Quel modèle de formation universitaire construire ?

L’Université algérienne face à la réussite professionnelle des étudiants et la performance des entreprises

L’Algérie, est un pays en perpétuel mutation dans l’ensemble des domaines socio-économiques, où l’on enregistre des besoins sans cesse croissants. L’investissement dans le capital humain reste une valeur sûre car le savoir-faire permet à chacun de s’y adapter et d’être au service de la communauté et d’y faire face. Ces mutations ont provoqué de profonds changements et des évolutions au niveau des métiers et des professions en exigeant d’un côté l’acquisition de nouvelles compétences et qualifications et en donnant d’un autre côté de nouvelles définitions aux métiers d’aujourd’hui et de demain.
Ce contexte nous interpelle à chercher de nouvelles niches et de nouvelles approches de formation, afin de créer de nouveaux contenus, un nouvel environnement d’enseignement avec de nouveaux modes d’apprentissage.
Face à ces changements, l’originalité est de concevoir des parcours de formations professionnalisants et attractifs possédant le caractère d’excellence, en réponse aux ambitions des étudiants, particulièrement les nouveaux bacheliers, ainsi qu’aux besoins socio-économiques du pays.
Les parcours de formations professionnalisantes universitaires d’excellence (FPUE) doivent être conçus pour préparer explicitement les futurs diplômés à l’exercice durable d’un métier organisé scientifiquement et intellectuellement, soutenus par des dispositifs où s’effectue la pratique, et ayant des fondements et principes, qui donnent une reconnaissance professionnelle et un statut social valorisant.
Dans ce propos nous insistons sur le caractère professionnalisant des parcours des formations universitaires, c’est pour dire que la professionnalisation est un processus différent de professionnel et professionnalité, qui sont des concepts d’ordre applicationniste. Contrairement dans la logique de la professionnalisation, ce n’est pas la profession qui compte principalement, mais c‘est la construction de l’individu (étudiant) qui se fait selon une démarche lui permettant de développer ses capacités d’expertise. Par ailleurs l’excellence d’un parcours de formation universitaire, incarne une référence, un label, des métiers valorisants, une capacité d’innovation, une attractivité, tous soutenus par des dispositifs d‘évaluation.
A ce stade de la réflexion, une interrogation s’impose : Comment faire de la FPUE pour qu’elle soit une voie de réussite et un catalyseur d’innovation dans le domaine de l’ingénierie de la professionnalisation de la formation universitaire et convergeant ainsi avec la vision utilitaire de l’université ? La réponse à cette question consiste, pour une filière donnée de mettre en place une nouvelle dynamique de création de nouvelles formations d’excellence en s’appuyant sur :
•L’appréciation de l’évolution de la filière et de l’évaluation de ses besoins en formations,
•Les capacités et moyens de l’Université,
•La coordination avec les secteurs de l’éducation et de la formation professionnelle,
•Les compétences nationales et internationales,
•Un financement approprié,
•Les laboratoires et unités de recherche,
•Les terrains de stages (condition vitale),
•Les entreprises,
•Les associations professionnelles et/ou groupements d’intérêt.
Ces éléments font que la construction, de ces Formations Universitaires d’Excellence, repose sur un triptyque pour :
– Soutenir le développement d’une activité économique et sociale (filière) porteuse d’avenir,
– Mettre en place un réseau qui fédère les acteurs économiques de cette filière.
– Améliorer l’excellence de la formation.
Dans le cadre de cette dynamique, il convient de préciser que sur le plan de la pédagogie, le modèle d’enseignement retenu est l’approche par projet. Cette démarche qui est bien documentée et largement étudiée, et ayant fait l’objet d’innombrable expériences, fera de l’étudiant un véritable acteur de sa formation en le dotant d’une grande motivation pour réussir son projet professionnel.
De même ces parcours sont conçus en mobilisant des compétences et des institutions, et imposant implicitement un cadre de gouvernance partagée, soutenu par une instance de pilotage.
Plusieurs aspects d’ordre socio-économique (employabilité, insertion professionnelle…) et académique (missions et nouvelle vision de l’université) militent largement pour dynamiser une politique de mise en œuvre de cette nouvelle approche de construction de parcours professionnalisant d’excellence.
Ils peuvent être intégrés dans le cadre des objectifs fixés par le plan national de développement du territoire (considérés comme un atout pour un territoire ou une région).
Ils représentent une voie pour promouvoir l’excellence dans les Etablissements de l’Enseignement Supérieur (EES), et constituent un atout majeur pour renforcer la relation entre le monde académique et le monde socio-économique.
Mais aussi, ils ont vocation d’être une base d’arguments dans la conception d’une stratégie de la valorisation de la formation universitaire (diversité des voies de réussite des étudiants).
Leur contribution à favoriser la mobilité nationale et internationale des étudiants et des enseignants chercheurs est liée à leurs fondements et principes qui sont la mobilisation des compétences et la fédération des moyens et des espaces d’apprentissage.
Dans le contexte actuel lié à la massification de l’Enseignement Supérieur, d’une part et la configuration des résultats de l’examen du baccalauréat d’autre part, ces parcours professionnalisants avec le label d’excellence auront une place particulière dans l’amélioration du dispositif de gestion et d’orientation des nouveaux bacheliers et cela en réponse à la satisfaction de leurs vœux.
Dans ce sens, la réussite de ce modèle de formation, doit être accompagné d’un système d’information sur les métiers qui sont en pleine transformation, destiné aux étudiants et leurs parents ainsi qu’aux professionnels.
Donc, l’orientation vers la déclinaison de ce modèle de formations professionnalisantes universitaires d’excellence, nécessite d’entreprendre en amont un travail de réflexion, de concertation et de conception, afin d’investir et d’anticiper l’émergence de ces nouveaux parcours d’avenir.
Dans ce sens, ce travail doit se faire autour des filières qui portent l’ambition de proposer aux étudiants les meilleurs parcours de formation au sein des établissements de l’enseignement supérieur (EES). Ainsi, à titre indicatif et à titre d’exemple, on peut citer quelques filières qui pourraient faire l’objet de ce genre d’investissement.
A cet effet on peut mentionner:
– Les technologies du numérique et leurs applications (santé, commerce, éducation, art et communication, agriculture de précision, SIG et aménagement du territoire, tourisme et voyages, transport, gestion des villes…),
-Les métiers liés à la transition énergétique,
-Les métiers liés à la transition écologique et le changement climatique,
-Les métiers liés aux matériaux et industrie,
-Les métiers Industrie de l’automobile,
-Les métiers liés à l’installation la maintenance et l’entretien des équipements médicaux
-Les métiers de la santé,
-Les métiers liés à l’analyse et le diagnostic médical,
-Les métiers liés à l’industrie pharmaceutique,
-Les métiers liés à la production et conception des médicaments
-Les métiers de l’éducation,
-Les métiers liés aux compétitions sportives.
-Les métiers liés à l’exploitation des bioressources et ressources naturelles,
-Les métiers liés au tourisme et la valorisation des territoires,
-Les métiers liés à la valorisation de l’histoire et la culture,
-Les métiers liés au management des entreprises,
-Les métiers liés à l’organisation et la gestion des collectivités locales,
-Le droit et sciences politiques (conseiller juridique d’entreprise, médiation, administration d’élections…),
-Les métiers liés au commerce international (l’Algérie préconise de développer davantage les échanges commerciaux hors hydrocarbure)…
Former aux métiers de demain devient un enjeu stratégique pour préparer l’Université algérienne à l’horizon de 2030. Une Université qui ambitionne l’excellence, au service de la réussite des étudiants et de la performance des entreprises, par la proposition de modèles dynamiques de parcours de formations originels et adaptés qui mettent en synergie tous les acteurs académiques et économiques.
Enfin, il faut préciser une chose, c’est que le monde change de façon inimaginable et que l’Université progresse bien sûr sans se délester de sa mission critique, et que les modèles de formations universitaires sont bousculés et questionnés pour évoluer selon les contextes.
Tout cela nécessite d’amplifier la réactivité des EES vis-à-vis des enjeux de la mondialisation de l’économie des savoirs, devenue une évidence pour accompagner les mutations que connaît notre société et faire à ce que la recherche génère l’innovation et la formation génère l’employabilité.
Par le Pr. Abdelhamid Djekoun
Université Fréres Mentouri – Constantine