L’Algérie : une histoire millénaire dans la résistance et l’édification de l’Etat-Nation des Numides à l’indépendance du 5 juillet 1962

Célébration de l’indépendance du 5 juillet 2022

Le premier était Dali Ahmed Pacha 1589/1582, pendant ce règne les relations entre la France et l’Algérie ont connu une détérioration suite à son soutien aux Espagnols contre l’Algérie. Ensuite l’époque des Aghas1659/1671 et l’époque des Deys 1671/1830. Les Aghas sont les officiers des forces terrestres ; l’agha était nommé par le conseil. Cette période a connu une grande attaque de la France sur El Kala en 1663 et une autre sur Jijel en 1664 mais toutes ont échoué. Vers 1600 se stabiliseront définitivement les frontières orientales et occidentales de la Régence, à la suite des victoires sur le sultan marocain Moulay Ismaïl en 1694. Le pouvoir de ces chefs s’accrut rapidement. Baba Ali en 1710 obtient l’investiture de la Régence. Comme leur pouvoir était électif, les deys restèrent toujours à la merci des janissaires, qui les déposaient à leur gré. Le dernier dey d’Alger, Hussein régnait depuis 12 ans au moment de la conquête française en 1830. Cependant des zones géographiques n’ont pas été dominées par les Ottomans de 1515 à 1830 ayant été incapables d’étendre leur autorité aux régions sahariennes. Le Sahara était l’axe principal des échanges commerciaux entre l’Afrique noire et le nord. A Ouargla, les habitants étaient gouvernés par l’autorité des zaouïas. Les mouvements des marabouts étaient fort implantés dans toutes les régions du sud et dans une partie des Aurès. Dans l’extrême sud, une confédération targuie, les Kel Ahaggar, fut formée dans le Sahara algérien vers l’année 1750.

5. De la colonisation française
Quant à la colonisation française de 1830 au déclenchement de la guerre de libération nationale, il semblerait, peut-être un prétexte, que tout aurait commencé par la fameuse affaire de l’éventail. L’origine de la dernière querelle entre la France et la régence d’Alger remonte au Directoire des commerçants juifs de Livourne installés à Alger, les Bacri et les Busnach ont alors livré d’importantes quantités de grains pour nourrir les soldats participant avec Bonaparte à la campagne d’Italie. Bonaparte refuse de régler la facture qu’il juge excessive. En 1820, Louis XVIII éponge la moitié des dettes du Directoire. Le dey, créancier des Bacri pour 250 000 francs, exige de la France le versement de la somme destinée aux commerçants livournais. Comme il pense que la France n’a pas l’intention de rembourser le prêt, il se trouve déjà en froid avec le consul. Mais une affaire bien plus grave met le dey hors de lui : la France avait la concession d’un entrepôt commercial à La Calle, et par l’intermédiaire de son représentant Deval, s’était engagée à ne pas le fortifier. Or, elle a fortifié l’entrepôt. Lorsque le dey s’en rendit compte et qu’il demanda par écrit des explications au gouvernement français sans obtenir de réponse, il se contenta de demander des explications verbalement au consul de France qui choisit le parti de le prendre de haut. Le 30 avril 1827 à Alger, le dey soufflette avec son éventail le consul de France, Deval. L’épisode entraîne la rupture diplomatique avec la France. Le Conseil des ministres décide d’organiser une expédition en Algérie le 31 janvier 1830. La conquête de l’Algérie de 1830 à 1871 marque la fin de la domination ottomane et le début de la domination française. D’abord nommés «possessions françaises dans le Nord de l’Afrique», ces territoires prendront officiellement le nom d’Algérie, le 14 octobre 1839. La population algérienne est estimée à 3 millions d’habitants avant la conquête française de 1830. Selon l’ouvrage Coloniser, exterminer de l’historien Olivier Le Cour Grandmaison je cite : «Le bilan de la guerre, presque ininterrompue entre 1830/1872 souligne son extrême violence ; il permet de prendre la mesure des massacres et des ravages commis par l’armée d’Afrique. En l’espace de quarante-deux ans, la population globale de l’Algérie est en effet passée de 3 millions d’habitants environ à 2.125.000 selon certaines estimations, soit une perte de 875.000 personnes, civiles pour l’essentiel. Le déclin démographique de l’élément arabe était considéré comme bénéfique sur le plan social et politique, car il réduisait avantageusement le déséquilibre numérique entre les indigènes et les colons.» Plusieurs observateurs s’accordent à dire que la conquête de l’Algérie a causé la disparition de presque un tiers de la population algérienne. Guy de Maupassant écrivait dans Au Soleil en 1884 je le cite : «Il est certain aussi que la population primitive disparaîtra peu à peu; il est indubitable que cette disparition sera fort utile à l’Algérie, mais il est révoltant qu’elle ait lieu dans les conditions où elle s’accomplit». Nous pouvons scinder cette période historique en plusieurs phases. Sous Louis Philippe 1er de 1830 à 1848, l’Emir Abd El Kader figure charismatique, fondateur de l’Etat algérien selon certains historiens, résista pendant de longues années à l’occupation coloniale. Il attaque des tribus alliées de la France et bat le général Trézel dans les marais de la Makta près de son fief de Mascara dans l’Ouest algérien. Il encercle la ville voisine d’Oran pendant 40 jours. Arrivé en renfort de métropole, le général Bugeaud inflige une défaite à Abd El Kader. Le traité de Tafna est signé le 30 mai 1837 entre le général Bugeaud et l’Émir qui reconnaît la souveraineté de la France. En échange de pouvoirs étendus sur les provinces de Koléa, Médéa et Tlemcen il peut conserver 59 000 hommes en armes. L’armée française passe, en septembre 1839, les Portes de fer dans la chaîne des Bibans territoire que l’émir comptait annexer. Abd El-Kader considérant qu’il s’agit d’une rupture du traité de Tafna, reprend, le 15 octobre 1839 la guerre contre la France le 16 mai 1843. Le 14 août 1844 le général Bugeaud écrase l’armée du sultan marocain à la bataille d’Isly. L’armée marocaine se replie en direction de Taza. Le sultan s’engage alors à interdire son territoire à Abd El-Kader en traitant avec la France. Le 23 septembre les troupes d’Abd El Kader sortent victorieuses lors de la bataille de Sidi Brahim engagée par le colonel Montagnac. En décembre 1847, Abd El Kader se rend aux spahis (nomades des régions steppiques de l’Algérie). Placé en résidence surveillée pendant quatre ans en France, l’émir fut libéré par Napoléon III, visita plusieurs villes de la métropole avant de rejoindre Damas et résida le restant de sa vie en Syrie. Le 11 décembre 1848 la Constitution de 1848 proclame l’Algérie partie intégrante du territoire français. Bône, (Annaba actuellement) Oran, Alger deviennent les préfectures de trois départements français. Les musulmans et juifs d’Algérie deviennent «sujets français» sous le régime de l’indigénat. Le territoire de l’ex-Régence d’Alger est donc officiellement annexé par la France, mais la région de la Kabylie qui ne reconnaît pas l’autorité française résiste encore. L’armée française contrôle alors tout le nord-ouest de l’Algérie. Les succès remportés par l’armée française sur la résistance d’Abd el-Kader, renforcent la confiance française, et permettent de décréter, après débats, la conquête de la Kabylie qui doit intervenir à l’issue de la guerre de Crimée (1853 -1856) qui mobilise une partie des troupes françaises. C’est à cette époque que Fatma N’soumer la femme rebelle marqua une grande résistance. Née en 1830, l’année même de l’occupation française d’Algérie, en 1853, elle avait 23 ans dans son Djurdjura natal. Elle est arrêtée le 27 juillet 1857 dans le village de Takhliit Ath Atsou près de Tirourda. Placée ensuite en résidence surveillée à Béni Slimane, elle y meurt en 1863, à l’âge de trente-trois ans, éprouvée par son incarcération. En mars 1871, profitant de l’affaiblissement du pouvoir colonial à la suite de la défaite française lors de la guerre franco-prussienne (1870-1871), une partie de la Kabylie se soulève favorisée par plusieurs années de sécheresse et de fléaux. Elle débute au mois de janvier avec l’affaire des Spahis et en mars avec l’entrée en dissidence de Mohamed El Mokrani qui fait appel au Cheikh Haddad, le grand maître de la confrérie des Rahmaniya. La révolte échoue et une répression est organisée par les Français pour «pacifier» la Kabylie avec des déportations. À la suite d’un ordre qui a été donné par l’armée de les envoyer en France, les Spahis se soulèvent fin janvier 1871 à Moudjebeur et à Ain-Guettar, dans l’Est algérien à la frontière avec la Tunisie. Le mouvement est rapidement réprimé. Dès lors le seul moyen de prévenir les révoltes, c’est d’introduire une population européenne nombreuse, de la grouper sur les routes et les lignes stratégiques de façon à morceler le territoire en zones qui ne pourront pas à un moment donné se rejoindre. La loi du 21 juin 1871 (révisée par les décrets des 15 juillet 1874 et 30 septembre 1878) attribue 100 000 hectares de terres en Algérie aux immigrants d’Alsace-Lorraine. De 1871 à 1898 les colons acquièrent 1 000 000 d’hectares, alors que de 1830 à 1870 ils en avaient acquis 481.000.
Le 26 juillet 1873 est promulguée la loi Warnier visant à franciser les terres algériennes et à délivrer aux indigènes des titres de propriété. Cette loi donne lieu à divers abus et une nouvelle loi la complétera en 1887. Son application sera suspendue en 1890. Le Code de l’Indigénat est adopté le 28 juin 1881 distinguant deux catégories de citoyens : les citoyens français (de souche métropolitaine) et les sujets français, c’est-à-dire les Africains noirs, les Malgaches, les Algériens, les Antillais, les Mélanésiens.

Professeur des universités
Expert international
Dr Abderrahmane Mebtoul
(A suivre…)