France de Macron Un régime sécuritaire bâti sur la répression

« En France, les officiants de l’appareil répressif ont toujours eu le sens de l’ordre avant celui de la légalité, le sens de l’État avant le souci du citoyen ». Philippe Boucher
Depuis quelques années, à la faveur de l’enracinement de la France dans la crise économique et sociale systémique, corrélativement émaillée par le soulèvement des Gilets jaunes (momentanément interrompu durant la pandémie de Covid-19) et, depuis quelques mois, par le mouvement de révolte contre la réforme des retraites, l’unique réponse apportée par le gouvernement Macron aux manifestants revendiquant leur droit de vivre dignement ou de préserver leurs droits sociaux, est la répression.

Macron : la gouvernance par la terreur
Sans conteste, dans une France en proie à de permanentes révoltes sociales, l’État ne cesse de muscler son bras armé, affirmer sa puissance coercitive, affermir son autoritarisme, manifester sa force répressive, dresser des remparts de plexiglas pour défendre l’ordre établi, celui de la gouvernance des riches déterminés à préserver leurs privilèges, sauvegarder leur domination. Aux multiples revendications socioéconomiques ou politiques des manifestants, le gouvernement Macron répond, avec toujours plus de férocité et de brutalité, par la répression. Quand la répression policière ne suffit pas à tempérer les ardeurs revendicatives des protestataires en lutte, l’État déploie l’armée pour procéder à la pacification du pays, parfois par l’usage des LBD (les lanceurs de balle de défense).
De fait, en France, en particulier depuis l’intronisation de l’employé de banque Rothschild à l’Élysée, aux yeux duquel le peuple français en lutte ne constitue qu’une « foule et une meute illégitime », les répressions policières prennent des formes brutales, aveuglantes à force d’éborgnement des manifestants. Qui plus est, les forces de l’ordre usent de moyens coercitifs et répressifs hautement sophistiqués. La police s’appuie sur un armement toujours plus impressionnant et technologique pour défendre l’ordre établi élyséen. Outre l’exhibition effrayante de bataillons redoutablement équipés d’un arsenal répressif à la technologie militaire meurtrière effroyablement développée (les fameux Robocop), le gouvernement Macron n’hésite pas à déployer des milliers de policiers lors d’une simple manifestation pacifique (notamment à chaque manifestation contre la réforme des retraites, encadrée par une escouade de CRS ; parfois le nombre des forces répressives dépasse amplement celui des manifestants, pour étouffer dans l’œuf tout velléité d’occupation pérenne de l’Espace public. C’est ce qu’on pourrait appeler la démocratie militarisée, la liberté caporalisée, en résumé la société garrottée par les cordons policiers. Une démocratie escortée de blindés et d’escadrons. Manière épouvantable d’intimider et de terroriser les manifestants.
La militarisation des fonctions policières, autrement dit l’application des techniques d’entraînement et d’intervention répressive militarisées, induit inéluctablement une logique de violence. De terreur.

La France de Macron : de la répression militarisée à la militarisation de l’État
Sans conteste, en France, il existe une corrélation entre l’introduction de la force paramilitaire comme technique de maintien de l’ordre, notamment par l’adoption d’équipements militaires (casques, boucliers, genouillères, armes létales, etc.) et l’augmentation du degré de violence employée dans les opérations de maintien de l’ordre. Les forces de police militarisées, matérialisées par le déploiement inégalé de techniques et d’équipements militaires, induisent une véritable logique de guerre. Qui dit guerre dit détermination de battre (abattre) l’ennemi, y compris intérieur.
Ces dernières années, particulièrement depuis l’élection de Macron, jamais depuis la Commune de Paris de 1871 (la Semaine sanglante : ce massacre fit 30.000 morts, fusillées sans jugement du 22 au 29 mai 1871, 46.000 prisonniers, des milliers de proscrits et de déportés) et la guerre de Libération de l’Algérie (où la barbarie des forces de l’ordre françaises se déchaîna quotidiennement contre le peuple algérien durant sept ans, même en pleine capitale de la « démocratie » où sévissaient les ratonnades contre les résidents algériens, dont la plus célèbre fut perpétrée lors de la manifestation pacifique d’octobre 1961 à Paris, réprimée dans le sang par le régime républicain et laïque gaulliste, faisant près de 300 morts) on avait assisté à un tel déchaînement de violence étatique contre la population civile. Le point d’orgue de cette dynamique répressive fut atteint lors du mouvement des Gilets jaunes.
Avec les manifestations des Gilets jaunes, les violences policières furent effroyablement sanglantes, à tel enseigne que l’ONU s’alarma et dut intervenir pour sermonner la France. Dans son rapport, Michelle Bachelet, haut-commissaire aux droits de l’Homme, rappela à l’ordre, tel un vulgaire pays dictatorial, les autorités françaises et réclama l’ouverture d’une enquête approfondie sur les violences policières recensées lors des manifestations des Gilets jaunes.
Force est de relever qu’à chacune des manifestations organisées par les Gilets jaunes le samedi, on dénombrait des dizaines de blessés graves causés par la répression policière (au total on déplora plus de 4000 blessés). Des centaines de manifestants furent éborgnés ou estropiés par les tirs des flash-ball et de grenades de désencerclement. Plus d’une dizaine de personnes furent tuées.
Contre les manifestants, la police utilisait régulièrement des armes de guerre. À chaque manifestation des Gilets jaunes, les forces répressives vidaient leurs réserves de gaz lacrymogène et de grenades, preuve de l’acharnement de ces forces de l’ordre à charger et à mater violemment les manifestants. En outre, les charges sans sommation, les tirs de balles en caoutchouc et de grenades se multipliaient notablement.

Guerre permanente et globale à l’intérieur et à l’extérieur des frontières
Une chose est sûre, en France, cette barbarie policière n’est nullement contingente mais structurelle, systémique. Elle reflète la banalisation des répressions policières, sources d’accroissement des tensions entre les « citoyens » excédés et l’État discrédité, disqualifié.
À cet égard, il est utile de relever que, pour l’État français impérialiste, la gestion du maintien de l’ordre à l’intérieur de son espace public, avec comme mission l’opération de contention des foules et de neutralisation d’éléments turbulents des classes populaires, s’inscrit dans le même esprit que ses interventions militaires à l’extérieur des frontières. C’est la même logique dominatrice et répressive qui est à l’œuvre. En effet, l’État français a objectivé le concept de guerre permanente et globale à l’intérieur et à l’extérieur des frontières. Pour les dirigeants français pétris de cynisme, à la personnalité psychopathique, lancer des LBD ou des grenades de désencerclement contre les manifestants et lâcher des bombes contre les populations en Syrie, en Afghanistan ou en Libye, avec tous les dommages collatéraux inhérents à ce genre d’interventions militaires, relèvent de la même technique de gouvernance despotique, de la même logique de guerre. En particulier, en période de crise économique et sociale, propice aux turbulences sociales, où l’amenuisement de l’État providentiel s’accompagne d’un durcissement autoritaire du pouvoir. Comme on le relève de nouveau, actuellement, à la faveur du mouvement de révolte contre la réforme des retraites.
Désormais, en France, les frontières entre gestion policière et militaire du maintien de l’ordre ont éclaté, comme les manifestants sont systématiquement éclatés.
La distinction entre militaires et policiers s’estompe, comme s’estompe la notion d’ennemis, désormais étendue au peuple autochtone insoumis. Ces deux corps constitués armés remplissent les mêmes missions guerrières de combat indifféremment contre l’ennemi extérieur et/ou intérieur. Assurément, en France la distinction entre police et armée tend à s’amenuiser, particulièrement vrai dans ce contexte contemporain où les frontières entre l’ennemi intérieur et extérieur se volatilisent. Par ailleurs, pour l’État impérialiste français, les interventions militaires à l’extérieur, notamment en Afrique, constituent un terrain inégalé d’expérimentation. Car ces interventions jouissent de conditions d’entraînement et d’aguerrissement sans égal dans l’hexagone. À ce titre, l’opération Sentinelle offrait une préfiguration grandeur nature de la mission de l’armée dans le maintien de l’ordre en France. Au reste, depuis le Conseil de défense du 29 avril 2015 tenu sous la présidence de François Hollande, l’armée a étendu ses fonctions d’opérations directes de maintien de l’ordre à l’hexagone. Durant la pandémie de Covid-19 politiquement instrumentalisée par le gouvernement Macron, les 7000 soldats de l’opération Sentinelle étaient régulièrement mis à contribution, notamment lors des confinements totalitaires, pour se substituer aux policiers et gendarmes appelés à contrôler les restrictions de circulation et à verbaliser les citoyens imprudents, dépourvus de l’attestation dérogatoire de déplacement, qui rappelle la période de Vichy sous domination des nazis.

La culture répressive légendaire de l’État français
Quoi qu’il en soit, en cas de tensions sociales graves, l’armée, armature de l’État, chargée de la défense contre les ennemis extérieurs, peut assurer également le maintien de l’ordre contre les menaces provenant de l’intérieur du pays. Comme l’histoire de France l’a régulièrement démontré, le recours à l’armée est systématique dès lors que les tensions sociales s’exacerbent. Force est de constater que ces dernières années, en France les budgets militaires et sécuritaires ont progressé plus significativement que les budgets à finalité sociale. (Macron s’est engagé à augmenter le budget des armées à 413 milliards d’euros sur sept ans).

(A suivre…)
Khider Mesloub

 

 

 

 

L’investissement est observable dans l’augmentation des effectifs policiers et l’accroissement des équipements sécuritaires, fréquemment et massivement mobilisés ces dernières années, en particulier sous la présidence répressive de Macron. Comme on l’avait relevé lors du mouvement des Gilets jaunes, victime d’une impitoyable répression policière.
En effet, au cours de ces opérations de répression contre les Gilets jaunes, outre l’usage inattendu de blindés militaires pour réprimer les manifestants, le gouvernement Macron appela en renfort l’armée pour suppléer les forces policières dans le maintien de l’ordre. Nul doute, le 8 décembre 2018, à Paris, la répression fut exceptionnellement violente. Selon le journal Le Monde daté du 7 décembre 2019, lors de cette manifestation, le commandement des CRS s’adressa à ses troupes en ces termes : « Si vous vous demandez pourquoi vous êtes entrés dans la police, c’est pour un jour comme celui-ci ! Vous pouvez y aller franchement, allez-y franchement, n’hésitez pas à percuter ceux qui sont à votre contact, à proximité… Ça fera réfléchir les suivants ». Cette sinistre philippique fait écho à celle de l’écrivain Edmond de Goncourt proférée lors de l’écrasement des Communards : « les saignées comme celle-ci, en tuant la partie bataillante d’une population, ajournent d’une conscription la nouvelle révolution. C’est vingt ans de repos que l’ancienne société a devant elle. » Cette philippique sentencieusement assassine fait également écho à celle du président Charles de Gaulle (et non au lampiste Maurice Papon) prononcée probablement lors de la réunion ministérielle tenue à la veille de la Manifestation du 17 octobre 1961, le jour où les policiers, assurés de l’impunité, massacrèrent des centaines d’Algériens, blessèrent des milliers d’autres. Soit dit au passage, selon les deux historiens anglais, Jim House et Neil Mac Master, les massacres commis le 17 octobre 1961, sous la présidence de Gaulle, constituent « dans toute l’histoire contemporaine de l’Europe occidentale, la répression la plus violente et la plus meurtrière qu’ait jamais subi une manifestation de rue désarmée ». Cela expliquerait pourquoi les successifs gouvernants français (de gauche comme de droite) s’appliquèrent, jusqu’à une date récente, par une omerta institutionnelle doublée d’une censure historiographique, à occulter des mémoires cette sombre page de l’histoire de la France, ce monumental crime d’État. Quoi qu’il en soit, la répression meurtrière du 17 octobre 1962, comme celle du 8 février 1962 du métro Charonne, s’inscrivit dans le prolongement de la politique répressive sanguinaire décrétée sous le gouvernement socialiste des Guy Mollet et Mitterrand, qui avaient octroyé les pleins pouvoirs aux autorités militaires stationnées en Algérie, notamment au général Massu, responsables des actes de torture systématiques et des milliers d’exécutions. Et dans le prolongement du massacre de masse perpétré le 8 mai 1945 à Sétif, Guelma et Kherrata. Et dans le prolongement de l’écrasement sanguinaire de la révolte d’El Mokrani de 1871, et dans le prolongement des enfumades des années 1840… La liste des répressions, tortures et massacres de masse de l’État français est impossible à chiffrer tant elle est incommensurable.
Il est utile de souligner que les méthodes sanguinaires employés par l’État français révèlent le véritable visage de la classe dominante française, l’imposture de la démocratie bourgeoise, l’hypocrisie de l’idéologie des droits de l’Homme au nom desquels la bourgeoisie française massacre démocratiquement des peuples, ses citoyens récalcitrants.
Par ailleurs, pour revenir à notre époque toujours autant marquée par la répression et le despotisme activement prospères sous le gouvernement Macron, deux activités étatiques qui ne connaissent pas la crise, on pourrait ajouter cette observation : les confinements pénitentiaires meurtriers et la militarisation de la société sur fond de restrictions des libertés individuelles et collectives, décrétés lors de la pandémie de Covid-19 par Macron contre les populations délibérément infantilisées et criminalisées, avaient pour dessein de vacciner ces populations de leurs ataviques prédispositions subversives virales, pour des décennies, notamment par la terreur inoculée dans le corps social ordinairement rebelle. Mais cette tentative d’éradication du virus de la révolte était vaine. Les mouvements de révolte ne viennent-ils pas de reprendre avec une intensité accrue, une puissance de propagation qui dépasse de loin celle de l’épidémie du coronavirus ? Chaque français est désormais affecté par le virus de la rébellion, qu’aucun vaccin coercitif ou répressif ne peut endiguer.
De manière générale, ces récentes années, au pays des droits de l’Homme, lors des manifestations, systématiquement les forces de l’ordre utilisent des LBD (les lanceurs de balle de défense), véritables armes de guerre. En effet, dans la France « démocratique », cette arme létale de maintien de l’ordre fut adoptée par la police en 1995 pour éviter les traditionnelles interactions physiques, symbolisés par les confrontations (le corps à corps) entre forces de l’ordre et manifestants, aux fins d’épargner les policiers des risques de blessures graves ou létales liés aux opérations de neutralisation directes.

Usage massif des LBD, armes létales, contre les manifestants

C’est d’ailleurs l’argument avancé par l’État pour légitimer la généralisation de cette arme (létale), permettant aux policiers d’attaquer les manifestants à distance, au moyen de ces lanceurs de « balles létales » et des « grenades de désencerclement », sans encourir aucun risque au cours de leurs opérations répressives.
Le LBD, ressemblant à un fusil, possède la précision d’une arme de guerre. L’usage de cette arme peut présenter à courte distance des effets traumatiques pouvant entraîner des lésions graves irréversibles, voire létales. À l’origine, le LBD était initialement employé par les policiers de la BAC (Brigade anticriminalité) patrouillant dans les quartiers populaires de banlieue, ces cités dortoirs où sont parquées les classes populaires assimilées aux classes dangereuses. Après expérimentation sur les populations paupérisées, souvent issues de l’immigration postcoloniale, notamment algérienne, l’usage de cette arme de guerre fut généralisé, banalisé, « démocratisé », puisqu’elle fut ensuite massivement utilisée lors des répressions policières contre les manifestants pour pacifier leurs ardeurs revendicatives, leur apprendre la docilité, l’obéissance, la soumission.
Désormais, dans la France de Macron, aussi bien dans les manifestations que dans les quartiers populaires, la police n’hésite plus à utiliser cette arme de guerre contre la foule dans ses opérations de contention ou de neutralisation. Car les LBD ont pour caractéristique d’induire une véritable logique de guerre. Cet arsenal a pour vocation de mutiler et de terroriser la population turbulente ou révoltée.
Ces dernières décennies, en France les répressions policières se sont étendues des marges de la société turbulente et insurgée à la population civile pacifique. Particulièrement vrai lors des mobilisations populaires revendicatives, toujours en pleine expansion du fait de l’accentuation de la crise économique et du durcissement autoritaire du gouvernement Macron.
Cependant, même en temps ordinaire, les exactions et brutalités policières sont devenues fréquentes, notamment lors des récurrentes interpellations musclées, illustrées par les techniques de neutralisation militaires extrêmement violentes, symbolisée par la technique dite de la clé d’étranglement respiratoire ou sanguin et le plaquage ventral, employée ordinairement par les policiers et les gendarmes.
Ces techniques d’arrestation sont régulièrement responsables de centaines de « bavures policières », ces crimes institutionnalisés couverts par la Police des polices (institution policière opaque en charge de la protection de leurs frères d’arme, les voyous policiers) et la Justice, cette autre institution de classe au service des classes possédantes. À cet égard, le 25 mai 2021, pour garantir une totale impunité policière, en France le gouvernement Macron fit adopter par le Parlement une loi dite « sécurité globale » visant à interdire la diffusion d’images de policiers dans l’exercice de leurs « pacifiques fonctions de maintien de l’ordre », assurée, comme tout le monde le sait, dans le respect des citoyens et des manifestants. Au vrai, cette Loi « sécurité globale » vise à couvrir les violences et bavures policières par l’interdiction faite aux journalistes comme à tout « citoyen » de filmer les visages des policiers tabasseurs. Selon ce texte de loi machiavélique, ces films et ces photos pourraient mettre en danger les policiers accomplissant humainement leur « devoir » de répression. Et tout contrevenant sera condamné à 45 000 euros et un an de prison. Dans la « France démocratique » de Macron, loi constitue désormais un véritable blanc-seing accordé aux policiers, leur permettant ainsi de réprimer en toute invisibilité et impunité.

La banalisation de la répression policière

Aussi, en France, assistons-nous à la banalisation de la répression, à la généralisation des violences policières. Ces exactions et brutalités policières ne sont en rien une exception. En France, les contrôles et interpellations de la police « démocratique », notamment contre les jeunes ou les immigrés, s’effectuent quotidiennement avec des méthodes vexatoires et avilissantes, dans le mépris de la loi et de la personne, assorties des coutumières insultes racistes et propos humiliants.
Certes, initialement, les répressions policières violentes s’étaient exercées, en guise d’expérimentation et d’entraînement, uniquement contre les marges de la société, les couches pauvres des cités populaires, notamment contre les jeunes livrés à eux-mêmes, sans emploi ni perspective d’insertion professionnelle, horizon devenu, aujourd’hui, en France la norme. Cependant, avec l’aggravation de la crise économique et sociale sur fond de précarisation et de paupérisation des classes moyennes désormais en pleine prolétarisation mais, également, régulièrement en pleine agitation sociale, ces répressions se sont étendues de plus en plus à l’ensemble de la population laborieuse fréquemment mobilisée pour protester contre la dégradation de ses conditions de vie et de travail.
Ainsi, en France, après avoir sévi longtemps contre les manifestations politiques et les quartiers populaires en ébullition, les répressions policières se sont généralisées à toute la « société civile » mobilisée dans les mouvements sociaux. Elles s’abattent désormais sans distinction sur tous les rassemblements et manifestations, quel que soit le but des revendications. Comme on l’observe actuellement à la faveur des mobilisations contre la réforme des retraites.
Ainsi va la société sécuritaire française, fondée sur une insécurité sociale et économique généralisée. Incapable de nourrir sa population paupérisée, le gouvernement Macron est réduit à la nourrir de terreur, de matraques et de LBD, de restrictions de ses libertés et de répressions généralisées.

Quoi qu’il en soit, le renforcement de l’usage de la force contre les manifestants est un aveu de faiblesse de la bourgeoisie française sénile, incapable de perpétuer le règne de sa domination sans répression systématique. Avec l’approfondissement de la crise économique et sociale doublée de son lot de chômage et de misère, le gouvernement Macron n’ignore pas que les prolétaires ne demeurent jamais inactifs. Leur imminente riposte sera à la hauteur de leur détresse sociale : radicale. Dans un article publié par l’hebdomadaire Challenges, ce média rapporte la terreur qu’inspire au président Macron la crise multidimensionnelle actuelle : « L’exécutif est tétanisé par le risque d’explosion sociale », écrit Challenges. De là s’explique le durcissement autoritaire du pouvoir, le récent « tournant répressif » du gouvernement Macron.
Au reste, le régime macronien a profité de la pandémie de Covid-19 pour accentuer son volet répressif dans les quartiers, les espaces publics, les transports. Et contre les manifestations. À cet égard, il est important de rappeler qu’entre 2015 et 2022, la population française aura été soumise au régime de l’état d’urgence plus de la moitié de ces six années. Preuve de la militarisation de la société française, illustrée avec la gestion sécuritaire de la crise sanitaire : dès l’apparition de la pandémie, Macron avait érigé le Conseil de défense (où siègent des généraux) en organe de direction politique de la gestion de la crise, transformant le Conseil des ministres en simple instance de figuration, et l’Assemblée nationale en simple chambre d’enregistrement (aujourd’hui chambre de figuration, à observer le rythme effréné de lois votées par le recours au despotique 49.3, ce dispositif dictatorial « constitutionnel » dégainé systématiquement par le cow-boy Macron, ce vacher du Capital atlantiste, aussi prompt à user de l’arme coercitive et répressive pour faire plier « son peuple » que l’arme exécutive 49.3 pour neutraliser l’Assemblée nationale.
Avec la loi « sécurité globale », les institutions étatiques disposent désormais d’instruments technologiques sophistiqués pour intensifier le contrôle de la population française, dignes des pays totalitaires comme la Chine. Cette loi « sécurité globale » va permettre la généralisation de technologies de surveillance, notamment par la densification du quadrillage des populations grâce à la mobilisation de drones, l’usage massif de caméras et de technologies de reconnaissance faciale. Symptomatique de la tournure despotique du régime français, même l’ONU, ordinairement chargée à se prononcer sur les violations des droits humains dans les pays dictatoriaux, a déclaré que la Loi globale est « incompatible avec le droit international des droits de l’Homme ».
De toute évidence, les mois de confinement avaient constitué un terrain d’expérimentation idéal à la militarisation de la société française. En effet, les périodes de confinement totalitaire furent accompagnées d’un durcissement autoritaire du comportement de la police. Ces multiples confinements pénitentiaires dessinèrent les prémices de la future société spartiate fondée sur le triptyque « boulot, métro/auto, dodo », sur fond de limitation stricte des droits de circulation, de manifestation et de réunion des personnes, voués à se généraliser et pérenniser en France.

La France de Macron : système militaro-sécuritaire construit sur la rente impérialiste

Dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire et la proposition de loi sécurité globale, la dérive autoritaire du gouvernement Macron devient flagrante. Le gouvernement français ne dissimule plus ses projets liberticides : trois décrets furent publiés en décembre 2020 permettant le fichage des personnes en raison de leurs « opinions politiques, des convictions philosophiques, religieuses ou une appartenance syndicale », décrets entérinés par le Conseil d’État le 4 janvier 2021. Ainsi, la police et la gendarmerie pourront ficher les opinions politiques, les convictions philosophiques, religieuses, l’appartenance syndicale et données de santé au nom de la « sûreté de l’État ». Le spectre de Big Brother est ressuscité, symbole de l’État totalitaire et du contrôle drastique des libertés et de la vie privée, dont la devise est « Big Brother is watching you » (« Big Brother vous regarde »). Bienvenue dans la France despotique de Macron. Le scénario du futur drame de la France pourrait s’intituler : Silence, on vous surveille ! Motus, on vous réprime !
En tout état de cause, la crise sanitaire tout comme le confinement constituèrent, plus qu’un révélateur, un aggravateur des clivages sociaux. Et la loi sur le séparatisme, intervenue dans une période de crise économique et sociale aiguë, n’est pas innocente : elle permet de diviser le front des exploités (du prolétariat de France d’origine et d’obédience diverse), de jeter à la vindicte populeuse raciste les « citoyens » d’origine étrangère, les populations de confession musulmane.
Force est de constater que la militarisation de l’État français s’explique par sa crainte d’une explosion sociale, et non par les menaces (fantasmagoriques) terroristes islamistes (par ailleurs politiquement instrumentalisées par le pouvoir). Actuellement, en France, la militarisation de la société se manifeste par l’armement des polices municipales (véritables milices), le suréquipement des forces de l’ordre, la multiplication des caméras de vidéos surveillance dans les lieux publics, la modernisation de tout l’arsenal répressif : armes, blindés, renseignements. En l’espèce, pour la bourgeoisie française décadente apeurée, dans un contexte de tensions sociales accrues, il s’agit de l’adaptation de son appareil répressif aux futures imminentes luttes sociales, affrontements de classes.
Sans nul doute, avec l’aggravation de la crise économique, l’augmentation exponentielle de la misère et du chômage, le prolétariat et ses jeunes générations sacrifiées n’auront pas d’autre choix que de s’engager dans la lutte pour défendre leurs conditions de vie et de travail dramatiquement dégradées, comme on le constate avec la relance du mouvement de lutte actuel. Immanquablement, ces prolétaires se heurteront, lors des manifestations et protestations, aux forces de l’ordre de l’État.
C’est dans cette perspective d’affrontements de classe qu’il faut inscrire la politique d’augmentation exponentielle des budgets de la police et de l’armée.
Après la phase de militarisation de la répression exécutée avec des instruments de neutralisation technologiques rudimentaires, l’État français rentre désormais dans la phase de la répression militaire opérée avec des moyens matériels et humains exceptionnellement sophistiqués et meurtriers.

Khider Mesloub