Relations internationales : la France perd-elle pied ?

France

Comme l’affirme le philosophe français Michel Onfray à propos de son pays, «notre civilisation s’effondre, une autre est en train de s’annoncer», le déclassement international de la France signifierai-t-il pour elle la fin de l’histoire ? Et ce déclin commence-t-il lorsque ce pays perd pied par rapport au bouleversement de l’échiquier politique mondial ?

Par Salim Metref
Ne reste-t-il alors qu’une seule issue qui souvent rend aveugle et qui consiste à convoquer et à glorifier la mémoire par le fameux récit du souvenir qui, pour l’occasion et à propos de l’Algérie, mêle comme s’ils étaient tous sur un même pied d’égalité harkis, rapatriés et militants indépendantistes algériens ? Le processus déjà rodé se met ainsi vite en place et tout le monde y va de sa petite musique sans que personne ne soit épargné ni oublié. Immigration algérienne en oubliant qu’elle n’est que le résultat d’une colonisation qui a appauvri et affamé le peuple algérien, médecins algériens souvent sous-payés mais qui ont été combien utiles lorsqu’il a fallu faire face à des besoins urgents et vitaux, généraux algériens nés pour beaucoup d’entre eux après l’indépendance oubliant plutôt de convoquer l’histoire coloniale française avec ses maréchaux génocidaires et ses généraux tortionnaires et bien d’autres encore sont ainsi invités omettant ainsi de discuter plutôt de cette débâcle annoncée par Michel Onfray. Même les sportifs ne sont pas oubliés comme ces propos nauséabonds fusant dans une enceinte sportive contre l’un de nos meilleurs footballeurs qui aurai du choisir de clore son itinéraire sportif sous d’autres cieux plus cléments. Et puis et à ce propos, quand est-ce que nos sportifs notamment ceux qui ne connaissent pas la langue française apprendront à exiger un interprète et à continuer de s’exprimer dans les langues qu’ils maitrisent, les leurs, cette belle langue Arabe qui n’a pas son pareil ou le Tamazight, langue témoin de la nation algérienne millénaire ? Et se déploie ensuite et dans le même contexte tout un programme que l’on continue de déclamer depuis longtemps notamment sur les plateaux de télévision comme cette production audiovisuelle suspecte commandée et commanditée par l’Etat profond, ces témoignages d’acteurs devenus soudain bavards, cette promesse récurrente d’une prochaine politique étrangère plutôt musclée, le tout relayé par des journalistes, des consultants et des médias, télévisions, hebdomadaires et quotidiens, appartenant où proches «d’anciens baroudeurs de l’Algérie française » qui ont fait «leurs classes » dans les djebels algériens … Tout est ainsi déployé pour réduire cet entêtement algérien à vouloir s’émanciper définitivement de toute forme de tutelle qui a souvent réussi à construire tant d’obstacles à l’émergence de l’Algérie indépendante. Beaucoup, il est vrai, n’aiment l’Algérie que saignante et livrée pieds et poings liés à l’appétit d’un capitalisme post-colonial prédateur qui la considère plus qu’une chasse gardée, une proie disponible et surtout bon marché. Que penser enfin de toute cette haine contenue à l’égard de l’Algérie, libérée durant une pré campagne présidentielle dont le moins que l’on puisse dire est qu’elle n’a pas été et ne sera sans doute pas un long fleuve tranquille mais bien un déluge de haine à l’égard d’un pays qui n’aspire légitimement qu’à n’être et à rester souverain dans ses décisions, libre dans le choix de ses alliés et désirant forger seul son avenir. Oui, beaucoup de choses se produiront encore et la relation algéro-française ne sera probablement jamais sans ambiguïté même si les affinités personnelles et l’amitié pourront parfois sauver ce qui peut l’être encore sans pour autant pouvoir résister longtemps à une réalité nauséabonde qui se renouvelle sans cesse. C’est que l’Algérie se réveille et étonne. Elle gagne en influence et en puissance, ne comptant que sur ses propres forces et son intelligence aidée en cela par des puissances alliées qui étaient déjà là lorsqu’un jour un groupe de patriotes algériens décida de s’émanciper, par les armes et la mobilisation d’un peuple soumis aux pires sévices et à la privation, d’un colonialisme qui sans aucune permission s’était invité à notre table et nous en avait exclue. Et si Eric Zemmour, ce français de contrefaçon qui insulte sans arrêt l’Algérie et qui ne peut plus invoquer l’amazighité de son patronyme et Marine Le Pen, cette française de souche, défendent avec hargne et conviction une certaine idée de la France historique, beaucoup d’Algériens défendent eux aussi et avec acharnement une certaine idée de l’Algérie millénaire indépendante. C’est que pendant de nombreuses décennies ce pays continent a navigué de Charybde en Scylla, livré aux appétits féroces de puissances compradores impitoyables et insatiables avec l’onction et la bénédiction d’algériens qui ont voulu confisqué l’Algérie à ses propres enfants en dilapidant sa richesse nationale, semant le désespoir et pire la désespérance parmi un peuple dont la caractéristique a toujours été le courage dans l’épreuve et la résistance face au renoncement et à l’abdication. Un mouvement révolutionnaire, massif et pacifique réussit à surgir de manière fulgurante au moment où personne ne le voyait venir et à stopper l’innommable, cette manœuvre entretenue par des puissances étrangères qui devait impérativement réduire l’état-nation en miettes pour hypothéquer non seulement son avenir mais pire son existence. L’Algérie devait ainsi rejoindre cette longue liste de pays disloqués, sans états, livrés aux plus forts, aux milices et aux maffias. Cette résistance populaire farouche face à un anéantissement programmé explique en partie le tir groupé médiatique actuel mais pas seulement contre une Algérie résistante, brave, maitresse de son avenir et qui désormais se met en place face à une actualité internationale qui révèle chaque jour la réalité de nouveaux rapports de force en émergence, bâtis sur une hégémonie récusée et un monde multipolaire. Inéluctablement, le leadership mondial se reconstruit. Et pendant que la Russie et la Chine avancent à pas de charge vers une nouvelle architecture des relations internationales qui pourrait profiter à l’humanité toute entière, d’autres espèrent encore punir et pouvoir sanctionner comme si de rien n’était. Mais qui peut vraiment aujourd’hui faire vraiment face quoiqu’il en coûte et pouvoir assumer ces retours de flammes en face desquels rien ne résiste ? Ainsi, dans un contexte international bouleversé et porteur de nombreuses menaces mais inducteur aussi peut-être de grands espoirs, l’Algérie doit continuer de monter en puissance en s’appuyant sur deux piliers qui seuls pourront porter cette marche vers l’avenir, une économie florissante qui assure le bien-être de tous et une armée puissante qui soit parmi les meilleures au monde et qui soit au service de la sécurité d’un pays-continent. C’est l’impératif indispensable sans lequel il est difficile de survivre dans un monde qui ne fait plus de place aux faibles ! Et cela ne dispense bien entendu pas ni de la volonté politique de l’émergence de l’état de droit ni du respect scrupuleux des libertés individuelles. Enfin et au bout du compte, peu importe que l’Algérie comme une bouée de sauvetage soit toujours invitée dans l’actualité d’une France qui perd pied. Cela soulage peut-être et fais oublier les sous-marins australiens, la médiation dans le prétendu conflit russo-ukrainien ou encore l’inéluctable sortie du Mali. Et notre propos, pour conclure, n’est aucunement dicté par une quelconque pulsion dangereuse qui relèverait de la haine ou pire de la psychiatrie comme le sont certaines diatribes entendus en France à propos de l’Algérie et n’enlève rien au mérite de ces français qui ont soutenu avec cœur la cause indépendantiste algérienne et auxquels nous continuerons toujours d’exprimer notre reconnaissance. Il n’exclue pas non plus de dire que s’il y a à l’avenir en France un homme ou surtout une femme d’état crédible dirigeant ce pays et qui soit animé d’une volonté sincère de tourner définitivement la page d’un paternalisme obsolète, d’un orgueil déplacé et d’une haine entêtée, sans solder pour autant la page sanglante et criminelle de la colonisation dont il faudra bien écrire et reconnaitre aussi le véritable récit, une relation apaisée, équitable et portée par le respect mutuel pourrait s’écrire, dictée elle aussi par une nouvelle réalité géopolitique internationale et de nouveaux rapports de force dont il faudra bien un jour prendre acte.
Par Salim Metref