L’équilibre des caisses de retraite et l’impact de l’augmentation des salaires en Algérie, implique un taux de croissance supérieur au taux de croissance démographique afin d’éviter la dérive inflationniste

CNR

Le débat en France sur la réforme des caisses de retraite, nécessaire, pour éviter son implosion à terme, montre que c’est un sujet complexe qui implique une large concertation sociale, devant éviter tout populisme, une Nation ne pouvant distribuer plus que ce qu’elle produit quitte à s’orienter vers la dérive sociale à terme.Avec une population active de plus de 12,5 millions en 2022, il faudra entre 2022-2025 créer plus de 350.000-400.000 emplois par an (le taux d’emploi féminin étant sous-estimé) et avoir un taux de croissance sur plusieurs années de 8/9% condition de l’équilibre des caisses de retraite. On devra tenir compte de la forte pression démographique souvent oubliée, où la population algérienne est passée de 11.479.248 habitants en 1962 à 14.265.015 en 1970, à 18.936.293 en 1980, à 25.436.214 en 1990, à 30.833.966 en 2000, à 35.658.311 en 2010 et à 45.4 au 01 janvier 2022 et dépassera 50 millions horizon 2030. Le taux de chômage actuel qui selon le FMI incluant les emplois de la sphère informelle et les emplois rente, faire et refaire les trottoirs, les sureffectifs dans les entreprises publiques, administrations, aurait atteint 14,5% en 2021 et 14,9% en 2022, contre 14,2% en 2020, ce taux dépassant les 30% pour les catégories 20/30 ans et paradoxalement les diplômés. En 2021, le déficit de la CNR était de 540 milliards de dinars, alors qu’en 2020, le déficit caracolait à environ 640 milliards de dinars , le déficit s’étant élevé à 376 milliards de dinars en 2022, selon le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale grâce au concours financier de l’Etat à travers des mesures de soutien contenues dans la loi de finances complémentaire 2022.
En effet, pour assurer le paiement des pensions des retraités, il est prévu une contribution de l’État, au Fonds de réserve pour les retraites, ce montant étant défini comme « un budget supplémentaire », que le gouvernement prélève chaque année sur la taxe pétrolière pour contrer le déficit de la caisse de retraite ». En cas de chute du cours des hydrocarbures le risque est l’implosion.
Le nombre de retraités est passé de 2 millions en 2010 à plus de 3,3 millions fin 2022 avec un accroissement annuel d’environ 130.000 chaque année, la CNR enregistrant un taux de cotisation estimé à 2,2 travailleurs alors que pour chaque retraité l’équilibre est de cinq travailleurs pour un retraité. Et selon les données du ministère du Travail le nombre de retraités touchant une pension inférieure à 15.000 dinars est d’un million, ces pensions devant faire prochainement l’objet d’une revalorisation, en application des directives du président de la République, lors de l’ouverture de la rencontre gouvernement-walis, concernant 2,6 millions dès janvier 2023, en rappelant qu’environ 1,5 million de retraités, depuis mai 2022, ont bénéficié majoration de l’ordre de 10 % pour les pensions ne dépassant pas 15.000 dinars, les retraités touchant entre 15.000 et 20.000 dinars ayant eu droit à 5 %, les retraites entre 20.000 et 43.000 dinars une hausse de 3 % et les retraités touchant plus de 43.000 dinars une augmentation de 2%. L’Etat devrait mobiliser une enveloppe de 3037,41 milliards de dinars durant l’année 2023 soit au cours de 137 dinars un dollar 24,62 milliards de dollars afin de couvrir l’impact financier résultant de la hausse des salaires et des systèmes de rémunération des employés, incluant l’accompagnement des employés des filets sociaux et la transformation de leurs contrats en CDI. Le gouvernement a consacré dans la loi de finances 2023 une enveloppe budgétaire de 681 milliards de dinars pour financer la hausse des salaires, la revalorisation s’effectuant en deux phases : une enveloppe de 340,5 milliards de dollars pour 2023 et 340,7 pour 2024. La masse salariale globale devrait atteindre 4629 milliards de dinars en 2023 , soit 33,78 milliards de dollars , ce qui représente 47,39% du budget total dédié au fonctionnement et rapporté au PIB d’environ 185 milliards de dollars un ratio de 18,25%.
L’efficacité de ces mesures dépendra de l’évolution du taux de croissance économique et du cours des hydrocarbures. Or, nous avons assisté à une baisse du taux de croissance du PIB à prix courant, qui a été en 2019 de 0,8%, en 2020, négatif entre 5/ 6% avec ,une reprise 3,5% en 2021, pour 2022 le Fonds monétaire international (FMI) ayant revu à la hausse ses prévisions de croissance pour l’économie algérienne à 4,7%, soit le double de ses précédentes prévisions qui tablaient sur une croissance de 2,4%.et pour l’année 2023, le PIB devrait enregistrer une croissance de 2,6%, selon les nouvelles projections de l’institution du FMI ce qui permettra d’atténuer les tensions sur les caisses de retraite. Mais cet équilibre est tributaire également de l’intégration de la sphère informelle dominant plus de 50% de l’activité économique et contrôlant, selon le Président de la République entre 6.000 et 10.000 milliards de dinars , soit entre 33 et 45% du PIB, de la lutte contre l’évasion fiscale, de l’unification des caisses de retraite pour un sacrifice partagé et une nouvelle politique des subventions qui sont un revenu indirect. Les tensions sociales, sont donc atténuées grâce aux recettes des hydrocarbures qui permettent des subventions et transferts sociaux , durant la période allant de 2018 à 2021, entre 3900 et 5130 milliards de dinars, dont 56% de subventions généralisées (2.800 milliards), plus de 1.941 mds DA soit près de 17 mds USD pour la subvention sociale au profit de toutes les franges de la société algérienne en 2022, un total de transferts sociaux de plus de 5.000 milliards de dinars dans la loi de finances 2023, mais mal ciblées et mal gérées. Rappelons que pour 2022, le gouvernement, avait octroyé 624 milliards de dinars au profit de l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC), 105 milliards de dinars pour le soutient à l’énergie, 89,76 milliards de dinars pour le lait, 83,5 milliards de dinars pour l’huile et le sucre, 15,3 milliards de dinars pour la solidarité et 1,97 milliard de dinars pour les dépenses alimentaires. Ainsi, toutes les lois de finances depuis de longues décennies, ont généralisées les subventions source d’injustice sociale, celui qui perçoit 30.000 dinars/mois bénéficiant des mêmes subventions que celui dont le revenu dépassarises publiques des comptes transparents évitant d’additionner des prix subventionnés et des prix de marché.
Les expériences historiques dans le monde, montrent qu’il y a le système de répartition et le système de participation à travers les sociétés d’assurance, souvent combinées.
Le système de répartition repose sur le principe de solidarité entre les générations, où les cotisations versées par les salariés et leurs employeurs au titre de l’assurance vieillesse servent à payer les pensions des retraités.
Le système de capitalisation est un dispositif qui permet de cotiser individuellement grâce aux dispositifs d’épargne d’entreprise et/ou d’épargne individuelle, permettant de constituer un revenu supplémentaire pour la retraite.
En Algérie domine le système de répartition, deux caisses de retraites existent, l’une pour les personnes nommées par décret pendant 10 ans bénéficiant d’une retraite à 100% et l’autre majoritaire, plus de 80% bénéficiant d’une retraite à 80%.
(A suivre…)
Pr des universités, expert international
Abderrahmane Mebtoul