Souvenirs d’un passé nostalgique

Dans le village d’antan

Rien à voir avec la vie des villageois d’aujourd’hui qui ont tout perdu du traditionalisme, en faisant une consommation immodérée d’internet ainsi que des émissions télévisées et du portable à multiples fonctions. Quand on fait la comparaison, on remarque que la vie au village d’antan est beaucoup moins contraignante et n’a rien de commun avec la vie de nos jours.

Le coût de la vie était meilleur à tous égards
Contrairement à aujourd’hui, rares étaient ceux qui avaient un emploi fixe avec un salaire mensuel régulier. Mais la campagne avait gardé intactes ses traditions agricoles, artisanales, culinaires, vestimentaires. Les comportements et les relations étaient fondés sur des principes de conduite respectés par tous pour faire le bonheur de chacun. La solidarité, le respect d’autrui, le droit de chacun à la parole, la générosité en sont quelques exemples. Tout le monde est au service de chacun. Si quelqu’un est dans le malheur, cela se sait vite, et la peine est partagée. Chacun également a, bien ancrée en lui, la règle que nul n’a le droit de porter atteinte au bien d’autrui ni à son honneur. La sécurité pour tous, source de bonheur, est admise comme un droit inviolable. C’est une source de bonheur qui rappelle un adage si cher aux anciens : la paix est bien meilleure que la richesse. Ce bonheur est d’autant plus réel qu’on se sent respecté en tant que personne humaine, partie à part entière dans un ensemble. Ainsi, le vol qui porte atteinte au bien d’autrui, est un déshonneur. Pour celui qui le commet et pour se famille. L’agression sous toutes ses formes est d’abord punie par l’assemblée locale avant d’arriver comme un délit au tribunal. Il était de coutume aussi de régler toutes sortes de conflits, litiges, sur la place publique, en présence de tous les hommes pouvant apporter des idées dans le respect de la diversité. C’était la vraie démocratie exercée sur l’agora. Quant au travail, valeur essentielle dans une société autarcique, il était accompli le matin, hiver comme été. Mis à part quelques-uns qui étaient soumis à l’horaire universel, tous les autres : fellahs, artisans, éleveurs, marchands qui s’interdisaient les veillées tardives, se levaient tôt, et la plupart d’entre eux n’avaient pas de montre. C’est pourquoi il est arrivé que des travailleurs de la terre soient arrivés dans leurs champs bien avant le lever du soleil.
Pour ceux qui s’en souviennent bien pour y avoir vécu leurs meilleures années, le village d’antan a perdu de tout son charme au fil des décennies d’exode rural. Il s’est vidé en perdant ses artisans, une bonne partie, pour ne pas dire tout son cheptel animal. Que de plaisir avions-nous d’entendre à l’aube les coqs chanter et les ânes braire ! Ces bêtes de somme, dont l’alimentation était le moindre des soucis du villageois de jadis, jouaient pourtant un rôle primordial. C’est à dos d’âne qu’on a pu acheminer sur les collines tous les matériaux de construction nécessaires pour bâtir des maisons. C’est à dos d’âne qu’on revenait des champs et que l’on s’y rendait. L’animal était là aussi pour le marché, lieu d’approvisionnement en denrées alimentaires. Que de souvenirs évoque le marché d’antan où on achetait sans qu’aucun marchand utilisat une balance pour servir à la demande du client ! Chaque marchand – boucher, vendeur de légumes ou de céréales – constituait des tas plus ou moins grands sur le sol couvert, et chacun des acheteurs négociait les prix et sans difficulté, les premiers vendent, les autres achètent.
La différence avec les marchands d’aujourd’hui, des gens de tout âge qui s’improvisent marchands au marché, ou ambulants, selon les circonstances, sont passés par l’école du mensonge, de l’hypocrisie ou de la ruse. Quand ils vous vendent quelque chose, il faut être bien concentré sur leurs gestes parce qu’ils sont capables de vous refiler ce qu’il y a de plus avarié. Ils sont à l’inverse des anciens qui avaient la balance dans le cœur.

Retour à la terre nourricière comme dans les pays développés
Des revues spécialisées, documentaires d’actualité nous rapportent des informations incroyables sur des gens de la ville, des citadins, qui ont étudié à l’université et qui ont décidé d’aller à l’aventure en allant vivre à la campagne. Certains, après qu’ils ont cru s’être fait un pécule appréciable, ont acquis la conviction de fructifier leur avoir en créant un poulailler, ou en s’adonnant à d’autres types d’élevage. Nous avons connu des cas uniques, tel cet homme qui a passé toute sa jeunesse en Europe, puis dans une grande ville d’Algérie et qui a fini par se rendre compte que le bonheur était dans la recréation du cadre de vie du village d’antan. Et sitôt arrivé sur les lieux, il débroussaille la terre de ses aïeux, laboure, plante des arbres, achète des ruches d’abeilles, crée un immense poulailler. Au bout de deux ans, il est devenu un homme de la terre natale, heureux d’avoir enfin compris que le bonheur existe, mais loin de la vie infernale des villes.
Abed Boumediene