«Avava Inouva» polarise le 1er jour des travaux

Colloque national sur l’œuvre d’Idir à Béjaïa

La chanson «Avava Inouva» a polarisé mardi l’ouverture à Béjaïa du colloque national «Idir : au-delà de la voix, une œuvre d’art», organisé par le Centre national de recherche en langue et culture amazighe, sur l’œuvre musicale et poétique du chanteur Idir, décédé en mai 2020.Les intervenants qui ont abordé le parcours artistique, poétique et musical du défunt Idir, et aussi certains de ses «combats», notamment celui pour les droits de la femme, ont été unanimes à dire que son héritage culturel, anthropologique et sociétal inégalé font de lui un «artiste universel hors norme» et ont tous choisi «Avava Inouva» pour en faire la démonstration.
«Avava Inouva», ont souligné des intervenants, est une chanson mythique et une légende antique kabyle, qui regroupe en son sein une foule d’arguments qui la rendent si unique, qu’il s’agisse de la profondeur du poème, de la pertinence et de la justesse des mots employés, de la singularité de ses sonorités et de son style, qui évoquent l’authenticité et la modernité, mariées dans une heureuse et naturelle harmonie.
«Avava Inouva a été un tube planétaire. Elle a ouvert la culture et la musique kabyle sur le monde et le monde s’est ouvert sur elle», a souligné Tassaadit Yahyaoui de l’université de Tizi-Ouzou, qui n’a pas manqué de noter la culture «profonde» d’Idir qui, dira-t-elle, «a été nourri à la mamelle de Mouloud Maameri et son exigence identitaire».
La séance inaugurale du colloque a été riche en débats et en témoignages, notamment sur l’itinéraire de la création d’Avava-Inouva, sa mise en parole et en musique, et qui, ironie de l’histoire, devait être chantée par l’autre icone nationale Djamel Allam, l’auteur de «Mara ad yughal» (quand il reviendra), qui en avait décliné l’offre faite par Idir lui-même, car «convaincu que personne ne la chantera mieux que toi».
Et le temps a fini par lui donner raison, non seulement en terme de succès intrinsèque de la chanson mais parce que celle-ci a fini par sortir définitivement la chanson kabyle de ses ornières et des espaces qui lui étaient réservés notamment en France, où elle n’avait droit de cité que dans les cafés et les petits cabarets.
Depuis, en effet, elle est passée sur toutes les radios et les chaines de télévision, a relevé, pour sa part, le chanteur Belaid Thagrawla, qui, dans un témoignage poignant, a mis en exergue une autre chanson phare de Idir, qui «n’a, certes, pas connu le retentissement d’Avava Inouva, mais qui a bercé toutes les chaumières kabyle. Il s’agit de «Arsed a yidhass» (tombe ô sommeil), une berceuse pour les grands et les petits», a-t-il dit. Dans son témoignage, le chanteur Boudjemaa Agraw a pris le temps de restituer les moments de partage et de collaboration, en Algérie comme en France, avec Idir et le travail fait par ses soins pour mettre en scelle les nouveaux talents.
L’écrivain Rachid Oulebsir, qui a côtoyé Idir depuis leur passage au lycée Emir Abdelkader à Alger, a donné une magnifique version de l’itinéraire de l’auteur de «Avava Inouva», un itinéraire qui s’est terminé du reste en 2018 à Aokas (Béjaia) où les deux personnages ont pris part à un gala de solidarité en faveur des populations locales.
Le colloque est programmé pour trois jours. Des chercheurs émérites sont annoncés pour décrypter l’ouvre et le parcours d’Idir ainsi que leurs impacts multidimensionnels sur la musique, la chanson, l’anthropologie, la poésie ou sur les thèmes qui en dépendent.
R.C.