L’Algérie, un partenaire stratégique de l’Europe pour la sécurité régionale et énergétique

Visite de travail du Haut Représentant de l’Union européenne pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité

Le 1er septembre 2005, l’Algérie a signé un accord d’association de libre-échange avec l’Europe où il était prévu le démantèlement graduel de deux listes de produits européens à l’importation , dont l’une sera complètement démantelée en 2012 et l’autre en 2017, démantèlement tarifaire reporté ensuite au 1 septembre 2020, négociations en statut quo entre 2021/2022, et actuellement en 2023, toujours en négociation. L’Algérie considère nécessaire de réévaluer les volets économique et commercial de l’Accord d’association avec l’Union européenne (UE), qui n’a pas réalisé les objectifs attendus en matière d’investissements européens en Algérie. Pour l’Algérie, la démarche d’évaluation réclamée, à revoir certaines dispositions de l’accord, ne vise nullement à remettre en cause l’accord-cadre, mais bien au contraire à l’utiliser pleinement dans le sens d’une interprétation positive de ses dispositions permettant un rééquilibrage des liens de coopération.En 2022, selon les responsables européens, 90% des exportations de gaz algérien partent vers l’Europe, car étant très couteux d’approvisionner l’Asie, devant contourner toute la corniche d’Afrique, avoir des bateaux de grandes capacités sans compter des concurrents à bas prix comme la Russie, le Qatar et l’Iran.
Pour les canalisations, nous avons le Transmed, la plus grande canalisation d’une capacité de 33,5 milliards de mètres cubes gazeux via la Tunisie, le Medgaz, directement vers l’Espagne, à partir de Beni Saf, au départ d’une capacité de 10,5 milliards de mètres cubes gazeux, et le GME via le Maroc que l’Algérie a décidé d’abandonner. Le contrat s’étant achevé le 31 octobre 2022, d’une capacité de 13,5 de milliards de mètres cubes gazeux. Dans son dernier rapport l’Organisation des pays arabes exportateurs de pétrole note que la demande européenne en gaz est passée de 125,9 milliards de tonnes en 2022 contre 75,9 en 2021 avec une baisse du prix du gaz qui avait plafonnée entre 250/300 dollars le mégawatt heure sous la barre des 50 dollars depuis janvier 2022.
L’Algérie a exporté 10 milliards de mètres cubes gazeux via le Medgaz et 23,5 vers l’Italie via le Transmet, un accroissement à travers ces deux canalisations chacun de 2 milliards de mètres cubes gazeux mais avec une baisse des exportations de GNL de 12% , estimation de 11,48 millions de tonnes en 2022 contre 10,2 en 2021, le ministère de l’Energie algérien annonçant pour 2022 une exportation de 56 milliards de mètres cubes gazeux. GNL plus canalisation.
La production totale, à ne pas confondre avec les exportations, consommation intérieure, plus exportation, plus 15/20% de réinjection dans les puits pour éviter leur épuisement, a avoisiné en 2022, 125/130 milliards de de mètres cubes gazeux, devant au minimum, fonction de l’accroissement de la forte demande intérieure et d’importants investissements, produire 180/200 milliards de mètres cubes gazeux pour pouvoir exporter 100 milliards de mètres cubes gazeux.
A court terme, les exportations peuvent croître seulement entre 4/5 milliards de mètres cubes gazeux. Horizon 2025/2027, l’Algérie peut doubler ses exportations de gaz vers l’Europe de 11 à 25% sous réserve de huit conditions. La première condition, concerne l’amélioration de l’efficacité énergétique et une nouvelle politique des prix renvoyant au dossier de subventions et donc de la forte consommation intérieure presque équivalente aux exportations, étant prévu 50 milliards de mètres cubes gazeux en 2025, selon le PDG de Sonelgaz. Il devient intolérable que l’on continue à la fois de livrer le prix du gaz à certaines unités à 10/20% du prix international et à construire des millions de logements avec les anciennes techniques alors que les nouveaux procédés permettent d’économiser entre 30/40% de la consommation d’énergie. La deuxième condition, est relative à l’investissement à l’amont pour de nouvelles découvertes d’hydrocarbures traditionnels, tant en Algérie que dans d’autres contrées du monde, les hydrocarbures procurant en 2022 98% des recettes en devise avec les dérivées comptabilisées dans rubrique hors hydrocarbures pour une part dépassant les 60% et qui a permis, outre les investissements via la dépense publique, d’avoir un niveau des réserves de change fin 2022 d’environ 60 milliards de dollars. La position de l’Algérie envers l’Europe et d’autres pays est claire : la loi nouvelle des hydrocarbures étant attractive, Sonatrach étant limitée dans l’autofinancement, venez investir dans le cadre d’un partenariat gagnant – gagnant et on pourra augmenter les exportations. La troisième condition est liée au développement des énergies renouvelables (actuellement dérisoires, En parallèle, des investissements conséquents seront réalisés pour développer les capacités solaires du pays, 500 MW en 2022, étant prévu 15.000 MW en 2035, selon le ministère de l’Energie (source APS). Combinant le thermique et le photovoltaïque, le coût de production mondial ayant diminué de plus de 50% et il le sera plus à l’avenir. Avec plus de 3000 heures d’ensoleillement par an, «l’Algérie a tout ce qu’il faut pour développer l’utilisation de l’énergie solaire, le ministère de l’Energie, ayant programmé sous réserve de trouver des financements 40% de la consommation intérieure à partir des énergies renouvelables horizon 2030/2035 et une fraction exportable à partir des interconnexions. Pour le Haut représentant de l’Union européenne pour les Affaires étrangères et la Politique de sécurité, vice-président de la Commission européenne, je le cite : « nous souhaitons développer cette relation ensemble avec l’Algérie, pas seulement pour le présent, pas seulement pour le gaz aujourd’hui, mais en regardant vers le futur, en privilégiant les investissements européens dans le secteur des énergies renouvelables. Ce futur là pour l’Algérie est très prometteur, puisque l’Algérie a un énorme potentiel dans le domaine des énergies renouvelables ». La quatrième condition, selon la déclaration de plusieurs ministres de l’Énergie entre 2013 et 2022, l’Algérie compte construire sa première centrale nucléaire en 2025 à des fins pacifiques, pour faire face à une demande d’électricité croissante. La cinquième condition, est le développement du pétrole/gaz de schiste. Selon les études américaines, l’Algérie possédant le troisième gisement mondial d’environ 19.500 milliards de mètres cubes gazeux, mais qui nécessite, outre un consensus social interne, de lourds investissements, la maîtrise des nouvelles technologies qui protègent l’environnement et des partenariats avec des firmes de renom (voir dossier 9 volumes 890 pages sous la direction du Pr A. Mebtoul, opportunité et risques et urgence de la transition énergétique Premier ministère 2015).
La sixième condition, consiste en la redynamisation du projet Galsi, gazoduc Algérie-Sardaigne-Italie, qui devait être mis en service en 2012, d’une capacité de 8 milliards de mètres cubes gazeux dont le coût était estimé en 2012 à 3 milliards de dollars, ayant doublé depuis (un tracé très complexe), dossier que j’ai défendu lors de mon déplacement en Italie en 2012 et qui a été abandonné par l’Italie sous la pression des élus de la Sardaigne qui et qui devrait être réactivé. La septième condition est l’accélération de la réalisation du gazoduc Nigeria-Europe via l’Algérie, d’une capacité de plus de 33 milliards de mètres cubes gazeux, selon les études européennes de 2020 un coût d’environ 20 milliards de dollars contre une estimation de 11 milliards de dollars en 2011,plus rentable que celui du Maroc évalué par le centre de recherches IRIS de 30 milliards de dollars pour une durée de réalisation de 10 ans, mais nécessitant l’accord de l’Europe, principal client. La huitième condition, est le développement de l’hydrogène vert où l’Algérie est bien placée pour produire de l’hydrogène vert à des prix très compétitifs, où fin 2022, le groupe Sonatrach a signé un accord avec le groupe allemand VNG afin de construire des usines de production d’hydrogène vert à travers le pays et exporter en direction de l’Europe, étant prévu d’investir entre 20 à 25 milliards de dollars horizon 2030-2035.
En conclusion, le monde devrait connaître un profond bouleversement géostratégique, dans les domaines militaire, économique, social et surtout culturel souvent oublié, nécessitent des stratégies d’adaptation où toute Nation qui n’avance pas recule, n’existant pas de situation statique. L’évolution de la guerre en Ukraine, les tensions en Asie Chine /USA, l’émergence du poids croissant des BRICS et la réconciliation entre l’Iran et l’Arabie Saoudite, auront des conséquences sur les recompositions politiques et économiques mondiaux entre 2023/2030. La stabilité des deux rives de la Méditerranée et de l’Afrique, impose à l’Algérie et l’Europe d’entreprendre ensemble étant souhaitable que grâce au dialogue productif, les relations trouvent une solution garantissant les intérêts réciproques, n’existant pas dans la pratique des affaires de sentiments, mais que des intérêts, l’Algérie entendant défendre ses propres intérêts tout en respectant la légalité internationale.
Pr des universités
Expert international docteur d’Etat
Abderrahmane Mebtoul
(Suite et fin)