Quel impact, la rencontre USA /Afrique du 13 au 15 décembre 2022 ?

Face aux tensions géostratégiques

Il faut situer la rencontre entre les USA et l’Afrique qui se tiendra du 13 au 15 décembre 2022, à Washington , dans le nouveau contexte géostratégique mondial 2023/2030, avec des tensions à plusieurs niveaux interdépendants à la fois militaires politiques et sociaux économiques ne devant pas oublier un facteur déterminant du XXIème siècle le facteur culturel qui influe à terme sur les échanges économiques.Cette rencontre fait suite à celle de la Chine/ monde arabe, en Arabie Saoudite début décembre 2022. Elle a lieu au moment de fortes tensions géostratégiques dans le monde, préfigurant une nouvelle reconfiguration mondiale à la fois économiques ( transition numérique et énergétique) et militaires( cyber attaques, drones de plus en plus sophistiqués, déclassant les armes classiques). Nous avons les tensions en Ukraine, Russie /Occident, où le monde ne sera plus jamais comme avant, la Russie et l’Ukraine représentant 33% les exportations moniales de denrées alimentaires, qui a des incidences sur l’Afrique, la majorité des pays africains ayant opté pour la neutralité dans ce conflit, des tensions en Asie USA/Chine concernant Taiwan, au Moyen- Orient le conflit israélo-palestinien, l’instabilité au Yémen sans oublier l’Iran, les remous dans bon nombres de pays africains et bien d’autres conflits au niveau du globe. Cette rencontre se tient au moment de la crise énergétique actuelle, dont les USA sont un des plus grand producteur et exportateur mondial de pétrole avec la Russie et l’Arabie Saoudite, plus de 10 millions de barils/j ayant pénétré récemment le marché européen, (pétrole et gaz de schiste), de la décision récente du G7 plus l’Australie de plafonner le prix du pétrole russe par voie maritime à 60 dollars, et en février 2023 concernant les produits pétroliers, n’ayant de chance de succès que si ce plafond se rapproche de celui du marché. Problème beaucoup plus complexe, le projet proposé par l’Union européenne pour 2023 de plafonner également le prix de cession du gaz, sans mentionner si ce sont les canalisations ou le GNL, (quelle position adopteront les USA), ce qui pénaliserait les exportations US ainsi que les pays explorateurs par canalisation, puisque pour le GNL, la destination est plus flexible, ce qui aura des répercussions sur toute la chaîne énergétique. Comme conséquence de toutes ces tensions nous devrions assister pour 2023 selon le FMI et la Banque mondiale, à moins d’une baisse de toutes ces tensions, un recul de la croissance de l’économie mondiale notamment des deux poids lourds, la Chine et les USA avec une stagflation, combinaison d’une croissance faible et d’ une inflation élevée avec des tensions sur le marché de l’emploi d’où des remous sociaux que les Etats essaient de calmer par le recours l’endettement public, certains pays dépassant les 100% du PIB, mais pénalisant les générations futures qui supporteront cet endettement. Cette rencontre se tient après celle sur le réchauffement climatique, en Egypte qui risque d’avoir un impact important sur l’Afrique, responsable seulement de 3,8 % des émissions totales de gaz à effet de serre dans le monde ; et sur biodiversité au Canada posant un véritable problème pour la sécurité des Nations, une pénurie d’eau et par voie de conséquence une crise alimentaire devant repenser toute notre système de production et de consommation.
Cette rencontre en préconisant l’adhésion de l’Afrique au G20, aisi que dans d’autres institutions internationales, rentre dans la stratégie de contrecarrer la stratégie de la route de la soie initiée par la Chine ainsi et que celle des BRICS dont la Chine entend être le leader, voulant attirer certains pays africains et récemment lors de la rencontre en Arabie Saoudite non nombre de pays arabes, le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi, ayant récemment annoncé l’idée des « BRICS Plus », un cadre qui résume cette intention d’ouvrir l’organisation à de nouveaux membres. Actuellement les BRICS avec la dominance de la Chine représentent en 2022, environ 25% du PIB mondial et plus de 45% de la population mondiale, sur 8 milliards dont des pays qui possèdent l’arme nucléaire la Russie, la Chine, l’Inde et le Pakistan. Si cette évolution se confirme avec l’entrée de bon nombre d’autres pays, cela devrait modifier fondamentalement les relations internationales, nous orientant vers un monde multipolaire. Mais il faut être réaliste, l’Europe y compris la grande Bretagne dont le PIB est de 3300 milliards de dollars, plus les USA totalisent en 2021, pour moins d’un milliard d’habitants plus de 40% de la richesse mondiale.
Qu’en est-il précisément des objectifs de la rencontre USA/Afrique ? Sur le plan économique, le classement des pays par PIB, le top 10 des pays les plus riches au monde en 2022 à la première position du classement nous retrouvons les États-Unis dont le PIB s’élève à 24 796 milliards de dollars pour une population de 332 millions en 2022 et la Chine 19 911,59 milliards de dollars mais pur 1,41 milliard d’habitants, où Europe et USA pour moins d’un milliard d’habitants accaparent plus de 40% du PIB mondial.
Suite au premier sommet Etats- Unis Afrique qui s’était tenu en 2014, une initiative de l’ancien président, Barack Obama, le sommet qui se tient sur trois jours à partir du 13 au 15 décembre 2022 à Washington, presque tous les dirigeants des pays membres de l’Union africaine ayant été conviés, à l’exception des présidents de transition guinéen, malien, burkinabè et soudanais.
Selon un communiqué la Maison-Blanche, l’objectif de cette rencontre repose sur l’idée d’une intégration de l’Union africaine au G20, afin de contrecarrer l’influence de la Chine et de la Russie qui réalise d’importantes avancées diplomatiques en Afrique, Washington étant en perte de vitesse depuis plusieurs années notamment face au géant chinois. Animant une conférence de presse digitale avec Judd Devermont, le Directeur principal du Conseil national de sécurité pour les affaires africaines la secrétaire d’État adjointe du Bureau des affaires africaines du Département d’État des États-Unis, Molly Phee, a affirmé qu’en organisant le sommet des dirigeants USA-Afrique, l’objectif des USA est de « reconfigurer » les relations entre les deux continents. Lors de cette rencontre seront évoqués des points de coopération sur plusieurs sujets, notamment ceux concernant la sécurité alimentaire en plein conflit russo-ukrainien, et le changement climatique, des investissements dans les énergies renouvelables, l’agriculture, l’industrie, dans la santé, les nouvelles technologies , le commerce et dans bien d ‘autres segments tout en insistant sur la dynamisation du secteur privé, de la société civile africaine dans toute sa composante ainsi que l’instauration d’un Etat de droit.
Selon les responsables US « ce sommet démontre l’engagement durable des Etats-Unis envers l’Afrique, et souligne l’importance des relations entre les Etats-Unis et l’Afrique et d’une coopération accrue sur des priorités mondiales communes ». Qu’en est-il de la réalité économique ? Au cours du forum des affaires Etats-Unis – Afrique du sommet, les chefs d’État africains et les chefs d’entreprise et de gouvernement américains et africains discuteront des moyens de faire progresser les partenariats mutuellement bénéfiques pour créer des emplois et stimuler une croissance inclusive et durable? Des sessions à l’instar de : Diaspora et jeunes leaders africains, Santé mondiale et sécurité alimentaire, Changement climatique et énergie, Investissement dans les infrastructures, en plus du Forum des affaires Etats-Unis Afrique, sont inscrites à l’agenda de la rencontre.
Or, les échanges commerciaux entre les Etats Unis et l’Afrique sont passés de 142 milliards de dollars US en 2008 à 64 milliards en 2021. Comme le reconnaisse les responsables US eux-mêmes, le cadre de la guerre d’influence qui se joue entre les deux plus importantes économies de la planète, la Chine a largement distancé les Etats-Unis en Afrique sur le terrain économique où les échanges commerciaux entre le continent et les USA durant ces dernières années n’ont cessé de se réduire comme peau de chagrin.
Abderrahmane Mebtoul Pr des universités, docteur d’Etat en sciences économiques
(A suivre…)