernières années à plusieurs problèmes qui appellent une révision de son mode de gestion, et l’Entreprise nationale des industries de l’électroménager (Eniem), dont le taux d’intégration a beaucoup reculé après avoir atteint 70% », selon le ministère de tutelle. La remise sur pied de ces sociétés défaillantes depuis des années reste un effort herculéen.

Défi de la gouvernance publique actuelle et future
Seule la bonne gouvernance et un contrôle rigoureux peuvent les sauver sinon tout effort sera vain. L’Algérie subit toujours les conséquences de la mauvaise gestion des entreprises publiques et du Plan de l’ajustement structurel qui ont fait émerger des problèmes de rationalité politique. En ligne de mire du Président Tebboune, la relance industrielle, le développement local et la promotion des exportations. Pour lui, la transition numérique et énergétique est un moyen et outil à mettre en place. Or, se prétendre ambitieux n’est pas suffisant dans ce contexte vulnérable qui pourrait probablement influencer les prévisions des années à venir.
Le Gouvernement reste à l’avant-garde. Le temps de permettre aux secteurs clés de redémarrer, les autorités poursuivent le développement du secteur des hydrocarbures et des mines à travers « la valorisation des ressources naturelles, grâce à l’augmentation du transfert dans le secteur des hydrocarbures de 30% actuellement, à 50% en 2022 ». Il est prévu le début de l’exploitation du gisement de fer de Ghar Djebilet, de zinc d’Oued Amizour et du phosphate à Tébessa. Il entend aussi accroître la production pétro-gazière et la reprise des activités de la Sonatrach à l’étranger à l’instar du bassin de Ghadamès en Libye après la décision des autorités des deux pays de rouvrir les frontières terrestres entre les deux pays. Cette démarche s’inscrit dans la nouvelle diplomatie commerciale algérienne qui compte se remettre en position sur le continent africain et même européen. Le Président Tebboune a appelé à la révision de l’accord d’association avec l’Union européenne « clause par clause ».
Samira Takharboucht