Le rapport alarmant concernant l’indice du développement humain-IDH du Pnud de septembre 2022 sur la crise économique et la dégradation sociale au niveau mondial

Pnud

La nouvelle édition du rapport annuel 2021/2022 sur le classement mondial des pays selon l’indice de développement humain (IDH) a été publiée en septembre 2022 par le Programme des Nations unies pour le Développement (Pnud), rapport intitulé «temps incertains, vies bouleversées : façonner notre avenir dans un monde en mutation ». Dans ce rapport inquiétant sur la dégradation de la situation économique et sociale du monde en 2021, pourtant l’Algérie a eu une note honorable, étant classée à la 3e position en Afrique.

L’indice de développement humain ou IDH a été développé en 1990 par l’économiste pakistanais Mahbub ul Haq et l’économiste indien, prix Nobel d’économie Amartya Sen. L’IDH est un indice composite, compris entre 0 (exécrable) et 1 (excellent), calculé par la moyenne de trois indices. Le premier aspect ( A) quantifie la santé/longévité (mesurées par l’espérance de vie à la naissance), qui permet de mesurer indirectement la satisfaction des besoins matériels essentiels tels que l’accès à une alimentation saine, à l’eau potable, à un logement décent, à une bonne hygiène et aux soins médicaux adopté par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) en 1990. Il est plus fiable que l’indicateur précédent utilisé, le PIB par habitant, qui ne donne pas d’information sur le bien-être individuel ou collectif quantifiant que la production économique. Le deuxième aspect (B) est le savoir ou niveau d’éducation mesuré par le taux d’alphabétisation des adultes (pourcentage des 15 ans et plus sachant écrire et comprendre aisément un texte court et simple traitant de la vie quotidienne) et le taux brut de scolarisation (mesure combinée des taux pour le primaire, le secondaire et le supérieur). Il traduit la satisfaction des besoins immatériels tels que la capacité à participer aux prises de décision sur le lieu de travail ou dans la société.
Le troisième aspect ( C) est le niveau de vie (logarithme du produit intérieur brut par habitant en parité de pouvoir d’achat), afin d’englober les éléments de la qualité de vie qui ne sont pas décrits par les deux premiers indices tels que la mobilité ou l’accès à la culture donnant ainsi IDH = A D E/divisé par trois. Un examen plus poussé des éléments constituant l’IDH livre des données sur la répartition inégale des résultats en matière d’éducation, d’espérance de vie et de revenu au sein des pays.
L’Indice de développement humain ajusté aux inégalités permet de comparer les niveaux d’inégalités internationales : plus ce niveau est élevé, plus l’IDH d’un pays diminue. Des variations considérables de la qualité de l’éducation, des soins de santé et de nombreux aspects essentiels de la vie sont observées d’un pays à l’autre. Une classe du cycle primaire compte en moyenne 39 élèves pour un enseignant en Afrique subsaharienne et 35 en Asie du Sud, mais 16 à 18 dans les pays de l’OCDE, en Asie de l’Est et Pacifique, ainsi qu’en Europe et Asie centrale.
D’autre part, tandis que 28 et 27 médecins respectivement soignent 10 000 personnes dans les pays de l’OCDE et d’Europe, et dans les pays d’Asie de l’Est et Pacifique, ces chiffres sont réduits à huit seulement en Asie du Sud et moins de deux en Afrique subsaharienne. Quant à l’indice du capital humain de la Banque mondiale, il a été dévoilé en octobre 2018 lors de l’Assemblée générale conjointe FMI/BM et faisant partie des enjeux abordés dans l’édition 2019 du Rapport sur le développement dans le monde intitulé The Changing Nature of Work, qui traite de l’importance d’investir dans le capital humain pour se préparer au travail de demain.
Cette mesure intègre trois facteurs : survie : un enfant né aujourd’hui atteindra-t-il l’âge d’aller à l’école ; scolarité : quelle sera la durée de sa scolarité et quels seront ses acquis ; santé : cet enfant sortira-t-il du système scolaire en bonne santé, prêt à poursuivre ses études ou à entrer sur le marché du travail à l’âge adulte L’indice du capital humain de la BM montre que 56 % des enfants nés aujourd’hui dans le monde seront privés de plus de la moitié de leurs revenus potentiels à l’âge adulte parce que les États ne font pas les investissements nécessaires pour produire une population éduquée, résiliente et bien portante, prête pour le monde du travail de demain. L’indice du capital humain mesure le niveau de capital humain qu’un enfant né aujourd’hui est susceptible d’atteindre d’ici ses 18 ans, compte tenu des services de santé et d’éducation dans son pays. Il mesure la distance qui sépare un pays d’une situation optimale de scolarisation et de santé. Selon ce rapport que je cite « « le capital humain est souvent le seul capital des personnes les plus pauvres. C’est un des facteurs essentiels d’une croissance économique durable et inclusive
Le derniers rapport du Programme des Nations Unies pour le développement (Pnud), 2022 examine les liens, positifs et négatifs, entre le travail et le développement humain dans un monde en rapide évolution, où la globalisation rapide, les transitions démographiques, les défis écologiques et beaucoup d’autres facteurs créent de nouvelles opportunités, mais présentent aussi des risques, ce qui génère des gagnants et des perdants . Ce rapport note que avec 9 pays sur 10 en recul, que le développement humain est retombé à ses niveaux de 2016 et que le monde, est « incapable de s’attaquer à l’origine des problèmes auxquels nous sommes confrontés …le monde vacille de crise en crise, piégé dans un cycle de lutte contre les incendies et incapable de s’attaquer à l’origine des problèmes auxquels nous sommes confrontés. Sans un changement radical de cap, nous risquons d’avoir à supporter encore davantage de privations et d’injustices . Toujours selon le PNUD, plus de 90 % des pays ont enregistré une baisse de leur IDH en 2020 ou 2021 et plus de 40 % ont vu leur score chuter au cours de ces deux années, signalant que la crise continue de s’aggraver les deux dernières années ont eu un impact dévastateur pour des milliards de personnes dans le monde, lorsque des crises comme la Covid-19 et la guerre en Ukraine se sont succédé et ont interagi avec des changements sociaux et économiques radicaux, des changements planétaires dangereux et une aggravation de la polarisation. L’Amérique latine, les Caraïbes, l’Afrique subsaharienne et l’Asie du Sud ont été particulièrement touchées. Et de conclure : monde cherche par tous les moyens à répondre aux crises consécutives. avec le coût de la vie et les crises énergétiques que, s’il est tentant d’y apporter des solutions rapides comme les subventions aux combustibles fossiles, les tactiques de secours immédiats retardent les changements systémiques à long terme et face à cette situation inédite, marquée par l’incertitude, les gouvernants sont paralysés face à ces changements alors que nous avons besoin d’un sens renouvelé de la solidarité mondiale pour relever nos défis communs et interconnectés, .où aujourd’hui, avec un tiers des personnes dans le monde qui se sentent stressées et moins d’un tiers des personnes dans le monde qui font confiance aux autres, nous sommes confrontés à des obstacles majeurs freinant l’adoption de politiques qui fonctionnent pour les populations et la planète alors que nous avons besoin de se sentir plus en sécurité, reprendre le contrôle de la vie et conserver l’espoir dans l’avenir.» Qu’en est-il du classement du PNUD ? Les 10 premiers pays dans le classement du PNUD sont par ordre la Norvège avec 0,957 et un PPA par tête d’habitant de 66494 dollars US, l’Irlande, 0,955 avec 68371 dollars, la Suisse 0,955 et 69394 dollars, Hong Kong 0,949 avec 62985 dollars, Islande 0,949 avec 56682 dollars, l’Allemagne 0,947 avec 55314 dollars, Suède 0,945 avec 54508 dollars, Australie 0,944 avec 48085 dollars, Pays -Bas 0,944 avec 57707 dollars, Danemark 0,940 avec 48511 dollars, les USA arrivant en 17ème position avec un indice de 0,940 et paradoxe un PPA par tête d’habitant très élevé d 63826 dollars, la France très loin arrivant en 28ème position avec une note de 0,903. Les 10 pays africains sont par ordre Maurice, Seychelles, l’Algérie, l’Egypte, la Tunisie, la Libye, l’Afrique du Sud, le Gabon, Botswana et le Maroc.
Pour le Soudan du Sud, le Tchad, le Niger, la République centrafricaine et le Burundi, le Mali, le Mozambique et le Burkina Faso, ils viennent en bas du classement. Pour d’autres pays au niveau de l’Europe, nous avons le Portugal avec une note de 0,866 occupant la 38ème place, l’Italie classée à la 30ème place avec une note de 0,895, l’Espagne à la 27ème place et la Turquie 48ème place avec une note de 0,838. En Asie trois poids lourds, le Japon est à la 19ème place avec une note de 0,92, la Chine et l’Inde, chacun avec plus d’un milliard d’habitants, respectivement la 79ème place avec une note de 0,768, et la 132ème place avec une note de 0,633 ; pour l’Ukraine elle est à la 77me place avec une note de 0773 et la Russie à la 52ème place avec une note de 0,822. Pour les pays arabes, nous avons en tête les Emiraties à la 26ème place avec une note de 0,911, le Bahreïn et l’Arabie Saoudite qui occupent la 35ème place avec une note de 0,875, le Qatar la 43ème place avec une note de 0,855, le Koweït la 50ème place avec une note de 0,831, et le sultanat d’Oman la 54ème place avec une note de 0,816 dans la catégorie des IDH « faibles ». Qu’en est-il précisément pour l’Algérie ? Pour 2000, l’Algérie a eu une note De 0,637 et a été classée 91ème, en 2005 0,685 , 97ème, en 2010, 0,721 92ème, en 2015 0,685, en 2016, 0,743, 90ème, en 2017 0,745, 91ème , en 2018, 0,746, 91ème en 2019, 0,748 91ème. Dans le rapport 2021/2022, l’Algérie arrive au 3ème rang en Afrique derrière les Seychelles, 72ème rang mondial avec un IDH « élevé » et 2ème au niveau continental. L’Île Maurice la 63ème place au niveau mondial et la 1ère place en Afrique avec un IDH « très élevé ». a été classée à la 91ème place sur 191 pays notés avec un indice de 0, 745, dans la catégorie des IDH « élevés. Elle vient avant l’Egypte (97ème), la Tunisie (97ème), l’Afrique du Sud (109ème), le Maroc (123ème)

En résumé, en Algérie, beaucoup d’efforts dans l’éducation et la santé en termes d’investissement, mais devant reconnaître également une gestion mitigée expliquant par exemple que bon nombre de responsables ou de personnes fortunées se soignent à l’étranger et envoient également leurs enfants faire des études à l’étranger ou dépensent sans compter pour des cours particuliers.
Dans le domaine de l’éducation, nous assistons à la baisse du niveau ayant misé sur la quantité et non la qualité, tant de l’école que des universités, une inadaptation de la formation professionnelle aux nouvelles mutations, une importante déperdition du primaire au secondaire, puis du secondaire aux universités : c’est le constat en fonction de mon expérience en tant que professeur des universités de 1974 à 2021. Et c’est dans ce cadre qu’il faut prêter une attention mondiale particulière aux indices du développement humain du Pnud qui constitue une percée importante dans le domaine de l’utilisation d’indicateurs plus crédibles que le produit intérieur brut (PIB). Mais selon de nombreux experts internationaux ces indicateurs comportent des lacunes importantes dont principalement : le choix et la pondération des indicateurs retenus ; la qualité et la fiabilité des données servant à les calculer qui sont très variables d’un pays à l’autre ;l’utilisation des moyennes, sans tenir compte des inégalités tant socio professionnelles que spatiales, voilant donc la concentration du revenu national au profit d’une minorité rentière ; le niveau tant de la scolarisation que de la santé, varient considérablement selon les pays et enfin certains indicateurs sociaux sont difficilement quantifiables faussant les comparaisons d’un pays à l’autre. Aussi, l’analyse qualitative doit suppléer nécessairement à la déficience quantitative. Il est par ailleurs souhaitable , de compléter cet indice par de nouveaux indicateurs qui prennent en compte la bonne gouvernance dont notamment les indices de corruption, la participation, le genre, la jouissance des droits de l’homme, les libertés économiques et publiques, l’intégration sociale la durabilité environnementale et pour les pays du tiers monde le poids de la sphère informelle, tout cela supposant un appareil statistique performant et adapté aux situations sociales.
Dr Abderrahmane Mebtoul, professeur
des universités, expert international
(Suite et fin)