Le pays dans la crise politique

Royaume-Uni

Entre erreurs politiques, «arrogance» et mauvaise lecture de la situation économique, la cheffe de gouvernement conservatrice n’aura tenu que 45 jours à son poste.La Première ministre britannique Liz Truss a annoncé sa démission, jeudi 20 octobre, après des semaines de calvaire pendant lesquelles elle a fait face à une avalanche de critiques depuis son entrée au 10, Downing Street, le 6 septembre. En cause, son premier budget, qui a fait tanguer son début de mandat, en prévoyant des baisses d’impôts pour les plus riches et des nouvelles dépenses partiellement financées pour lutter contre la crise énergétique. Sous la pression des marchés financiers et des élus conservateurs, elle avait dû abandonner la majeure partie de son plan et limoger son ministre des Finances, Kwasi Kwarteng. Un revers qui a précipité sa chute. Comment Liz Truss et le Royaume-Uni en sont-ils arrivés là aussi vite ?
La livre fait un plongeon historique et les taux d’emprunts de la dette s’envolent, propulsant le pays dans une grave crise économique. «On peut dire qu’elle a fait n’importe quoi, sans prendre en compte le contexte économique», tranche Clémence Fourton. Les condamnations médiatiques et politiques pleuvent.
Erreur politique ou incompétence ? «Je crois qu’il y a eu un niveau d’arrogance et d’aveuglement tellement fort qu’elle a pensé qu’elle pouvait mettre en place ses mesures politiques sans conséquences», analyse Rainbow Murray. «Cette crise économique, complètement auto-infligée, est aussi liée au fait qu’elle a refusé d’écouter les conseils des institutions, comme le Bureau pour la responsabilité budgétaire, qui jugeaient ses propositions dangereuses», ajoute Will Jennings, professeur associé en sciences politiques à l’université de Southampton. Après trois semaines de calvaire, la Première ministre limoge son ministre des Finances, Kwasi Kwarteng, le 14 octobre, espérant calmer les conservateurs et les milieux financiers. Rien n’y fait. La presse britannique est en ébullition et les rumeurs de démission vont bon train. Liz Truss est forcée d’agir. C’est chose faite, lundi 17 octobre, par la voix de Jeremy Hunt, tout juste désigné ministre des Finances. Lors d’une conférence de presse, ce dernier annonce l’abandon de presque toutes les mesures du «mini-budget», l’instauration de nouvelles taxes à hauteur de 38 milliards de livres, et la promesse de nouvelles coupes budgétaires. L’effet est immédiat. Les marchés sont rassurés et la livre repart immédiatement à la hausse. Si la tempête financière se calme, la pression ne retombe pas. Le soir même, la Première ministre décide de répondre aux questions de la BBC. Elle explique «être désolée» et «vouloir mener les conservateurs lors des prochaines élections» du pays. Une promesse qu’elle ne pourra pas honorer : trois jours plus tard, elle annonce sa démission lors d’une conférence de presse.
Qui remplacera Liz Truss ? Les conservateurs voteront la semaine prochaine pour en décider. Ils doivent faire vite pour éviter des élections anticipées qui seraient désastreuses pour le parti, si l’on en croit les derniers sondages*, qui donnent une large avance aux Travaillistes.
Au-delà du cas de la Première ministre, la crise en dit long sur l’état actuel de l’économie au Royaume-Uni.