20.000 victimes numériques dénombrées en dix ans

Cybercriminalité, la nouvelle « mode » criminelle

Il y a une décennie de cela, la cybercriminalité, cette nouvelle génération de la criminalité numérique, est apparue au pays, elle faisait ses débuts et ce n’est que vers l’année 2014 qu’elle commençait à poser de sérieux problèmes physiques et morales aux utilisateurs des technologies de la téléphonie mobile. En 2014, les premiers dossiers judiciaires formalisés par les services de sécurité dans le cadre de la lutte contre le nouveau phénomène de la cybercriminalité ne dépassaient pas les 250 affaires, huit ans après, le nombre est passé à plus de 6.500 affaires en une année. La cybercriminalité, la nouvelle « mode » criminelle.

La criminalité sur la Toile, désignait couramment par le nom de cybercriminalité, a déjà causé prés de 20.000 victimes depuis son apparition il y a dix ans en Algérie. Fraude sur internet, cyber-harcèlement, hacker, atteinte au droit d’auteur, intimidation et atteinte à la dignité des personnes, escroquerie, cyber-terrorisme, atteinte aux personnes, désobéissance civile, menace de mort, cyber-attaque, piratage des entreprises et institutions, haine, chantage et attaque réseau, un large éventail d’activités et une multiforme criminelle ont vu le jour sur la Toile. Si en 2014, le nombre des affaires cybercriminelles traitées par les services de sécurité algérien ne dépassait pas les 250 cas, en 2021, ce nombre est passé à plus de 6.500 dossiers judiciaires. Sur les dix ans précédents, les bilans fournis par les services de sécurité sur la lutte contre le crime numérique parlent d’eux-mêmes, ils désignent parfaitement une évolution significative et nette de la cybercriminalité. Ainsi, le nombre des dossiers judiciaires formalisés est passé de 246 dossiers en 2014, à 567 en 2015 puis 1.055 dossiers en 2016, pour atteindre 2.130 affaires en 2017, et de continuer la marche pour atteindre 3.500 dossiers en 2018 ensuite 4.210 dossiers en 2019 pour arriver à 5.163 dossiers en 2020, soit une augmentation de plus de 2000% par rapport à l’année 2014.
En 2021, le nombre des affaires liées à la criminalité électronique ont atteint les 5.900 cas, dont 4.734 affaires ont été résolues. En deux ans, soit entre 2020 et 2021, le nombre des affaires liées à la cybercriminalité a franchi le cap des 10.000, faut-il le signaler. En 2021, les services de la Sûreté nationale ont traité 2.146 affaires cybercriminelles liées aux atteintes aux personnes contre 2.816 en 2020, soit près de 5.000 victimes ont subis des attaques sur le Net. Puis, l’escroquerie sur la Toile a connue une hausse durant l’année 2021, où les cyber-policiers ont recensé 500 affaires causant plus de 500 victimes de fraude électronique.

Explosion de la cybercriminalité
en pleine Covid-19
Les affaires liées au cyber-terrorisme ont, à leurs tours, connus une hausse avec 71 affaires traitées par la DGSN au cours de l’année précédente contre 51 affaires diligentées en 2020. Aussi, les attaques électroniques contre des données numériques ont marqué une augmentation durant l’année 2021, ici 371 affaires ont été traitées contre 332 affaires en 2020.
Le crime électronique a explosé durant la période de confinement sanitaire et lors du passage de la pandémie du Covid-19. Dès les trois premiers mois du début de confinement total, soit entre mars et mai 2020, les affaires pénales constatées sur les réseaux sociaux et traitées par les services de sécurité ont battus tous les records, leurs nombres ont atteint 1.546 affaires cybercriminelles, selon un bilan établi par les services de sécurité lors de cette période. D’habitude, ce nombre considérable des affaires de la cybercriminalité est recensé sur une période de douze mois, toutefois le phénomène a explosé lors du confinement sanitaire.
Haine, atteinte à la dignité des personnes, agressions physiques et morales, appels à la vengeance, nervosité excessive, désobéissance civile, fausses informations, de multiples postures ont envahies les réseaux sociaux, cette arme technologique à double tranchant. Une tendance qui s’accélère trop rapidement chaque jour et qui, par conséquent, engendre davantage de victimes. Pour faire face à cette nouvelle forme de criminalité, l’Algérie était contrainte de se doter, il y a quelques mois, d’une loi incriminant la publication des propos racistes et les fake news, les agressions morales, les appels à la désobéissance sur les réseaux sociaux. L’Etat avait décidé d’agir avec la plus grande fermeté contre les publications à caractère criminel y compris les fake news. Le ministère des Affaires religieuses a été mis à contribution dans la lutte dont les ravages ont été très déplorables. Le ministère avait publié, en 2020, une fatwa avis juridique donné par un spécialiste de la loi islamique conte les fausses informations. Mais, malgré toutes ces décisions, les agressions sur les réseaux sociaux n’ont pas cessé, elles ont même doublé. Les réseaux sociaux sont les véritables réservoirs du mal et des supports importants de la publication de la haine, où les appels aux agressions collectives contre des médecins avaient pris forme au printemps 2020, faut-il le rappeler. C’est ici que les appels à la désobéissance civile sont diffusés et c’est sur ces réseaux sociaux que les atteintes à la dignité des personnes se comptent à la pelle, et c’est ici encore que, les fausses informations ou « fake news » circulent et se consomment par les internautes algériens.

La guerre juridique à la cybercriminalité
est déclarée
La cascade des fausses informations et les communiqués erronés publiés sur la Toile ont fait rapidement réagir l’Etat car, l’impact que représentent et portent à la fois de telles informations sur les internautes est considérable. En avril 2020, le ministère de l’Intérieur avait affirmé que « la diffusion de rumeurs et de fake news pour semer la confusion et troubler l’ordre public est passible de sanctions fermes conformément aux mécanismes prévus par la loi ». Les retombées de cette décision de l’Etat se font rapidement traduites et ressenties sur le terrain. En mai 2020, le magistrat près le tribunal de M’Sila avait prononcé une peine de six mois de prison ferme assortie d’une amende de 100.000 DA à l’encontre d’une jeune fille arrêtée pour désinformation de l’opinion publique sur la propagation du Covid-19. En effet, la jeune fille, âgée d’une vingtaine d’années, jugée en comparution immédiate était poursuivie pour « diffusion des publications qui nuisent à l’intérêt national » et pour « diffamation sur les réseaux sociaux ».
En juin 2020, les services de la Sûreté nationale avaient arrêté un jeune internaute dans la wilaya de Tiaret pour diffusion de fausses informations sur les réseaux sociaux. Ce dernier avait publié sur les réseaux sociaux une fausse correspondance ministérielle portant une signature falsifiée du ministre de l’Intérieur, des Collectivités locales et de l’Aménagement du Territoire, concernant ce qu’il a appelé « prime de contagion et prime de risque au profit des éléments de la Protection civile ». Toujours durant l’année 2020, les éléments de la sûreté de daïra de Boussaâda, relevant de la sûreté de wilaya de M’sila, avaient arrêté deux jeunes internautes pour avoir « répandu la terreur en générant un climat d’insécurité » et pour « outrage à corps constitués » sur le réseau social Facebook. Ils avaient posté une série de publications « incitant les foules au rassemblement », en plus « d’atteinte à la sécurité de l’Etat et outrage à corps constitués ». Les procédures judiciaires achevées, les mis en cause avaient été traduits devant le parquet pour « propagation de terreur et création d’un climat d’insécurité à travers une atteinte au moral de corps constitués ».

Le réseau de M’Sila et l’attaque
numérique contre l’Islam
La Gendarmerie nationale avait traité, en juillet 2016, une affaire d’attaque contre la religion musulmane et les prophètes. Il s’agit d’une attaque sur Internet planifiée et perpétrée pendant le mois de Ramadhan de l’année 2016. C’est dans le cadre de ses activités contre la cybercriminalité que la Gendarmerie nationale a découvert les activités d’un réseau qui dénigre, sur Internet, la religion musulmane, le Coran, les symboles divins et les prophètes. Toutes les religions sont attaquées, en particulier l’Islam. Les membres de ce réseau publiaient des articles, des vidéos et des caricatures insultant Dieu, le Prophète Mohamed (QSSSL), les envoyés de Dieu et la religion musulmane. Les mis en cause utilisaient un site électronique pour leurs publications et déformaient les versets coraniques. Ce réseau œuvrait pour semer le doute sur la religion musulmane et la foi, appelant à la non-croyance de Dieu et au christianisme. Ce réseau qui active dans un nombre de wilayas, a une ramification à l’étranger, et coopère avec des réseaux appelant au non-croyance ou au christianisme dans des pays du Moyen-Orient dont la Syrie et l’Egypte. L’enquête menée par la section de recherches du groupement de la wilaya de M’sila de la Gendarmerie nationale, a abouti à l’arrestation de deux accusés, l’un âgé de 27 ans et l’autre de 28 ans. L’un d’eux possédait un local commercial au centre-ville de la wilaya de M’sila et activait sans registre de commerce. Après une perquisition effectuée dans ce local commercial, du matériel informatique utilisé dans ce crime a été saisi. Le choix du mois de Ramadhan par les présumés auteurs de cette propagande anti musulmane et qui insulte également les prophètes d’autres religions, a lieu au moment où la fitna motive les extrémistes et les radicaux, et instaure le chaos dans de nombreux pays. Sofiane Abi