Crise du gaz en Europe, meilleur moment pour négocier les prix

L’AIE table toutefois sur une baisse de la consommation en 2022

La crise énergétique risque de s’aggraver en Europe. Le prix du gaz naturel a bondi de 16 % en seulement quelques heures après l’annonce d’une grève dans les champs de gaz norvégiens, ce qui pourrait impacter fortement les livraisons du gaz vers d’autres pays européens, qui comptent sur ce pays pour compenser, un tant soit peu, les importations du gaz russe. Un pari difficile à gagner dans un contexte énergétique très délicat, aggravé par la poursuite de la guerre en Ukraine et la hausse des tensions inflationnistes qui touchent tous les produits énergétiques.
Le prix du gaz européen est à son plus haut niveau depuis quatre mois, ce qui suscite l’inquiétude des gouvernements européens de plus en plus préoccupés par l’offre limitée du gaz, la baisse de leurs réserves et la flambée des prix. La diminution de jour en jour du volume des importations du gaz russe et la paralysie de l’industrie des hydrocarbures en Norvège en sont les raisons. Dans cette foulée, les pays producteurs de gaz songent à revoir les prix de vente de leur gaz. L’Algérie a annoncé avant-hier, la révision de ses tarifs. C’est le meilleur moment pour revoir les prix du gaz.
L’Algérie qui exporte du gaz naturel et du gaz naturel liquéfié (GNL) vers l’Espagne, l’Italie et le Portugal via son réseau de Gazoduc et des méthaniers a confirmé grâce aux nouvelles découvertes récentes ses capacités de produire plus de gaz, mais devrait poser ses propres conditions pour exporter plus de gaz. Au prix fort. Des prix dictés par une offre limitée et une demande croissante. Un déséquilibre structurel du marché qui risque de durer encore quelques années. Dans son dernier rapport, l’Agence internationale de l’Energie (AIE) a évoqué une légère baisse de la consommation du gaz en 2022, mais avertit contre une hausse progressive durant les prochaines trois années. Il faut s’attendre à une forte hausse des cours du gaz aussi. «La consommation mondiale de gaz naturel devrait se contracter légèrement en 2022 et croître lentement au cours des trois années suivantes alors que le conflit en Ukraine fait grimper les prix et alimente les craintes de perturbations persistantes des approvisionnements», selon un rapport trimestriel de l’AIE. L’arrêt du financement des projets d’exploration des comestibles fossiles et le manque de financements et d’investissements dans le secteur du renouvelable, auront des conséquences négatives sur l’économie mondiale et aussi sur la consommation. Les ménages par exemple n’auront pas les capacités financières nécessaires pour payer leur consommation énergétique (électricité et gaz), contrairement aux secteurs productifs qui ne peuvent se passer des énergies fossiles pour faire marcher leur activité.
Il faut s’attendre à une augmentation de la demande d’ici trois ans, selon le même rapport. «Conséquence de cette nouvelle donne géopolitique, la demande mondiale de gaz devrait augmenter au total de 140 milliards de mètres cube (bcm) entre 2021 et 2025, soit moins de la moitié du total prévu précédemment et moins que la progression de 170 bcm constatée pour la seule année 2021, marquée par un redémarrage de l’économie mondiale paralysée en 2020 par la pandémie de Covid».
L’AIE et plusieurs autres organisations internationales craignent un retour contraignant de l’utilisation du charbon, au mépris du renouvelable. La demande du GNL continuerait à grimper. Un gaz qualifié d’ami de l’environnement.
L’Algérie compte renforcer sa production du GNL, non seulement pour réduire son empreinte carbone, mais surtout pour tirer bénéfice de cette conjoncture.
L’Europe se tourne d’ailleurs vers l’Algérie qui vient de s’accorder avec le Nigeria, plus grand producteur du gaz en Afrique et dans le monde, pour alimenter le marché européen.
La croissance économique européenne est à la traîne. La situation risque d’aggraver les tensions sur le marché énergétique.
«A l’inverse, l’effort grandissant de l’Europe pour éliminer le gaz russe en le remplaçant par du gaz naturel liquéfié (GNL), conjugué à une capacité mondiale limitée à accroître les exportations de GNL, augmente le risque de tensions sur le marché».
Samira Takharboucht