L’Opep reste attachée à son accord avec la Russie

Les pays membres de l’Opep+ se réunissent aujourd’hui dans un contexte explosif

Depuis hier, les investisseurs ont le regard tourné vers la réunion des treize pays membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) conduits par l’Arabie saoudite et leurs dix alliés chapeautés par la Russie qui devraient se rencontrer aujourd’hui, dans un contexte plutôt explosif, pour discuter de la stratégie de production à adopter pour le mois d’avril prochain. De nombreux experts internationaux, notamment, européens s’attendent à une augmentation importante de la production du cartel (Opep) compte tenu des prix records de l’or noir (plus de 102 dollars), dopés par la guerre en Ukraine et les sanctions en cascades prises par l’Union européenne (UE) et ses alliés contre la Russie. Elle est le troisième producteur mondial de pétrole avec 10 milliards de barils par jour dont 2 millions acheminés vers l’Europe, fortement affectée par la hausse brutale des cours du pétrole qui se répercute sur le prix du carburant qui ont atteint des sommets. Les prix devraient poursuivre leur ascension dans les prochains jours et même semaines, ce qui porterait un coup d’arrêt brutal de certaines activités économiques.
Si l’économie russe subirait les conséquences des sanctions financières et économiques dans l’immédiat, l’économie de l’UE et ses alliés ressentiraient les effets d’ici quelques mois, selon de nombreux experts qui tentent de répondre objectivement à la question relative à l’impact des sanctions européennes sur Moscou. Pour résister au contre-choc de ces sanctions sévèrement inédites prises contre la Russie, l’Europe et les Etats-Unis sollicitent l’Arabie saoudite, l’Algérie, les Emirats Arabes Unis, le Koweït et même l’Iran afin de compenser les livraisons de pétrole russe sur le marché. Cette question sera au centre des discussions entre les pays membres de l’Opep+, très prudents et attentifs à l’évolution du marché du pétrole. Leur objectif est de maintenir la stabilité des prix du pétrole sur le marché mondial à travers la reconduction, éventuelle, de la stratégie de réouverture modeste des vannes, entamée en mai 2021 par l’Opep+, après une réduction drastique du volume de production des pays membres de l’Alliance pour contrer le choc de la pandémie, aujourd’hui oubliée sous le coup de la guerre entre la Russie et l’Ukraine. Augmenter sa production de 400.000 barils par jour est insuffisant, mais permettra aux pays exportateurs de pétrole d’honorer leurs engagements pris envers leurs clients de long terme, avant de se pencher sur de nouvelles livraisons, ce qui serait déprimant pour les marchés européens qui connaissent depuis plusieurs jours une hausse vertigineuse des prix à la pompe (un litre d’essence vendu à 2 euros). Pour éviter la pénurie et enrayer l’envolée des prix du carburant sur leurs marchés, les pays européens doivent puiser dans leurs réserves où s’approvisionner auprès des Etats-Unis, avec des prix plus élevés. A moins que l’UE et ses alliés fassent pression sur l’Opep pour revoir à la hausse leur seuil de production et bannir la Russie de son groupe informel Opep+ formé en 2006. D’une pierre, deux coups. Stopper la flambée des cours du pétrole et isoler la Russie qui ne pourra plus exporter son pétrole. Un scénario peu probable car le nombre des pays capables de remplacer la Russie dans la production et l’exportation du pétrole est restreint.
Les pays membres de l’Opep ne sont pas prêts à augmenter leur production, par prudence. Le cartel est attaché à l’accord Opep+ qui les a, jusque-là, aidés à surmonter le choc de la pandémie et à relancer même les investissements dans le secteur. C’est ce qu’a affirmé le prince héritier Mohammed ben Salmane (Saoudien) au Président français Emmanuel Macron, a rapporté l’agence officielle Saudi Press Agency. « L’Arabie saoudite confirme son attachement à l’accord Opep+ avec la Russie », a indiqué le même média. La réponse était claire et concise. Le groupe Opep n’a aucun intérêt à divorcer de ses dix autres alliés, conduits par la Russie, lourdement sanctionnée par l’UE et les Etats-Unis.
Ce qui a donné suite au départ des compagnies pétrolières britanniques du sol russe, rompant ainsi leurs contrats avec le géant des hydrocarbures russe, Gazprom. Les deux compagnies britanniques Shell et BP se sont séparés de Gazprom, en riposte à l’invasion de la Russie à l’Ukraine, tandis que le français Total Energie n’a pas encore décidé de quitter le sol russe assurant, toutefois, qu’il « ne développera pas de nouveaux projets en Russie et continue d’évaluer les conséquences sur ses activités des sanctions occidentales prises à la suite de l’offensive russe contre l’Ukraine », a-t-il annoncé, avant-hier. Gazprom est, pour rappel, un allié important de l’Algérie avec lequel, la compagnie publique des hydrocarbures vient de signer un accord pour « relancer le projet du développement du bassin de Berkin afin de démarrer la production de gaz à El Assel en 2025 ». Les sanctions prises contre la Russie auront des effets pervers sur toute l’économie mondiale, pour de longues années.
Samira Takharboucht

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