Pedro Sanchez où la descente en enfer des socialistes espagnols

Revirement de la politique de son gouvernement à l’égard de l’occupation marocaine du Sahara occidental

Alger ne décolère pas depuis que le Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, a annoncé le revirement de la politique de son gouvernement à l’égard de l’occupation marocaine du Sahara occidental.Soixante dix jours après l’annonce du soutien de l’actuel gouvernement à la formule illégale et illégitime de l’autonomie interne préconisée par le Maroc, puissante occupante du Sahara occidental, la Présidence de la République algérienne revient à la charge et décide de suspendre immédiatement le Traité d’amitié et de bon voisinage et de coopération conclu en octobre 2002. Le communiqué de la présidence algérienne annonçant cette décision l’a expliqué par le fait que «les autorités espagnoles se sont engagées dans une campagne tendant à justifier la position qu’elles ont adoptée sur le Sahara occidental en violation de leurs obligations juridique, morale et politique de puissance administrante du territoire qui pèsent sur le Royaume d’Espagne jusqu’à ce que la décolonisation du Sahara occidental soit déclarée accomplie par les Nations unies», souligne le communiqué.
Depuis le 18 mars 2022, date de l’annonce par Pedro Sanchez du revirement de sa position vis-à-vis de l’occupation du Sahara occidental et malgré la forte opposition que cette décision a suscitée en Espagne, le gouvernement de Pedro Sanchez a adopté la politique de l’autruche en attendant que l’orage passe avec l’Algérie. Sauf que le communiqué de la Présidence algérienne a vite fait de rappeler à Madrid que sa crise avec Alger n’est pas un orage passager.
Et pour preuve. L’Espagne est l’ancienne puissance colonisatrice du Sahara occidental avant que le Maroc ne décide de l’occuper par la force en 1975. Une occupation qui n’a pas tenue compte du droit de la population sahraouie de disposer d’elle-même.
Depuis, le dossier de décolonisation de ce territoire est sur la table du Conseil de sécurité de l’ONU à un moment où le Polisario, représentant légitime du peuple sahraoui, poursuit la lutte armée pour arracher son indépendance.
Le 21 octobre 2021, le secrétaire général de l’ONU nomme Staffan de Mistura comme son envoyé personnel au Sahara occidental. Cinq mois plus tard, l’Espagne, ancienne puissance occupante et au lieu de soutenir les actions de Staffan de Mistura, nage à contre-courant et apporte par la voix de son Premier ministre, son soutien au plan marocain d’annexion du Sahara occidental.
Pedro Sanchez assume donc la responsabilité d’un probable échec de la mission du représentant personnel du secrétaire général de l’ONU et surtout du durcissement des affrontements armés au Sahara occidental et les tensions diplomatiques et militaires en Afrique du Nord et en Méditerranée occidentale. La position de l’Algérie est clairement affichée dans le communiqué de la Présidence algérienne : «Cette attitude du gouvernement espagnol s’inscrit en violation de la légalité internationale que lui impose son statut de puissance administrante et aux efforts des Nations unies et du nouvel envoyé personnel du secrétaire général et contribue directement à la dégradation de la situation au Sahara occidental et dans la région».
Le Premier ministre espagnol a-t-il mesuré les conséquences du revirement de la politique de son gouvernement à l’égard de la question sahraouie ?
A première vue, non. Depuis le communiqué du 18 mars 2022, certains médias tentent d’expliquer le revirement de Pedro Sanchez par la politique du chantage adoptée par le Makhzen. Parmi les causes, nous trouvons en bonne place l’émigration et les craintes d’un envahissement des deux enclaves espagnoles de Ceuta et Mellila par des dizaines de milliers de migrants.
Cette crainte n’a aucune raison d’être. Dans le cadre des accords avec l’Union européenne, le Maroc reçoit des centaines de millions d’euros annuellement rien que pour jouer le rôle de gendarme et contrer les flux migratoires. Dans le cas où le Makhzen refuserait de jouer ce rôle, il perdrait cette grosse manne financière. Chose que le roi du Maroc n’est pas prêt à faire vu que son royaume vit en grande partie grâce à l’aide internationale. Le second chantage, celui de Ceuta et Mellila. Certains médias sont même allés jusqu’à dire qu’un accord non rendu public a été conclut entre le roi du Maroc et Pedro Sanchez. Il est question dans ce deal que le Maroc ne revendiquera plus Ceuta et Mellila en contre-partie d’un soutien de l’Espagne à la proposition marocaine d’autonomie au Sahara occidental. Sauf que ceux qui parlent de cet accord ont oubliés que le Sahara occidental a un peuple qui lutte pour son indépendance et que ce dossier est toujours sur la table de l’ONU dans le cadre de la décolonisation. A Ceuta et Mellila par contre, il n’existe aucune résistance armée pour revendiquer l’indépendance de ces deux conclaves devenues chrétiennes il y plus de cinq siècles.
En réalité Pedro Sanchez a sérieusement affaibli l’Espagne en s’alignant sur la position marocaine.
Le revirement de la politique de ce dernier vis-à-vis du dossier sahraoui est loin d’être un orage passager dans le ciel algéro-espagnol. Conscient que l’Espagne ne peut peser pour infléchir les positions de l’Algérie, Madrid a demandé le soutien de Bruxelles pour faire pression sur Alger. Sauf que l’Algérie n’est pas le Maroc et ne dépend pas des aides et des subventions de l’Union européenne.
Un Traité d’amitié entre un pays membre de l’Union européenne et un autre non membre n’engage nullement la Commission européenne. Et l’Algérie est libre de suspendre tout Traité sans violer les accords qu’elle a avec Bruxelles De deux, les importateurs algériens sont eux aussi libres d’acheter leurs marchandises des pays qu’ils veulent.
Aucun accord ne les oblige d’acheter d’Espagne. Pareils pour les importateurs espagnols qui ne sont pas obligés d’acheter des produits algériens. Enfin et concernant le gaz naturel, les contrats sont clairs. Les prix sont renégociés régulièrement et fixés selon les conditions du marché. En 2020, les prix du gaz étaient au plus bas dans les marchés. Les sociétés espagnoles avaient alors imposées à Sonatrach de renégocier les prix au plus bas. Aujourd’hui le GNL américain et quatre fois plus chers que ce qu’il était en 2020. Donc, l’Espagne doit alors payer le gaz algérien quatre fois plus cher qu’en 2020. Ce sont les lois du marché. Dans le cas contraire et tout en respectant les termes du contrat, Sonatrach a le droit de couper le gaz à l’Espagne s’il n’y a pas d’accord sur le prix.
A un an des élections législatives en Espagne le parti socialiste ouvrier espagnol (PSOE) de Pedro Sanchez sort déjà largement affaibli par la crise économique et les conséquences de la détérioration des relations avec l’Algérie. Le parti populaire, tendance libéral et conservateur, se prépare déjà à cette échéance.
Le PP a déjà dénoncé le changement de position du gouvernement espagnol concernant le dossier sahraoui. Mais d’ici fin 2023, date des élections en Espagne, il n’est pas certains que les lourds nuages qui assombrissent le ciel des relations algéro-espagnoles vont se dissiper. Mais il ne reste qu’une seule certitude : Pedro Sanchez à mis l’Espagne dans une position de faiblesse en se soumettant au chantage du makhzen.
Reda C.