Plafonnement du pétrole russe : Un effet limité attendu !

L’Opep+ et les Brics, des coalitions d’une autre dimension

Le ministre de l’Energie, Mohamed Arkab a démenti à son tour, mercredi dernier, l’information publiée par le journal américain «Wall street journal», sur d’éventuelles négociations entre les pays membres de l’Organisation des pays producteurs de pétrole (Opep) sur l’augmentation de leur production de 500.000 bj. Cette information est « insensée et erronée », a aussi déclaré l’Arabie saoudite, un poids lourds de la production mondiale de l’or noir. Ce démenti a laissé place à de nombreuses spéculations concernant le maintien inchangé du quotas de production des pays membres de l’Opep+, chapeauté par l’Arabie saoudite et la Russie qui met en garde depuis plusieurs semaines les Occidentaux sur le plafonnement des prix du pétrole et du gaz russes, dont l’impact pourrait « être limité » sur le marché, mais aggraverait davantage la crise énergétique sur le continent européen, sous haute tension depuis des mois.
L’Occident refuse de reconnaître l’échec de sa politique des sanctions anti-russe qui ont abouti à un effet inverse dans le sens de l’objectif attendu et l’intérêt défendu.
Certes, l’économie russe est durement touchée, mais semble avoir bien encaissé le coup. La détermination de la Fédération de Russie de bouleverser le modèle économique unipolaire et faveur d’un monde multipolaire à encourager certains pays, lésées par les politiques occidentales de se rapprocher de ce pays.
Prêts même à importer le pétrole et le gaz russes pour soutenir leur économie et surtout esquiver la crise énergétique qui s’aggrave chaque jour un peu plus. Le plafonnement du prix du pétrole russe est peu restrictif et ne produira pas l’impact souhaité sur l’économie russe qui, à l’instar des autres pays producteurs d’hydrocarbures a enregistré des superprofits dans le secteur de l’énergie. De quoi financer encore sa guerre, selon les experts qui redoutent, par ailleurs, l’effet boomerang de cette décision sur les pays industrialisés qui peinent à subvenir aux besoins de leurs ménages et entreprises en matière d’énergie.
C’est l’opportunité recherchée par les autres pays producteurs d’énergie, à l’image de l’Algérie qui a revu les prix de vente de gaz à ses clients européens et envisage, en parallèle, de relancer l’interconnexion électrique euro-méditerranéenne pour exporter de l’électricité vers l’Europe. Les revenus d’hydrocarbures du pays dépasseront 50 milliards de dollars à la fin 2022 et s’engage à investir davantage dans le secteur de l’énergie et du renouvelable afin de diversifier ses ressources de financements et de production. L’Algérie vient juste de déposer sa demande officielle pour adhérer le groupe des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine et l’Afrique du Sud), et se relever au rang des pays émergents, en voie de changer l’ordre économique mondial.
Le monde vient de prendre un virage important et c’est à toutes les nations du monde occidental ou non-occidental de s’adapter à leur propre sort.
La Russie et la Chine mettent depuis des mois en garde ceux qui refusent d’en prendre conscience de ce nouveau changement historique. Le tableau est très nuancé et même différent selon les Etats-Unis qui tentent de diaboliser tout ce qui est russe, allant jusqu’à menacer leurs alliés.
Comme c’était le cas dernièrement avec l’Arabie saoudite qui subissait la pression américaine suite à la décision commune de l’Opep+ de baisser leur production de deux millions bj.
Après l’échec de la tentative d’intimidation du royaume wahhabite qui a bénéficié du soutien des pays membres de l’Opep+, les Occidentaux décident de plafonner le pétrole russe, dès le mois prochain. L’annonce devrait se faire au lendemain de la tenue de la réunion des pays membres de l’Opep+, prévue le 4 décembre prochain, dans deux semaines. Il faut, par ailleurs, s’attendre à des représailles pour propulser les prix au-delà du plafond, ceci pourrait surtout aider ses partenaires à maximiser leurs exportations et à atteindre leurs quotas de production. Des circuits alternatifs existent pour vendre du pétrole russe. La Turquie qui veut jouer un rôle mondial important actuellement pourrait devenir la nouvelle plaque tournante énergétique. Ankara, aussi membre de l’Otan envisage de rejoindre les Brics, ce qui n’est pas anodin. La Russie a récemment consolidé ses liens de coopération avec l’Algérie, l’Iran, la Chine et l’Inde. La liste est très longue.
Moscou et Pékin se repositionnent au Moyen-Orient et en Asie. Des importateurs potentiels du pétrole russe et devraient bénéficier du plafonnement prévu du prix du baril de pétrole russe (65 et 70 dollars). Rien n’est encore officiel, mis à part que l’Occident fait face à un changement de fonds de son modèle économique, menacé par un risque plutôt géo-économique.
D’ici là, de nouvelles coalitions se forment. L’Opep+ et les Brics sont en passe de développer leur portefeuille de devises pour financer leurs projets communs. Les industriels et investisseurs sont dans l’incertitude totale, notamment, à l’approche de la publication de leur bilan et le début d’une nouvelle année 2023.
Samira Takharboucht