Ramadan, le patrimoine revient au galop

Un mois dans l’année

S’il est un mois dans l’année qui célèbre réellement le patrimoine culturel algérien et qui le revivifie c’est bien le mois de ramadan avec son lot de recette de cuisine héritée des arrières grands-mères, de vieux ustensiles de cuisine empreint de nostalgie, de poésies populaires, parfois d’habillement traditionnel et surtout de musiques du terroir qu’on l’appelle citadine, savante, populaire ou autre.Un mois durant dans la capitale et la majorité des villes du nord du pays sont bercées du son mélodique de la mandole, du luth et des violons et raisonnent des percussions discrètes et étudiées rythmant un flot ininterrompu de qcid et de poèmes animant un mois durant le quotidien des algériens dans leurs voitures, dans leurs maisons et pendant leurs soirées.
Dans les places publiques, les cafés, les esplanades, les maisons de jeunes et de la culture et les salles de spectacle la musique andalouse déclinée sous ses trois écoles et le châabi restent les genres rois en ce mois et les interprètes s’invitent aussi parfois dans des lieux insolites qui se prêtent au jeu.
Dans la capitale le châabi et l’andalou se jouent dans la cour de l’emblématique Villa Abdeltif, une résidence du fahs qui conjugue tout ce que l’époque ottomane avait de plus luxueux et raffiné à ce que la baie et les hauteurs d’Alger offrent de plus apaisant et spectaculaire.
Aussi cette musique populaire profite du mois de ramadan pour revenir aux lieux de sa naissance et de son développement à savoir les cafés populaires des vieux quartiers de la capitale depuis quelques années le café el Bahdja qui a un pied dans la Casbah et un autre dans Bab El Oued tout en faisant face à la mer et qui accueillait les répétitions des association de musique andalouse comme El Moussilya dans les années 1950 s’anime durant le mois à la faveur de plusieurs récitals châabi qui se prolongent généralement jusqu’à la fin de l’été.
Réputé café du cardinal, le vieux Café Malakoff, un endroit complètement hors du temps comme figé plus de soixante ans plus tôt, sors lui aussi les lampions et les guirlandes le temps de quelques qâadates après la prière d’Ettarawih le temps d’une petite partie de dames ou de domino avec les élèves du cardinal en fond. Au cœur de la capitale de nouveaux espaces culturels sont venus se glisser dans le tissu urbain congestionné et surchargé d’Alger pour apporter un peu de musique et d’évasion dans des lieux bien plus bruyant et où l’économie, les bouchons, les ateliers et le marché règnent en rois.
C’est ainsi que les plus grands maîtres actuels de la chanson châabi se retrouvent sur la nouvelle scène nommée «Tahtaha» (placette) une terrasse sur élevée située sur les docs du port d’Alger non loin du petit port de pêche et l’amirauté des lieux qui n’ont jamais coupé avec cette musique depuis les années 1950.
Certes l’aspect culinaire prend souvent le dessus mais l’algérien se retrouve sans le vouloir à rompre le jeune sur un air de châabi incontournable à la télévision ou alors accompagné toute la journée à la radio de musique andalouse ou de hawzi.
Au-delà de la musique nous nous surprendrons tous un jour à reproduire des coutumes que nous avions vécus avec nos grands-parents lors de certains jours symboliques de ce mois sacré comme la veille du 15ème et du 27ème jour. Qui n’a jamais vécu le rituel particulier le jour où le petit dernier de la famille observe son tout premier jour de jeûne avec son lot de traditions perpétué par la grand-mère qui lui prépare son plat favori et de la cherbet pour rompre le jeûne ou encore d’autres traditions qui existent certainement aux quatre coins du pays mais qui ne sont pas très connues vu que cela se passe toujours dans le cadre du foyer familial. En plus la majorité des parents choisissent souvent la veille du 15ème ou du 27ème jour pour initier leurs enfants au jeûne.
Outre cette initiation une très grande partie des parents préfèrent attendre l’une de ces deux journées pour la circoncision de leurs petits garçons, la veille du 27ème jour qu’on apparente toujours à Leilat el qadr (la nuit du destin) étant la plus attendu par les parents.
Cet événement familial se produit toujours avec son lot de costumes traditionnels spécialement confectionnés pour le jeune garçon d’une multitudes de plats et de gâteaux traditionnels ainsi que de traditions festives variant selon les familles et les régions.
Souvent les mosquées et zaouïa sont impliquées dans ce genre d’événement en organisant des cérémonies collectives ou alors en participant financièrement avec les familles démunies pour l’achat de toute la panoplie nécessaire à la circoncision.
Si ce n’est par souci de préservation involontaire d’un legs patrimonial ancré en nous même pourquoi des parents d’aujourd’hui du début du 21ème siècle s’efforceraient-ils à trouver un costume traditionnel, une gandoura et une chechia à leur fils qui ne les portera probablement que ce jour la.
Pour l’anecdote il existe en Belgique une petite entreprise familiale florissante tenue par des immigrés algériens qui fait depuis plusieurs années dans la location de costumes de circoncision pour les familles maghrébines et surtout algérienne établies là bas.
M.R