La dynamisation de la société civile pour une participation citoyenne et la lutte contre la corruption, passe par l’intégration de la sphère informelle

Fondement du développement et de la sécurité nationale

Il y a lieu de différencier la sphère informelle productive qui crée de la valeur de la sphère marchande spéculative qui réalise un transfert de valeur. Dans la plupart des pays, ce sont des notables qui établissent des actes non reconnus, certes, par l’Etat mais qui ont valeur de transaction. On peut émettre l’hypothèse que c’est l’Etat qui est en retard par rapport à la société qui enfante des règles qui lui permettent de fonctionner car reposant sur la confiance sans laquelle aucun développement n’est possible.

La question qui se pose : combien de gens dans le Tiers- monde ont des actifs et des documents ? Cela peut concerner différents éléments : lieu d’habitation, (combiens en Algérie possèdent le livrer foncier et des titres propriété qui permettrait à l’Etat de percevoir des redevances), fonds de commerce, depuis le vendeur de cigarettes au porteur de valises, aux activités productives, aux non-déclarations diverses de différentes d’activités de services, marchandes ou productives. Que l’on visite en Algérie toutes les wilayas, faisons un inventaire de ces actifs et rapportons cette valeur à celle que donnent les statistiques officielles, et nous aurons mesuré l’importance de cette sphère qui agit en dehors du Droit et que le produit national ne décode pas. Cela a des incidences sur la structuration spatiale des villes qui se créent partout et dans tous les lieux. La question qu’il y a lieu de se poser est la suivante : s’il y a des actifs intellectuels, physiques en Algérie, combien de ceux-là ont un titre reconnu par l’Etat ? Cette situation est le reflet de la structuration sociale complexe où cette sphère dite « illégale » n’est pas relativement autonome vis-à-vis des sphères bureaucratiques locales : par exemple, combien de temps ça prend si vous voulez acheter les droits, c’est-à-dire la délivrance des titres de propriété. L’ensemble des démarches (longs circuits) pour avoir un titre légal peut prendre dans certains pays 17 ans. Il y a lieu, également, de mesurer le temps pris en moyenne pour marchander avec la bureaucratie (corruption). Selon l’enquête de l’auteur, un égyptien passe approximativement entre 3 et 6 années de sa vie dans ce marchandage, mais cela n’est pas propre à l’Egypte. Je tire trois conclusions des analyses précédentes qui s’appliquent tant à l’Algérie que la majorité des pays du tiers monde.
Premièrement, l’enseignement universel que l’on peut retirer afin d’avoir une politique socio -économique cohérente indissociable de la nature du pouvoir politique, c’est la nécessité d’une symbiose entre le concret abstrait (la formalisation) et le réel, c’est-à-dire la représentation. Lorsque le droit ne fonctionne pas, il y a risque d’autoritarisme et d’abus qui pénalisent surtout les couches les plus défavorisées.
Le droit de la propriété est essentiel et l’intégration de la sphère informelle est cruciale si on veut créer une économie de marché créatrice de richesses loin des logiques rentières spéculatives. Cette sphère acquise aux transformations sociales et à l’idée d’économie de marché, recèle un dynamisme qui est une chance pour les pays du Tiers- monde car comme rappelé précédemment, où est la crédibilité d’un Etat qui ne contrôle que 20 à 50% des activités économiques et sue surcroît avec un fort taux d’abstention lors des élections ? Deuxièmement, dans l’économie de marché productive à finalité sociale, le rôle de l’Etat régulateur est important car garant de la cohésion sociale, grâce à une planification stratégique, conciliant les coûts sociaux et les coûts privés, afin d ‘éviter les effets pervers du tout marché, mais l’Etat n’étant fort que par sa moralité, c’est-à-dire respectant le Droit.Troisièmement, il faut éviter de plaquer des schémas sociaux des pays occidentaux, devant tenir compte des anthropologies culturelles , où le développement engendre de nouvelles forces sociales, dont les couches moyennes, avec de nouvelles exigences donc plus de liberté et de participation à la gestion de la cité.
En conclusion, les réformes dont la base philosophique est la liberté d’entreprendre, loin de toutes entraves bureaucratiques sont des éléments fondamentaux pour le développement au sein d’une économie de plus en plus globalisée à la recherche d’ailleurs de nouvelles formes de régulation dans un monde multipolaire (Re-mondialisation), devant assister horizon 2025/2030 à de profonds bouleversements géostratégiques et à l’émergence de nouveaux acteurs économiques qui modifieront les rapports de force au niveau mondial. L’Algérie du XXIe siècle, doit avoir pour fondement l’homme pensant et créateur, le travail, l’intelligence, la pluralité dans sa diversité, la tolérance et le combat contre toute forme de racisme. Le développement durable doit reposer sur un Etat de droit, devant intégrer la sphère informelle qui implique le réaménagement des structures des partis et de la société civile. L’impact au niveau de la société d’un parti ou une association dite société civile, en déclin dans la majorité des pays au niveau mondial, et pas seulement en Algérie avec la révolution dans le système des télécommunications, existant d’autres codifications surtout pour une jeunesse parabolée, est fonction du nombre et de la cotisation de ses adhérents, car dépendre à 90/100% du budget de l’Etat démontre leur déconnexion vis-à-vis de la société.
Dans ce contexte, l’Association nationale de développement de l’économie de marché ADEM (agrément ministère intérieur 63/92) que j’ai eu l’honneur de présider de 1992 à 2015, a toujours activé grâce à la cotisation de ses adhérents n’ayant jamais bénéficié d’un seul centime de l’Etat tant au niveau central qu’au niveau local programme disponible élaboré en 1992 en langue nationale, anglaise et française. Car pour le cas Algérie, combien d’adhérents cotisent au niveau des partis et des associations ? Au moment où le monde connaît des bouleversements politiques, sociaux et économiques, et où l’Algérie est interpellée pour de véritables réformes, face aux nouveaux défis mondiaux, l’on doit rendre un grand hommage, à l’ANP et nos forces de sécurité, la seule force organisée qui garantit la sécurité nationale. Mais l’on doit être conscient qu’existe un lien dialectique entre sécurité et le développement de la responsabilité de tout gouvernement.

Professeur des universités, expert
international Dr Abderrahmane Mebtoul
(Suite et fin)