En phase ascendante

Lamamra situe les relations algéro-françaises

Le ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger, Ramtane Lamamra, a fait le point sur les relations algéro-françaises dans un entretien qu’il a accordé à France 24 et Radio France International (RFI). Il a expliqué les difficultés dans les relations bilatérales entre les deux pays, par les «motifs très sérieux» que constitue «l’atteinte à la mémoire, à l’histoire, ou à la dignité du peuple algérien ou de compatriotes installés ou voyageant en France». Sinon, les relations entre Alger et Paris sont «dans une phase ascendante», a-t-il déclaré, «laborieusement ascendante. Parce qu’il y a un grand nombre de difficultés dans cette relation bilatérale», a-t-il fait observer, en espérant que ces relations «aillent de mieux en mieux». «Les Présidents Abdelmadjid Tebboune et Emmanuel Macron ont une excellente relation personnelle. Ils se téléphonent. Parfois, c’est annoncé et parfois, ce n’est pas annoncé. La communication entre les deux chefs d’Etat existe, elle est cordiale et confiante», a indiqué Ramtane Lamamra. Pour autant, cela ne suffit pas, précise-t-il, pour «masquer l’existence de problèmes». Ramtane Lamamra n’exclut pas que le Président Tebboune accepte l’invitation d’Emmanuel Macron à se rendre à Bruxelles à la mi-février pour le sommet UE-UA. Le chef de la diplomatie algérienne appelle de ses vœux les autorités françaises à mieux traiter les Algériens menacés d’expulsion, niant que son pays refuse d’accueillir ses ressortissants. Il regrette l’appel d’Emmanuel Macron à ce que les autorités algériennes reconnaissent le prétendu massacre d’Européens à Oran en juillet 1962, soulignant que c’est aux historiens de se pencher sur ces questions. Il dit espérer un geste de la France, notamment de restitution d’archives ou d’objets. A ce propos il rappelle que «nous avons un canon à Brest, les archives, il reste même quelques crânes de héros de la résistance algérienne contre l’invasion française. On se demande, d’ailleurs, si c’est vraiment civilisé que de garder dans des musées les crânes de résistants algériens dont on fait des trophées. Cela pouvait s’expliquer à l’époque de la montée du colonialisme, mais pas à l’ère des indépendances et de la souveraineté des peuples», a-t-il dit.
Sur les relations entre l’Algérie et le Maroc, Ramtane Lamamra a fait observer qu’il y a des problèmes dans la région. Et la solution à ces problèmes ne réside pas dans la fuite en avant, telle que celle qui consiste à inviter des dirigeants israéliens qui viennent à nos frontières menacer l’Algérie à partir du territoire marocain.» Concernant la situation au Mali, Ramtane Lamamra a réaffirmé que l’Algérie n’est pas en faveur du déploiement de forces étrangères sur le continent africain tout en respectant le droit souverain des Etats concernés de faire appel à des formes d’assistance de la part de partenaires internationaux. Autrement dit, le Mali a le droit de faire appel à la coopération militaire russe. Au passage, Ramtane Lamamra rejette le qualificatif de «mercenaires» accolé par les dirigeants et les médias occidentaux aux instructeurs russes. Pour rappel, en octobre dernier, depuis Bamako (Mali) où il était en visite, et à l’issue de son entretien avec le Premier ministre malien, le ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger avait indiqué que «la France officielle a besoin de décoloniser sa ‘’propre histoire’’, afin de réparer en urgence la faillite mémorielle qui est malheureusement intergénérationnelle chez certains nombre d’acteurs de la vie politique française parfois aux niveaux les plus élevés». Pour Ramtane Lamamra, «nos partenaires étrangers ont besoin de se libérer de certaines attitudes, de certains comportements, de certaines visions qui sont intrinsèquement liées à la logique incohérente portée par la prétendue mission civilisatrice de l’Occident qui a été la couverture idéologique, utilisée pour essayer de faire passer le crime contre l’humanité qui a été la colonisation de l’Algérie, la colonisation du Mali, la colonisation de tant de peuples africains». «La décolonisation qui doit s’opérer aujourd’hui est une décolonisation qui s’annonce comme une priorité» pour remédier à la «faillite mémorielle que trahissent les propos tenus récemment sur l’Algérie et le Mali» par la France officielle, avait insisté Ramtane Lamamra. Il avait relevé que dans les relations qu’entretiennent l’Algérie et le Mali avec la France, «il n’y a pas de cadeau, mais une logique de donner et de recevoir».
Lakhdar A.