L’évolution de l’indice de développement humain (IDH) du PNUD et celui de l’Indice de Transparency International sur la corruption

Deux rapports internationaux à méditer

Après des rapports relativement positifs pour 2023, insistant sur le fait que cela est dû essentiellement à une conjoncture favorable du prix élevé des hydrocarbures en raison des tensions géostratégiques, sur le plan macro financiers et des indicateurs modérés sur le plan macro social, de la Banque mondiale et du FMI (voir nos contribution nationales et internationales www.google.com 10 janvier 2023 , le rapport de la Banque mondiale sur l’économie algérienne, des perspectives positives pour 2023) mais dont le développement durable implique de profondes réformes structurelles, tout en prenant avec précautions pour certaines conclusions devant tenir compte de l’échantillon des enquêtés et des hypothèses de calcul, nous avons deux rapports internationaux sur l’Algérie.

Le premier publié le 08 septembre 2022 sur l’Indice du développement humain, par le Programme des Nations unies pour le Développement (Pnud), rapport intitulé «temps incertains, vies bouleversées : façonner notre avenir dans un monde en mutation » tire la sonnette d’alarme sur les effets négatifs de l’épidémie du coronavirus, les tensions géostratégiques et de la crise mondiale l’accentuation des inégalités sociales dans le monde et le second sur l’Indice de perception de la corruption (IPC) 2021 qui a été publié le 25 janvier 2022 par Transparency International qui montre, cela n’étant pas propre à l’Algérie, que les niveaux de corruption restent au point mort dans le monde, 86 % des pays n’ayant que peu progressé, voire aucunement, au cours des dix dernières années.

1.-L’évolution de l’indice de développement humain (IDH) du PNUD pour l’Algérie de 2000/2022 : une position honorable
L’indice de développement humain ou IDH a été développé en 1990 par l’économiste pakistanais Mahbub ul Haq et l’économiste indien, prix Nobel d’économie Amartya Sen, étant un indice composite, compris entre 0 (exécrable) et 1 (excellent), calculé par la moyenne de trois indices. Le premier aspect ( A) quantifie la santé/longévité (mesurées par l’espérance de vie à la naissance), qui permet de mesurer indirectement la satisfaction des besoins matériels essentiels tels que l’accès à une alimentation saine, à l’eau potable, à un logement décent, à une bonne hygiène et aux soins médicaux adopté par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) en 1990. Il est plus fiable que l’indicateur précédent utilisé, le PIB par habitant, qui ne donne pas d’information sur le bien-être individuel ou collectif quantifiant que la production économique.
Le deuxième aspect (B) est le savoir ou niveau d’éducation mesuré par le taux d’alphabétisation des adultes (pourcentage des 15 ans et plus sachant écrire et comprendre aisément un texte court et simple traitant de la vie quotidienne) et le taux brut de scolarisation (mesure combinée des taux pour le primaire, le secondaire et le supérieur). Il traduit la satisfaction des besoins immatériels tels que la capacité à participer aux prises de décision sur le lieu de travail ou dans la société. Le troisième aspect ( C) est le niveau de vie (logarithme du produit intérieur brut par habitant en parité de pouvoir d’achat), afin d’englober les éléments de la qualité de vie qui ne sont pas décrits par les deux premiers indices tels que la mobilité ou l’accès à la culture donnant ainsi IDH = A D E/divisé par trois. Un examen plus poussé des éléments constituant l’IDH livre des données sur la répartition inégale des résultats en matière d’éducation, d’espérance de vie et de revenu au sein des pays. L’Indice de développement humain ajusté aux inégalités permet de comparer les niveaux d’inégalités internationales : plus ce niveau est élevé, plus l’IDH d’un pays diminue. Des variations considérables de la qualité de l’éducation, des soins de santé et de nombreux aspects essentiels de la vie sont observées d’un pays à l’autre. Une classe du cycle primaire compte en moyenne 39 élèves pour un enseignant en Afrique subsaharienne et 35 en Asie du Sud, mais 16 à 18 dans les pays de l’OCDE, en Asie de l’Est et Pacifique, ainsi qu’en Europe et Asie centrale.
D’autre part, tandis que 28 et 27 médecins respectivement soignent 10 000 personnes dans les pays de l’OCDE et d’Europe, et dans les pays d’Asie de l’Est et Pacifique, ces chiffres sont réduits à huit seulement en Asie du Sud et moins de deux en Afrique subsaharienne. Qu’en est-il précisément pour l’Algérie ? Nous avons le classement suivant de 2000 à 2022 :: -2000, l’Algérie a eu une note de 0,637 et a été classée 91ème, -2005 0,685 , 97ème place – 2010, 0,721 et 92ème place , – 2016, 0,743 et 90ème place – 2017 0,745 et 91ème place, – 2018, 0,746 et 91ème place. En 2020 l’Algérie est classée à la 91e place avec un score de 0,748, sur 189 pays où comparativement à l’année 2019 , l’Algérie a perdu 9 places dans le classement où elle était été classée à la 82ᵉ place. Dans la nouvelle édition, publiée 08 septembre 2022, l’Algérie a été classée à la 91ème place sur 191 pays notés sur avec un indice de 0,745, premier pays en Afrique du Nord , catégorie « élevé », suivie par l’Egypte et la Tunisie qui sont classées à la deuxième place, la Libye au 3e rang alors que le Maroc arrive au bas du classement, dans la catégorie «moyen». En Afrique, l’Algérie s’est positionnée au 3e rang, derrière les Seychelles et l’île Maurice, devançant l’Egypte et la Tunisie à la quatrième place, la Libye au 5e rang, l’Afrique du Sud au 6e rang et le Maroc, classé à la 10e place, selon le même document de l’organisation onusienne. Sur les 191 pays classés par le rapport du PNUD, l’Algérie occupe le 91e rang devant la Tunisie et l’Egypte (97e), la Libye (104e), l’Afrique du Sud (109e) et le Maroc (123e). La tête du classement mondial est occupée par la Suisse, suivie respectivement par la Norvège et l’Islande alors que le Soudan du Sud, le Tchad, le Niger, la République centrafricaine, le Burundi, le Mali, le Mozambique et le Burkina Faso, viennent en bas du classement dans la catégorie des IDH « faibles. Malgré des efforts louables , pour l’ Algérie, il reste beaucoup d’efforts dans l’éducation et la santé en termes d’investissement, mais devant reconnaître également une gestion mitigée expliquant par exemple que bon nombre de responsables ou de personnes fortunées se soignent à l’étranger et envoient également leurs enfants faire des études à l’étranger ou dépensent sans compter pour des cours particuliers.
(A suivre)
Pr des universités, expert international
Abderrahmane Mebtoul

 

Dans le domaine de l’éducation, nous assistons à la baisse du niveau ayant misé sur la quantité et non la qualité, tant de l’école que des universités, une inadaptation de la formation professionnelle aux nouvelles mutations, une importante déperdition du primaire au secondaire, puis du secondaire aux universités : c’est le constat en fonction de mon expérience en tant que professeur des universités de 1974 à 2021. Et c’est dans ce cadre qu’il faut prêter une attention mondiale particulière aux indices du développement humain du Pnud qui constitue une percée importante dans le domaine de l’utilisation d’indicateurs plus crédibles que le produit intérieur brut (PIB). Mais selon de nombreux experts internationaux ces indicateurs comportent des lacunes importantes dont principalement : le choix et la pondération des indicateurs retenus ; la qualité et la fiabilité des données servant à les calculer qui sont très variables d’un pays à l’autre ;l’utilisation des moyennes, sans tenir compte des inégalités tant socio professionnelles que spatiales, voilant donc la concentration du revenu national au profit d’une minorité rentière ; le niveau tant de la scolarisation que de la santé, varient considérablement selon les pays et enfin certains indicateurs sociaux sont difficilement quantifiables faussant les comparaisons d’un pays à l’autre. Aussi, l’analyse qualitative doit suppléer nécessairement à la déficience quantitative. Il est par ailleurs souhaitable , de compléter cet indice par de nouveaux indicateurs qui prennent en compte la bonne gouvernance dont notamment les indices de corruption, la participation, le genre, la jouissance des droits de l’homme, les libertés économiques et publiques, l’intégration sociale la durabilité environnementale et pour les pays du tiers monde le poids de la sphère informelle, tout cela supposant un appareil statistique performant et adapté aux situations sociales

2.-L’Indice de Transparency International pour l’Algérie de 2003/2022 : la corruption, une menace pour la sécurité nationale

Pour Transparency International, une note inférieure à 3 signifie l’existence d’un « haut niveau de corruption, entre 3 et 4 un niveau de corruption élevé, et que des affaires saines à même d’induire un développement durable ne peuvent avoir lieu, cette corruption favorisant surtout les activités spéculatives. Dans ses différents rapports, cette institution internationale note que la frustration face à la corruption des gouvernements et le manque de confiance dans les institutions témoignent de la nécessité d’une plus grande intégrité politique devant s’attaquer de toute urgence au rôle corrupteur des grosses sommes d’argent dans le financement des partis politiques et à l’influence indue qu’elles exercent sur les systèmes politiques. L’ONG relève que « les pays où les réglementations sur le financement des campagnes sont complètes et systématiquement appliquées ont un score moyen de 70 sur l’IPC, alors que les pays où ces réglementations sont soit inexistantes, soit mal appliquées n’obtiennent respectivement qu’une moyenne de 34 et 35 ». Les différents scandales financiers en Algérie, qui touchent certains secteurs publics et privés, relatés chaque jour par la presse nationale, dépassent souvent l’entendement humain du fait de leur ampleur, encore que tout Etat de droit suppose la présomption d’innocence afin d’éviter les suspicions et les règlements de comptes inutiles. Pourtant, ces constats témoignent de la désorganisation des appareils de l’Etat censés contrôler les deniers publics et surtout le manque de cohérence entre les différentes structures de contrôle. Cela dénote l’urgence de mécanismes de contrôle transparents qui évitent que ces pratiques ne se reproduisent renvoyant à plus de liberté, de justice sociale,( indépendance de la justice), de moralité des institutions et de démocratie non plaquée selon les schémas occidentales mais tenant compte des riches anthropologies culturelles de chaque Nation ( voir A.Sen, indien professeur à Harvard prix Nobel d’Économie) .Qu’en est-il du classement sur la corruption de l’Algérie de 2003 à 2022 : en 2003 : 88e place sur 133 pays ; 2004 : 97e place sur 146 pays ; 2005 : 2,8 sur 10 et 97e place sur 159 pays ; 2006 : 84e place sur 163 pays ; 2007 : la 99e place sur 179 pays ; 2008 : 92e place sur 180 pays ; 2009 : 111e place sur 180 pays ; 2010 : 105ème place sur 178 pays ; 2011 : 112ème place 183 pays ; 2012 :105e place sur 176 pays ; 2013 -105 rangs sur 107 pays ; 2014 –100ème sur 115 pays ; 2015 –88ème sur 168 pays ; 2016 –108ème sur 168 pays ; 2017 -112ème place sur 168 pays ; 2018- 105ème place sur 168 pays ; 2019- 106ème sur 180 pays. 2020, 104ème place sur 180 pays avec une note de 36 sur 100. Dans son rapport de 2021 l’Algérie a obtenu le score de 36 points sur 100 et se place 104e sur 180 pays où elle occupait le 106e rang et dans le rapport de 2022 l’Algérie occupe la 117ème place sur 180 ayant reculé de 13 places avec un score de 33 sur 100 contre 36 sur 100. Selon le classement, l’Algérie occupe le même rang que l’Egypte, le Nepal, les Philippines et la Zambie et en Afrique, le pays le moins corrompu est les Seychelles qui occupe le 23ème rang mondial avec un score de 70 points sur 100, suivi par le Cap Vert (39ème/58 points), puis le Botswana (45ème/55 points), l’île Maurice (49ème/54 points), le Rwanda (52ème/53 points).Le Danemark, la Finlande et la Nouvelle-Zélande dominent le classement, avec un score de 88. Suivent la Norvège, Singapour et la Suède, avec 85 points. Puis la Suisse, avec 84 points. Les Pays-Bas, le Luxembourg et l’Allemagne se placent respectivement aux 8e, 9e et 10e places. Le Royaume-Uni occupe la 11ème place, Hong Kong (12ème), le Canada (19ème), l’Australie, la Belgique et le Japon (18ème), la France (22ème), les Emirats Arabes Unis (24ème). Les Etats-Unis 27ème, le Qatar (31ème), la Corée du Sud (32ème), l’Espagne (34ème), l’Italie (42ème). L’Arabie Saoudite (52ème), la Chine (66ème), le Mexique (124ème), la Russie (136ème), l’Iran (150ème). En bas du classement, nous avons le Venezuela (177ème/14 points), la Somalie et la Syrie la 178ème place avec 13 points, le Soudan du Sud (180ème/11 points). Pour l’Algérie, les organes dépendant de l’exécutif soit du ministère de la justice ou du ministre des finances ou du premier ministre ne sont pas neutres et l’expérience récente des détenus de hauts responsables dont des ex premiers ministres et même un ministre de la justice ,en est la preuve. Dans les pays développés l’organe suprême de contrôle des deniers publics est la Cour des Comptes, organe indépendant qui d’ailleurs en Algérie a été consacré par la nouvelle Constitution, devant éviter de créer d’autres organes qui se télescopent . Les intentions de lutte contre la corruption certes louables afin que ce rêve si cher à tous les Algériens, condition d’un Front national interne solide face tant aux tensions budgétaires, sociales internes, que géostratégiques à nos frontières s’appliqueront-elles sur le terrain ? Il ne faut pas confondre la corruption, avec acte de gestion, la dépénalisation de l’acte de gestion que je réclame depuis de longues années, afin d’ éviter de freiner les énergies créatrices, la définition du manager étant de prendre des risques, pouvant gagner ou perdre. Le cancer de la corruption, démobilise la société par une méfiance généralisée et accentue le divorce Etat-citoyens. Le combat contre la corruption, pour son efficacité doit reposer sur la mise en place de mécanismes de régulation transparents, en fait une bonne gouvernance. Les différents scandales financiers en Algérie, qui touchent certains secteurs publics et privés, relatés chaque jour par la presse nationale, dépassent souvent l’entendement humain du fait de leur ampleur, encore que tout Etat de droit suppose la présomption d’innocence afin d’éviter les suspicions et les règlements de comptes inutiles. Pourtant, ces constats témoignent de la désorganisation des appareils de l’Etat censés contrôler les deniers publics et surtout le manque de cohérence entre les différentes structures de contrôle. Cela dénote l’urgence de mécanismes de contrôle transparents qui évitent que ces pratiques ne se reproduisent renvoyant à plus de liberté, de justice sociale,( indépendance de la justice), de moralité des institutions et de démocratie non plaquée selon les schémas occidentales mais tenant compte des riches anthropologies culturelles de chaque Nation ( voir A.Sen, indien professeur à Harvard prix Nobel d’Économie) .Si l’on excepte la mauvaise gestion de certaines entreprises publiques qui accaparent une partie importante du financement public, il ne faut jamais oublier l’administration et les services collectifs dont les infrastructures qui également accaparent la mauvaise gestion des services collectifs et devant se poser la question de l’efficacité des transferts sociaux souvent mal gérés et mal ciblés qui ne s’adressent pas toujours aux plus démunis.

En conclusion, selon le rapport du PNUD de 2022, nous vivons dans un monde d’inquiétude où la pandémie actuelle de COVID-19 a entraîné un recul du développement humain et la guerre en Ukraine et dans d’autres parties du monde génère de nouvelles souffrances humaines dans un ordre géopolitique mouvant et un système multilatéral exsangue. Pour celui de Transparency International, le contrôle le plus efficace passe par une plus grande moralisation de la société lie à la démocratisation et une visibilité de la politique socio-économique , la corruption démobilisant la population, devant s’attaquer à l’essence, l’écosystème et notamment la bureaucratisation centrale et locale qui enfante la sphère informelle et la corruption.