Culture religieuse et culture profane

Islam

Quiconque est pratiquement convaincu est supposé avoir une culture acquise au fil du temps et dans une parfaite harmonie avec la culture générale.
Tout est question de choix personnel dans la pratique religieuse et le développement culturel. Au fil des jours, les uns lisent des versets coraniques avec l’effort de comprendre et en manifestant un vif intérêt pour les autres domaines de la connaissance, les autres, livrés à toutes les tentations malsaines, passent leur temps à flâner ou à s’asseoir sur les bancs publics pour bavarder inutilement au milieu des groupes d’oisifs.

Entre spiritualité et culture
Il n’y a point d’incompatibilité. Bien au contraire, l’une ne va pas sans l’autre. C’est à juste titre qu’un homme pieux a dit, au cours d’une réunion : «La science sans religion est aveugle et la religion sans science est boîteuse. Incontestablement, spiritualité et culture vont de pair. C’est grâce à l’autre que chacune devient florissante. Très tôt, c’est le texte coranique qui a véhiculé de nombreuses références à tous les domaines scientifiques et qui a permis l’émergence de la calligraphie. Et que d’édifices religieux ou autres portent en eux des versets coraniques gravés dans la pierre, dans les pays musulmans et quelques pays d’Europe du Sud, comme l’Espagne, le Sud de la France, la Grèce, la Sicile.
A titre indicatif, en plus de la civilisation musulmane qui a rayonné partout, il y a Montpellier où a été enseignée la médecine arabe, au Moyen-Age. A l’idée de beauté artistique, on ne peut ne pas parler de la chanson en milieu arabo-musulman, lorsqu’elle est accompagnée d’un texte parfaitement esthétique. Les sourates coraniques d’une beauté inégalable sont en bonne partie chantées pour leur forme poétique, les spécialistes du tadjweed en ont apporté la preuve. Revenons à la culture profane ou générale en adéquation avec la culture religieuse pour imaginer ce qu’on peut acquérir comme connaissances au bout d’une période d’apprentissage plus ou moins longue.
Ce fut le cas d’Ibn Sina qui a été à la fois un scientifique ayant mémorisé tout ce que la médecine de son temps avait découvert ou inventé, puis un philosophe et ce après avoir appris tout le Coran, avant l’âge de 9 ans. L’interaction devait être telle que les connaissances dans divers domaines apportaient à Ibn Sina un éclairage important dans le domaine religieux. Quant aux sourates coraniques qu’il avait apprises par cœur, elle lui suggèrent des idées nouvelles susceptibles de le mettre sur la voie du progrès.

Art sacré, éducation et créativité vocale
L’art comme support de la spiritualité comme la gravure, l’architecture, l’artisanat, toute sa diversité, l’écriture à vocation esthétique a trouvé dans l’univers musulman tous les moyens qui lui ont permis de se remettre en question pour se recréer sous d’autres formes à caractère futuriste. Désormais, on a la conviction que l’art et la spiritualité sont dans une relation d’interaction pour assurer une éducation adaptée au monde de demain. Autrement dit, il faut que l’éducation des générations trouvent dans la pratique religieuse et la spiritualité ce qu’on a coutume d’appeler les fondamentaux d’une formation éducative qui apportent aux enfants les armes qui leur assurent un meilleur avenir : esprit de créativité, conditions d’une meilleure concentration face à un monde de plus en plus menaçant, autonomie individuelle et collective pour une vie autarcique, sens des responsabilités, pratique religieuse fondée sur ses convictions personnelles.
our que le religieux influe en bien sur les générations montantes, il faut éveiller très tôt les consciences pour faire comprendre que la vie est bien plus complexe qu’on ne le pense. Pour assurer une meilleure place de son pays dans le concert des nations et dans la perspective d’un monde où la lutte économique devient de plus en plus ardue, la jeunesse sur qui repose l’avenir dans un monde incertain doit être préparée à devenir non pas un ensemble de consommateurs ou d’observateurs passifs, mais des participants actifs. On peut même revenir à l’enseignement traditionnel des écoles coraniques qui a préparé aux grandes écoles. Avant de rentrer dans les universités des grandes capitales, Mohamed Akroun a d’abord appris les 114 sourates du Coran à l’école coranique. Le maître d’école coranique était là pour transmettre les versets à des enfants souvent instables, rêveurs, paresseux, taquins. Il a assuré aussi l’art de bien articuler les sons et de bien parler. On sortait de chez lui bien préparé à la vie sociale, scolaire, familiale, professionnelle. Taha Hussein et d’autres devenus de grands professeurs ont d’abord été pris en charge par des cheikhs très habiles. La culture générale, profane ou scientifique s’est installée d’elle-même, le terrain ayant été bien préparé.
Abed Boumediene