La solitude, un choix délibéré ou une contrainte

Thème de prédilection en littérature

La solitude comme le silence a toujours été un besoin naturel pour l’homme et que les écrivains de talent mettent en évidence pour expliquer des comportements atypiques, les fondements des meilleures relations en société.

C’est dans la solitude que les prophètes des religions monothéistes (QLSSSL) ont reçu le message divin avec la charge sacrée de le diffuser aux hommes. Les musulmans savent que le Prophète Mohammed (QLSSSL) avait coutume de se retirer dans la grotte, Hira, où un jour l’ange Gabriel (QSSSL) s’est adressé à lui pour lui communiquer le message de Dieu. Ceci montre que ceux qui choisissent d’être seuls sont des personnes singulières par la pensée, le destin, la manière de considérer la vie. Ibn Khaldoun s’est enfermé pendant des mois dans une grotte de Tihert pour mettre en forme les Prolégomènes. Kateb Yacine lui-même disait qu’il disparaissait pour se consacrer dans la solitude totale à l’élaboration d’un livre lorsque l’inspiration lui venait. Dans ce cas, l’isolement n’a rien à voir avec le rêve éphémère de solitude du misanthrope de Molière ou de Zarathoustra de Nietzsche.

La solitude traduit le désir d’indépendance
Cette conception de la solitude de Pascal pose le problème fondamental de la relation entre soi et autrui. Sans les autres, je n’existe pas. Ce qui explique le thème du double en littérature lorsque l’auteur fait l’effort d’inventer un autre soi-même, idéal et qui n’existe pas dans la réalité.
Mais si les écrivains accordent une place privilégiée à la solitude, c’est beaucoup plus pour mettre en relief deux situations extrêmes et contradictoires, celles de l’impossibilité de vivre dans la solitude ou de ne jamais être seul. Nul ne peut se vanter de se passer des autres. Et lorsqu’une condamnation à vivre dans une cellule de prison est prononcée contre un condamné, ce dernier se bat pour la sauvegarde de son individualité. Il suffit que l’emprisonné soit un homme de lettres pour que cet isolement insupportable devienne un sujet d’écriture pour être sûr d’avoir gardé l’usage de la parole et d’appartenir à l’espèce humaine. Pour avoir tenté d’assassiner Rimbaud, Verlaine a été emprisonné et en cette triste occasion, il n’a pu s’empêcher de décamper d’une prison.

La solitude dans le temps et l’espace
Le sentiment de solitude a marqué à des degrés divers le vécu de chacun, qu’il soit enfant, vieux, beau, laid, exilé, emprisonné, endeuillé mais en quarantaine, ce sont là les cas de figure les plus courants dans une société, mis à part les écrivains qui ont choisi la retraite par goût ou en vertu d’une discipline de vie personnelle.
Au début de l’Antiquité, l’homme était considéré comme un citoyen en tant qu’homme libre ou en qualité d’esclave déchu de tous les droits. Les livres d’histoires écrits objectivement nous rapportent que les sociétés sont fondées sur une hiérarchie. Les pauvres sont toujours exploités et à la merci des riches.
On sait comment cela s’est-il passé avec les siècles d’esclavage pour les Noirs d’Afrique et les siècles de colonisation. Quelle que soit l’époque à laquelle on appartient, se suffit à lui-même jamais d’un pauvre toujours dépendant de celui qui paie selon ses sautes d’humeur.
Des écrivains ont eu le courage de revendiquer la différence de leur individualité qui ont donné à réfléchir à ceux qui se sont inhumainement comportés. «J’ose croire n’être fait comme aucun de ceux qui existent», dit J. J. Rousseau, auteur de Rêveries d’un promeneur solitaire par lequel il se fait le défenseur et le chantre de la solitude. Plus tard, la solitude entre dans la plupart des œuvres littéraires comme thème justifié par une actualité brûlante. On peut penser aux conditions de vie aliénantes. Simone de Beauvoir «Deuxième sex» a maintes fois dénoncé le modernisme qui abêtit, aliène, fait e l’homme un esclave des produits de consommation. A cette situation, elle oppose celle des sociétés restées traditionnelles des campagnes grecques, espagnoles ou d’ailleurs où chacun éprouve un réel bonheur en vivant seul, des légumes et fruits qu’il cultive lui-même.
Une belle image de la solitude se trouve dans Candide de Voltaire où le voyageur et ses compagnons, chargés d’une prospection à travers le monde, trouvent en Turquie un homme heureux parce que coupé du monde et totalement désintéressé de tout ce qui se passe dans le monde.N’oublions pas parler des cris de soulagement de Baudelaire dès lors qu’il s’est retrouvé seul à une heure du matin : « Enfin ! seul ! à une heure du matin, paroles qui traduisent la satisfaction d’échapper à la tyrannie des hommes.
L’univers de l’Albatros, seul dans les cieux doit traduire son désir de vivre loin de toute la société méchante. «Le poète est semblable au prince des nuées qui hante la tempête et se rit», vers célèbre des Fleurs du mal. Quant à Galilée, condamné par l’église, il espérait vivre la liberté d’un réprouvé dans la solitude.
Abed Boumediene