Amel Imalhayène signe son premier ouvrage «Creuser»

Recueil de nouvelles

Dans son premier ouvrage, un recueil de nouvelles intitulé «Creuser», l’écrivaine Amel Imalhayène propose à ses lecteurs de sonder la mémoire collective pour remonter le fil des réminiscences qui sont souvent transmises de génération en génération, avec le traumatisme, parfois séculaire, comme point de départ, et la libération en bout de course.
Publié récemment aux éditions Casbah, ce recueil de 110 pages propose sept nouvelles qui s’intéressent à des comportements et traumatismes actuels, à peine visible chez ses personnages, et exhume les causes de ces derniers en remontant les strates de la mémoire, parfois sur des générations.
L’ouvrage s’ouvre sur «La clé», un surprenant retour à une époque des moins connues, et des plus troubles de l’histoire de l’Algérie, une époque à cheval entre le faste et le déclin et profondément marquée par le doute et l’incompréhension des toutes premières années de l’invasion coloniale française.
Ces années sont racontées à travers le vécu d’une famille de l’aristocratie algéroise de l’époque, tiraillée par le désir de rester à Alger défendre sa ville, ses biens et la mémoire sacrée des ancêtres et la résilience à fuir la barbarie coloniale et abandonner les demeures et les tombes des aïeuls, «sur les hauteurs de Mustapha».
L’histoire relate le drame de plusieurs générations d’une même famille qui avait fui l’Andalousie pour s’installer à Alger avant de devoir, des siècles plus tard, encore une fois fuir les atrocités coloniales vers Damas (Syrie), en gardant précieusement les clés des demeures qu’elles ne reverront jamais.
Après la chute de l’Andalousie et la colonisation de l’Algérie, la collection de clés va encore s’agrandir quand les descendants de cette même famille se verront contraints de quitter la Syrie également en proie aux troubles violents.
Le drame du déplacement des populations et de l’exil revient également dans «Les eucalyptus», avec la souffrance et la solitude de Malek, un ingénieur forestier installé en France, appelé à intervenir sur l’île de Sainte Marguerite, où son ancêtre, résistant de la première heure face à l’invasion coloniale, avait été déporté. Cette nouvelle rapporte la destruction et l’éparpillement de la tribu des Beni Menaceur, non loin de Cherchell, et la difficulté de remonter le fil de l’histoire et de recoller les morceaux d’un arbre généalogique malmené comme l’eucalyptus ramené d’Australie.
Ce texte poignant, qui oppose différents rapports à la mémoire, explore également l’histoire personnelle de la famille de l’auteure, descendante de de cette tribu résistante de la première heure contre l’occupation coloniale, qui a vu en 1842, une centaine de ses membres déportés. Les affres de la guerre et les traumatismes liés aux exactions coloniales et à la torture, refont surface dans «La nuit», un texte qui convoque également l’histoire personnel du grand peintre algérien M’hamed Issiakhem et le célèbre incident de la grenade. Alors que dans «La blessure», Amel Imalhayène brosse le portrait de la femme algérienne combattante pour l’indépendance, pour l’émancipation et pour l’éducation.
En couverture de ce recueil le choix s’est porté sur la toile «Espace-temps fugace», signé de la main de l’artiste peintre Abdelkader Guermaz (1919-1996).
Née à Alger, Amel Imalhayène s’est consacrée aux études littéraires et à l’histoire de la philosophie, avec un intérêt particulier pour l’oeuvre de Mohamed Dib et les thèmes qui la traversent.
R.C.