Deux poids, deux mesures

Réfugiés

Jean-Louis Bourlanges, député du MODEM, a donné le ton dès le début de l’attaque contre l’Ukraine en déclarant que les réfugiés ukrainiens constituaient « sans doute une immigration de grande qualité dont on pourra tirer profit ». Tout le monde a bien compris : les immigrants d’avant étaient des nuls dont il ne fallait pas s’embarrasser. Pourtant, M. Bourlanges a fait l’ENA, a été membre de la Cour des comptes et il est depuis un an président de la commission des Affaires étrangères de l’Assemblée nationale

Plus que jamais, le monde est – sans jeu de mot – en noir et blanc… L’Union Africaine s’est dite « préoccupée » par le sort des étudiants noirs en Ukraine. La BBC, dans la nuit de mercredi à jeudi, a montré des étudiants noirs qui tentaient de monter dans des trains quittant l’Ukraine, et qui étaient repoussés en leur disant : « Vous êtes noirs, vous pouvez marcher ! ».
Des étudiants nigérians ont été refusés à la frontière polonaise ; il est vrai que la Pologne a beau jeu d’appliquer la législation européenne qui veut que, quand on n’est pas européen, on doit présenter un visa. Mais, sans attendre les nouvelles mesures de l’Union européenne, la Pologne a accueilli les Ukrainiens, mais pas les étudiants noirs. En revanche, toujours selon la BBC, certains étudiants africains ont été admis.

Hongrie !
Très nombreux étaient aussi les jeunes Arabes en Ukraine pour leurs études. Ce seraient les Syriens et les Irakiens qui auraient le plus de problèmes. A la frontière polonaise, des étudiants égyptiens témoignent : les gardes ukrainiens ne laissaient passer que les « Blancs » et les ont laissé trois jours dans le froid glacial, sans abri ni couverture. Ceux qui vendaient de la nourriture donnaient la priorité aux «Blancs».
Certains ont pu repartir et payer un taxi pour les conduire à la frontière roumaine où il y avait moins de monde. « On a été mieux reçu là-bas, même par la police ukrainienne ». La frontière passée, des ONG roumaines leur ont donné de la nourriture et des cartes de téléphone pour appeler leurs familles. Il n’est pas question de condamner l’élan de générosité qui se manifeste un peu partout. En France, il y a cinq jours déjà, l’Association des maires de France a appelé à accueillir des réfugiés et à rassembler l’aide d’urgence pour la population ukrainienne. Des communes rurales s’apprêtent à recevoir des Ukrainiens fuyant la guerre. Mais comment ne pas penser au refus massif d’aide pour les Syriens qui, eux aussi, fuyaient la guerre et à l’absence de solidarité avec les Yéménites qui subissent des bombardements depuis sept ans, au point que l’ONU a qualifié ce conflit de plus grave crise humanitaire du XXIe siècle ? Le 15 janvier dernier, la candidate Valérie Pécresse visitait en Grèce, sur l’île de Samos, un camp pour réfugiés : containers blancs pour les loger, portiques haute sécurité et triple clôture de barbelés pour qu’ils ne se sauvent pas. Notre candidate n’avait que deux mots à la bouche : fermeté et humanité. Pour elle, ce camp de Samos est « un modèle à développer», même Si les ONG dénoncent les atteintes à la liberté.

Comment ne pas songer au sort des Palestiniens de Gaza, soumis depuis plus de 14 ans à un siège atroce ?
Aux Etats-Unis, un journaliste du service d’information CBS a expliqué la grande différence entre le conflit en Ukraine et ceux qui l’ont précédé : « Ce n’est pas l’Irak ou la Syrie, c’est un pays civilisé et européen ». N’est-ce pas le racisme, un racisme tranquille, en toute bonne conscience, qui règne sur le monde et que dénoncent les Palestiniens quand ils comparent le soutien des Occidentaux aux civils ukrainiens qui prennent les armes, alors qu’eux ont été condamnés pour terrorisme ? Et puis il y a les mauvais coups qui se font et passent complètement à la trappe, parce que les caméras sont toutes braquées sur l’Ukraine. Ainsi, dès le 24 février, au dîner du CRIF, Jean Castex qui remplaçait Macron a déclaré que « Jérusalem est la capitale de l’État d’Israël. (…) Cela n’empêche en rien de reconnaître et de respecter l’attachement d’autres religions à cette ville ». Par cette formulation, il indiquait bien qu’il se situait à un niveau politique. Pourtant, jusqu’à ce jour, la France n’a jamais reconnu la souveraineté israélienne sur Jérusalem-Est. De surcroît, Castex a estimé que parler d’Apartheid en Israël était une « contre-vérité ». En France encore, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin a annoncé son intention d’interdire une association toulousaine, le « Collectif Palestine vaincra ! ».

Martine Sevegrand