La difficile mission accomplie par les 53.000 agents de recensement de l’ONS

Des logements fermés, des locataires qui travaillent et des tablettes vétustes

Ils étaient comme des milliers de fourmis qui sillonnaient dans toutes les directions, armés d’un haut sens de responsabilité et d’une grande volonté d’accomplir leur mission avec succès, malgré les multiples difficultés rencontrées sur un terrain « miné ». Les 53.000 agents de recensement mobilisés récemment par l’Office national des statistiques (ONS), dans le cadre d’une vaste opération du recensement général de la population et de l’habitat (RGPH) pour l’année 2022, la sixième dans l’histoire du pays, ont accomplit avec bravoure et professionnalisme leur mission, mais à quel prix ?

Du 25 septembre au 16 octobre 2022, l’Algérie a abrité son sixième recensement général de la population et de l’habitat (GRPH) lancée par le ministère de la Numérisation et des Statistiques et ce, sur décision du président de la République, Abdelmadjid Tebboune. L’objectif pour l’Etat est de déterminer, avec une plus grande précision, le nombre exact des citoyens vivant au pays et celui de l’habitat également. Une précision juste du nombre de la population et de l’habitat qui va servir à déterminer, avec exactitude, la politique interne pour les années à venir.
Un recensement général à travers lequel l’Office national des statistiques (ONS), tributaire de cette grande mission, a mobilisé de grands moyens et plus de 53.000 agents de recensement pour couvrir l’ensemble du territoire national.
Sur le terrain, et dès le premier jour du recensement, soit le 25 septembre dernier, la grande mobilisation à laquelle les dizaines de milliers d’agents de l’ONS ont participé, a connu de multiples difficultés. Tout d’abord, le casse-tête chinois des logements fermés.
En effet, dès les premiers jours de la grande opération de recensement, les agents de l’ONS ont fait face à la grande problématique des logements fermés ; il s’agit des dizaines de milliers de cas, selon quelques agents de recensement rencontrés lors de cette période. C’est le cas d’Amina, une jeune femme trentenaire travaillant comme agent de recensement à l’Office national des statistiques.
Rencontrée dans le cadre d’un reportage réalisé sur le déroulement de la sixième opération de recensement général de la population et de l’habitat, l’agent de recensement a rencontré de grands obstacles au cours de sa mission. Couvrant les communes de l’Ouest d’Alger, Chéraga et Ouled Fayet, la jeune Amina a couvert une moyenne de 200 familles par jour. Une grosse performance provenant d’une volonté de fer. Amina, cet agent de recensement de l’ONS a été tributaire d’une mission de dénombrement de la population et de l’habitat des sites AADL d’Ouled Fayet 3. Ici, et dès les premiers jours du périple mission, Amina a été frappée par le nombre considérable des logements inhabités.
« Dans un immeuble abritant une vingtaine de logements, seuls huit sont habités et le reste, soit douze au total, sont fermés, vides. J’étais en face à une situation inattendue et presqu’impossible à réaliser et j’étais contrainte de faire des allez et retour plusieurs fois pour tenter de toucher les familles qui n’ont pas été encore recensées pour des raisons qui m’échappent. J’étais contrainte, également, de faire appel au bureau local du site AADL Ouled Fayet 3 pour pouvoir recenser les familles, dont leurs logements sont inhabités. Fort heureusement, la contribution de ces derniers m’a été salutaire », nous a relaté l’agent de recensement de l’ONS, la jeune Amina.

Le grand casse-tête des couples qui travaillent
Les peines rencontrées par les 53.000 agents du recensement de l’ONS lors du dernier recensement général, ne se limitaient pas uniquement sur les logements fermés, bien plus que ça, elles ont aussi concernés les jeunes propriétaires, les nouveaux mariés, voire les jeunes couples dont les deux partenaires travaillent. Absents pendant toute la journée, chose qui rend la mission des agents de l’ONS encore plus difficile et rude, de nombreux jeunes couples, voire les nouvelles familles, risquaient le ratage de leurs recensements.
« Il s’agit d’une autre difficulté pour nous les agents de recensement. On a vraiment trop soufferts pour arriver à recenser l’ensemble des jeunes familles. J’étais contrainte de passer toute une journée dans un site pour attendre le retour des jeunes couples, parfois jusqu’à 18 heures, soit le début de la soirée », raconte encore la jeune Amina de l’ONS.
Souvent, de jeunes couples locataires, l’homme comme son épouse travaillent jusqu’à des heures tardives de la journée, voire certains jusqu’à la tombée de la nuit, ces derniers ont-ils été recensés ?
« Finalement oui, puisque j’étais contrainte de repasser pendant les week-ends, et c’est là que j’ai pu les recenser, sinon pour les autres jours c’était impossible », a rassuré l’agent de recensement, Amina.
Cette dernière, qui en est à sa première expérience avec le recensement général, a fait preuve d’une grande détermination, d’un vrai combat de terrain et d’un haut sens de responsabilité, au cours de sa longue et fatidique mission de recensement. « C’était vraiment une pénible mission, fort heureusement que j’ai fini par la réaliser et je suis très fière et contente de mon travail », dira l’agent Amina avec un grand soulagement et dans un sentiment de joie mijoté par une fierté.

Des tablettes vétustes, l’autre embarras
Avant le lancement de l’opération du Recensement général de la population et de l’habitat, le ministère de la Numérisation et des Statistiques avait annoncé la mobilisation de grands moyens, ainsi que ceux liés aux technologies modernes pour assurer des conditions excellentes et un bon déroulement de l’opération du recensement général 2022.
Effectivement et après cette bonne nouvelle, et à quelques heures seulement du début de la grande opération couvrant la totalité du territoire national, les 53.000 agents de recensement ont été équipés de tablettes numériques. Ces appareils technologiques mobilisés pour l’opération permettent de rendre plus facile et rapide le travail des agents de recensement, tout en assurant une excellente banque de données numérique de la population et de l’habitat.
Cependant, et dès les premiers jours du lancement de la grande opération du recensement, de nombreux agents de l’ONS ont rencontré de grandes peines pour faire fonctionner les tablettes numériques, car certaines sont vétustes. « Dès que j’ai allumé la tablette numérique, j’ai attendu plusieurs minutes pour pouvoir enfin l’utiliser. Ça c’est le premier souci, le second c’est la disparition totale de l’écran et le troisième souci c’est la batterie, trop faible pour tenir des heures », nous a affirmé un agent de recensement de l’ONS. Ce dernier, également engagé dans la partie Ouest d’Alger, a souvent recourut à la méthode classique en attendant une solution durable pour sa tablette numérique. Le travail manuel a été salutaire. « J’ai rarement utilisé la tablette numérique, j’ai laissé ça pour plus tard, plus précisément durant les nuits, et j’étais concentré et occupé à remplir, avec mon stylo et sur des questionnaires, les réponses des familles que j’ai recensé.
Savoir le nombre exact des membres d’une famille, s’ils possèdent ou pas une voiture, leurs âges, leurs fonctions, leurs situations de travail, c’était un panel de questions bien précis », nous a relaté B. Mourad, un agent de recensement de l’ONS. Un effort de trop pour les 53.000 agents de recensement, ces soldats de l’ONS ont fait preuve d’un moral solide, de véritables guerriers sur le terrain. Un vibrant hommage aux 53.000 agents de l’ONS.

Le prolongement de l’opération, c’était prévisible
Après quinze jours passés depuis le lancement de la sixième opération du recensement général de la population et de l’habitat, le ministère de la Numérisation et des Statistiques a été contraint d’allonger les délais prévus en ajoutant une semaine de plus à cet important événement national. Un prolongement de la mission qui explique les difficultés rencontrées sur le terrain par les 53.000 agents de l’ONS. Des difficultés que nous venons d’expliquer à travers ce petit reportage. Les logements fermés et inoccupés ont été un véritable poison rencontré par les agents de recensement au cours de leur pénible tâche, poussant de nombreux agents recenseurs d’effectuer plusieurs allez-retour et ce, avec un haut sens de responsabilité et de professionnalisme.
Les 53.000 agents de recensement ont réalisé un excellent travail, malgré les nombreuses difficultés rencontrées sur un terrain « miné ». En attendant le bilan global de cette grande opération du recensement, et en attendant de savoir le nombre juste de la population algérienne et celle de l’habitat en Algérie, le temps à présent est de rendre un vibrant hommage aux agents de recensement de l’ONS, après un tel combat. Vingt-deux jours de grande mobilisation et détermination.
Sofiane Abi