Face aux stratégies de l’OTAN, la politique de défense et de la sécurité énergétique de l’Europe

Algérie

Avec l’impact de la crise du coronavirus et récemment avec la crise ukrainienne, plus jamais le monde ne sera comme avant préfigurant d’importantes mutations dans les relations internationales, sécuritaires, politiques et économiques, où la crise ukrainienne a des impacts sur le cours du pétrole/gaz, mais également sur la sécurité alimentaire. Les années à venir devraient conduire à de profondes reconfigurations socio-économiques, technologiques mais également sécuritaires.

Le document officiel publié par l’Otan et intitulé « renforcement du dialogue méditerranéen, avec établissement d’un inventaire des domaines de coopération possibles » résume ainsi cet aspect du renforcement du DM. Le but recherché serait d’établir entre l’Otan et les pays du DM des relations à long terme axées sur ce processus en fonction des intérêts mutuels de sécurité, ainsi que de permettre à l’Otan de contribuer de façon significative à promouvoir le dialogue et la coopération dans la région méditerranéenne. Par ailleurs, la dimension politique du dialogue méditerranéen devrait être renforcée par une plus large exploitation des possibilités qu’offre le dialogue multi/bilatéral existant ; la poursuite de l’action en faveur des contacts de haut niveau et d’une implication des décideurs, selon le cas ; des mesures visant à rapprocher encore les partenaires méditerranéens de l’Otan et enfin le renforcement de la complémentarité avec d’autres initiatives internationales ».
A cet effet, l’intensification des relations politiques peut se faire selon plusieurs formules notamment les réunions à 19+1 et à 19+7. Ces réunions remontent à la création du MCG (Groupe de coopération méditerranéenne) en 1997 et se tiennent régulièrement depuis. Nous avons une autre formule, émanant du Conseil de l’Atlantique Nord, les réunions au niveau des Ambassadeurs des pays de l’Otan et du DM (NAC+1 et NAC+7) que se tiennent depuis octobre 2001. S’agissant des réunions annuelles à 19+1 au niveau des ambassadeurs (NAC+1), elles continuent de se tenir pour des échanges de vues sur la situation régionale et des débats sur l’évolution et les perspectives de développement du DM. Quant aux réunions à 19+7 au niveau des Ambassadeurs (NAC+7), elles continuent d’être organisées au moins deux fois par an, en particulier après les réunions ministérielles et les sommets des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Otan, afin d’informer les Ambassadeurs des pays du DM des résultats de ces réunions et de procéder à des échanges de vues sur des questions en rapport avec le DM.
Dans ce cadre, le Conseil de partenariat euro- atlantique (CPEA) et le Partenariat pour la paix (PPP) sont deux cadres qui ont été institués. A cet effet, il est prévu d’explorer les possibilités d’associer les pays du DM, cas par cas, à des activités du CPEA et du PPP spécialement choisies et d’encourager les partenaires méditerranéens à participer de façon plus large aux activités auxquelles la coopération dans le cadre du CPEA et du PPP leur permet déjà d’accéder. Deux initiatives internationales peuvent être citées : le processus de Barcelone de l’Union européenne et le dialogue méditerranéen de l’OSCE. Le Conseil de l’Atlantique Nord a décidé que l’Otan proposerait à l’UE l’organisation périodique d’exposés et d’échanges d’informations sur les activités de chacune des deux organisations dans le domaine de la sécurité et de la stabilité dans la région méditerranéenne. Ainsi, il est envisagé d’organiser des réunions d’experts de l’Otan et de l’OSCE pour examiner des questions d’intérêts communs.
Dans cette perspective, la démarche à suivre consisterait à prévoir notamment des activités ciblées, l’objectif consistant à couvrir des secteurs où l’Otan dispose d’un avantage comparatif reconnu et pouvant apporter une « valeur ajoutée », en particulier dans le domaine militaire, et pour lesquels les partenaires méditerranéens ont manifesté de l’intérêt. Deuxièmement, l’accent est mis sur la mise à profit de l’expérience acquise dans le cadre du partenariat pour la paix (PPP), avec notamment l’ouverture d’activités PPP supplémentaires aux pays du DM et/ou l’adaptation d’activités PPP à leurs besoins spécifiques, le document insistant, à ce niveau, sur la nécessaire consultation préalable des pays du dialogue méditerranéen (DM). (Etude du professeur Abderrahmane MEBTOUL parue à l’Institut Français des Relations Internationales (IFRI Paris France) » la coopération Maghreb Europe face aux enjeux géostratégiques » (novembre 2011)- chapitre III- « la stratégie de l’Otan face aux enjeux géostratégiques en Méditerranée » Débat à l’Université d’Oran 2, le 27 mai 2015 lors d’une conférence débat sur « le monde qui vient– enjeux géostratégiques- et perspectives pour l’Algérie », animé par l’Amiral Jean DUFOURCQ ancien directeur de la revue défense (France), Expert auprès des organisations internationales CEE-Otan à l’invitation du professeur Abderrahmane Mebtoul)

3.-Les domaines de coopération inventoriés par l’Otan peuvent être résumées au nombre de quatorze :
1-la formation, l’entraînement et la
doctrine militaire;
2.-les exercices militaires et les activités d’entraînement connexes;
3-les contacts entre militaires aux niveaux des chefs d’Etat-major de la défense, des États-majors et des experts ;
4.-la médecine militaire ;
5.-les échanges d’informations dans le domaine de la logistique;
-6.-les consultations au niveau des experts sur les efforts politiques et de défense avec pour objectif de lutter contre la prolifération des armes de destruction massive (ADM); 7.-l’action humanitaire globale de lutte contre les mines (GHMA);
8.-la tenue de séminaires et de réunions d’experts sur les plans civils d’urgence (PCU) ;
9.-la participation à certaines activités des bureaux et comités d’études; 10.- la gestion des crises, cet aspect important de la coopération comprenant des exposés sur les exercices de gestion des crises;
11.- la science et l’environnement ; – 12.- l’encouragement des pays de l’Otan et du DM à contribuer au MDWP;
13.- l’ intensification des efforts d’information de l’Otan dirigés vers la société civile des pays du DM ;
14.- le renforcement du rôle des ambassades points de contact de l’Otan dans les pays du DM. L’inventaire des domaines de coopération possibles fait ressortir huit axes directeurs. Le but recherché est d’améliorer l’aptitude des pays du DM à contribuer à des opérations de réponse aux crises hors article cinq que dirige l’Otan, y compris l’entraînement à une participation éventuelle à un centre de coordination logistique interarmées multinational (MJLC) :
-1.- l’introduction du concept d’unités de soutien logistique intégré multinational (MILU), la préparation à la mise en œuvre du concept du carburant unique (SFC) et la coopération dans le domaine des matériels tactiques de manutention des carburants (TFHE) ;
– 2-la réforme de la défense incluant les meilleures pratiques en matière de gestion économique et civile des forces armées, y compris les aspects « sécurité » du développement économique et les aspects économiques de la lutte internationale contre le terrorisme liés à la sécurité;
3-Les consultations sur le terrorisme, par la prise en compte du partage de données du renseignement, des réunions d’experts sur la menace terroriste et les mesures prises, individuellement ou avec d’autres pays, pour faire face à cette menace ;
4-les consultations et la coopération relative la sécurité aux frontières;
5- la « participation aux travaux du Groupe de la conférence des directeurs nationaux des armements (CDNA) pour le partenariat sur le système Otan de codification (NCS) ;
6-l’ invitation aux activités du Groupe de la CDNA pour le partenariat » qui concernerait les conditions de sécurité dans le transport et le stockage des munitions et des explosifs militaires ;
7-des consultations sur des questions de gestion de la circulation aérienne dans l’optique d’une plus grande sécurité des vols et échanges d’informations sur les procédures civilo- militaires de contrôle de la circulation aérienne ;
8-la gestion des catastrophes. La question du financement étant posée, deux situations sont envisagées : d’une part, la règle de l’autofinancement des activités menées au titre du DM est retenue ; d’autre part, une aide financière exceptionnelle. Le cadre défini au sommet de l’Otan de promouvoir le dialogue méditerranéen de l’Otan au rang de « véritable partenariat », (le même sommet d’Istanbul faisant une offre de coopération à la région du Moyen-Orient élargi qui est adressée aux pays qui le souhaite, ceux qui sont membres du conseil de coopération du Golfe étant cités explicitement) ambitionne de contribuer à la sécurité et à la stabilité de la région méditerranéenne par le truchement de cinq d’actions. 1.-le renforcement de la dimension politique du dialogue méditerranéen avec l’Otan ;
2.- l’appui au processus de réformes de la défense ;
3.- la coopération dans le domaine de la sécurité des frontières;
4.- la réalisation de l’interopérabilité; 5- la contribution à la lutte contre le terrorisme.
L’objectif poursuivi par l’initiative d’Istanbul est de renforcer la sécurité et la stabilité par le biais d’un nouvel engagement transatlantique en fournissant un avis adapté sur la réforme de la défense, l’établissement des budgets de défense, la planification de la défense, les relations civilo-militaires et l’encouragement de la coopération entre militaires afin de contribuer à l’interopérabilité ; lutter contre le terrorisme par le partage de l’information, la coopération maritime, lutter contre la proliférations des armes de destruction massive et contre les trafics. Face à ces propositions, quelle est l’attitude des pays du Maghreb devant consolider l’intégration maghrébine pour devenir une entité économique fiable au moment de la consolidation des grands ensembles?
4.- Quelle est la politique de défense et de sécurité de l’Europe encore embryonnaire et remis sur le tapis avec al crie ukrainienne? La fin de la guerre froide, les velléités d’émancipation de l’Europe de la tutelle américaine – particulièrement en matière de défense et de sécurité – et la volonté de construire avec les pays de la région des relations économiques privilégiées accroît de manière significative cet intérêt surtout actuellement avec la crise ukrainienne.
(A suivre)
Professeur des universités, expert
international Abderrahmane Mebtoul