La grandeur et la pertinence du mois sacré du Ramadhan

Islam

Par Mohamed Chtatou

Le jeûne est lié à la nature de l’être humain telle qu’elle est enseignée dans le Saint Coran. L’être humain, dans le Saint Coran, consiste en une entité d’essence matérielle et une entité d’essence spirituelle. Comme une statue, faite de matière et de forme, l’être humain est la conjonction des cellules de son corps et des valeurs de son âme.

On estime que si une personne donne ne serait-ce qu’une petite somme pendant ce mois, elle recevra 70 fois plus de bénédictions en retour.

Réforme de soi et autodiscipline
Le jeûne est un processus élaboré d’auto-réforme et d’autodiscipline qui implique un large éventail de responsabilités de la part de ceux qui l’observent. Il permet également de renforcer les pouvoirs de maîtrise de soi, de s’abstenir des impulsions naturelles de l’homme en exerçant sa capacité de retenue, ce qui conduit à l’amélioration de soi. Sur le plan spirituel, il permet d’atteindre la proximité de Dieu. C’est une forme d’auto-formation dans l’espoir que ces qualités se prolongent au-delà de ce mois et restent présentes chez le fidèle tout au long de l’année.Sur le plan psychologique, c’est la croyance que ce processus d’un mois est le meilleur instrument pour façonner le comportement de ses pratiquants afin qu’ils deviennent des êtres humains idéaux. Cela implique essentiellement que la personne qui observe le jeûne ne se contente pas de s’abstenir de manger et de boire, mais qu’elle se met dans un état d’esprit sublime afin de développer des sentiments positifs. Par conséquent, le jeûne renforce le contrôle des impulsions et aide à développer un bon comportement. Cette purification de l’âme et du corps harmonise les sphères intérieure et extérieure d’un individu. L’observance conduit à un sentiment de paix intérieure et de tranquillité, si nécessaire pendant la période d’enfermement.
En outre, il faut s’abstenir d’écouter, de parler, d’entendre ou de penser négativement à propos des autres. Si l’on applique une telle retenue et que l’on passe par ce processus d’auto-purification pendant une période d’un mois, on s’attend à ce que son impact dure au moins pendant les 11 mois restants, lorsque ce processus est répété à nouveau. Malheureusement, nous considérons qu’il ne s’agit que d’un jeûne physique et nous ne nous efforçons pas d’atteindre ce que l’on attend de ce grand et important mois.
Le ramadan est synonyme de maîtrise de soi et de retenue, comme l’indique Anisa Mehdi dans Forbes : vi “Quel que soit l’endroit où se trouve le musulman qui jeûne, le ramadan est un appel à un cessez-le-feu spirituel et physique interne. Le but du jeûne est d’adorer le Divin en faisant preuve de contrôle sur les désirs terrestres – généralement la nourriture, la boisson, le tabac et le sexe – pendant les heures de la journée. C’est aussi l’occasion de faire preuve des valeurs de la “grande route”, c’est-à-dire d’être gracieux, généreux et doux envers les autres, même si l’on est de mauvaise humeur ou irrité, surtout lorsque le taux de glycémie chute et que la bouche est trop sèche pour parler. La combinaison de la conscience de soi physique et spirituelle est un test de caractère : Lorsque votre estomac grogne de faim, allez-vous vous en prendre à votre enfant difficile ? Votre voisin irréfléchi ? Un collègue négligent ? Le conducteur rustre qui vous a coupé la route ? Ou resterez-vous paisible, pratiquant la patience et la bienveillance que vous vous êtes promis à vous-même et à votre Créateur ? C’est une pratique, pleine de découvertes et de reconnaissances de l’imperfection et abondante d’occasions de demander pardon et de réessayer. “

Le Ramadan à l’heure de la pandémie
Pendant Ramadan, les mosquées sont une composante essentielle qui meuble le quotidien durant ce mois de recueillement où le jeûne et la mosquée font bon ménage dans l’imaginaire collectif des musulmans, comme en témoigne leur engouement pour les maisons de Dieu à l’occasion des cinq prières mais aussi pour celles des Tarâwih. Un enthousiasme qui déborde chaque année les mosquées et leurs esplanades, voire les agrandissements de fortune installés pour accueillir les nombreux fidèles.
Cependant, cette année, ceux qui ont l’esprit attaché à la prière collective se demandent à quoi ressemblera un Ramadan sans les rassemblements dans les mosquées, derrière les imams, les jours de la prière du vendredi, des Tarâwih et de Laylat al-Qadr. Ces questions ont été examinées par les oulémas avec beaucoup de sagesse et de recul, conformément aux préceptes de la charî’ah islamique qui régissent la vie des musulmans en temps de paix comme en temps de guerre, pendant les périodes de sécurité comme dans les situations de peur et de calamité.
Alors que les gouvernements musulmans ont réagi à la crise sanitaire sans précédent avec vigilance et fermeté afin d’empêcher la propagation de la pandémie, les conseils suprêmes des oulémas de plusieurs pays et communautés musulmanes ont émis des fatwas recommandant la fermeture temporaire des mosquées et la suspension de la prière collective jusqu’à ce que la situation revienne à la normale, conformément à la chari’ah, qui appelle à protéger le corps et à placer l’intérêt au-dessus du préjudice.S’appuyant sur les principes de facilité et de miséricorde prônés par la religion musulmane, la fermeture des mosquées ne signifie pas l’arrêt des prières et de la récitation coranique, tant que les fidèles peuvent les faire de leurs maisons.

En Islam, il y a deux genres de prière :
Prières obligatoires ou canoniques qui sont faites à la mosquée sauf dans le cas de maladie du fidèle ou de crise sanitaire (pandémie) ; et
Prières surérogatoires vii ou prières additionnelles non-obligatoires viii qu’il est préférable de faire à la maison mais qu’on peut aussi faire à la mosquée selon le Prophète (psl), le cas échéant.
Il a été rapporté par Zayd ibn Thabit que le Messager d’Allah (que la paix et les bénédictions d’Allah soient sur lui) s’est fabriqué une logette – faite d’une natte de roseau – pendant le Ramadan, dans laquelle il priait la nuit. Certains de ses compagnons priaient derrière lui, et lorsqu’il réalisa qu’ils étaient là, il alla vers eux et leur dit : ix” Je sais combien vous tenez à prier derrière moi. Ô gens, priez dans vos maisons, car la meilleure des prières est celle d’un homme dans sa maison, en dehors des prières prescrites.” Il a été rapporté, également, par Ibn Omar que le Prophète (que la paix et les bénédictions d’Allah soient sur lui) a dit : x “Accomplissez certaines de vos prières dans vos maisons et n’en faites pas des tombes. “ Sur ce point particulier, Al-Haafiz ibn Hajar a dit : xi “Le sens apparent est que cela inclut toutes les prières naafil, car ce que l’on entend par les prières prescrites sont les prières obligatoires. Mais on peut l’interpréter comme faisant référence à toutes celles pour lesquelles il n’est pas prescrit de les offrir en congrégation et celles qui ne doivent pas être offertes spécifiquement dans la mosquée, comme les deux rak’ahs pour “saluer la mosquée”.” Ainsi, la pandémie du Covid-19 offre l’occasion de mieux comprendre l’objectif des rites et des pratiques de dévotion qui ne se limitent pas aux manifestations sociales de la religion, mais font appel à l’essence de la religion. Dans ce contexte, les oulémas ont souligné qu’à l’origine, le principe des Tarâwîh est qu’elles sont accomplies dans les maisons, comme le recommande le Hadith authentique du Prophète cité plus haut. Les Tarâwîh dans les mosquées ont été autorisées pour aider les négligents à s’habituer aux prières à temps pour se rapprocher de Dieu. Le Prophète, paix et bénédictions d’Allah soient sur lui, n’a pas fait de l’accomplissement collectif des Tarâwih une obligation. Cette prière était accomplie individuellement à l’époque d’Abu Bakr as-Siddiq avant qu’elle ne commence à être accomplie collectivement sous Omar Ibn al-Khattab.Par ailleurs, l’avènement du Ramadan dans ces circonstances est un test de détermination, de mobilisation et de réévaluation des concepts, ainsi qu’une opportunité pour remercier, par geste d’autocontrôle, ceux qui ont travaillé dur, chacun de son poste, pour contrôler la propagation de la pandémie, et qui l’ont fait avec abnégation, patience et persévérance.

Conclusion
Différents types de jeûne (siyâm) sont présents en Islam. Les jeûnes à caractère expiatoire réparent une faute commise. Il y a ceux qui remplacent un devoir religieux que l’on est incapable d’accomplir. Et les jeûnes qui sont pratiqués volontairement dans le cadre d’une ascèse. Le jeûne du Ramadan est différent de ceux-ci, car il est au fondement même de l’Islam en tant que religion. Il est institué comme une manifestation d’hommage à Dieu et revêt donc un caractère sacré, obligatoire et festif.Le jeûne accroît la dévotion et rapproche le musulman du Créateur. Il permet de reconnaître que tout ce que nous avons dans cette vie est une bénédiction de Dieu. Il enseigne la maîtrise de soi, la retenue, les bonnes manières, la bonne parole et les bonnes habitudes.De grands mérites et de grandes récompenses – tant physiques que spirituels – peuvent être tirés du jeûne. L’effet physiologique du jeûne comprend la réduction de la glycémie, du cholestérol et de la pression artérielle systolique. En fait, le jeûne du Ramadan serait une recommandation idéale pour le traitement du diabète léger à modéré, stable et sans insuline, de l’obésité et de l’hypertension essentielle. Comme il est dit dans le Saint Coran, Allah promet le pardon et une grande récompense à une personne qui jeûne (Saint Coran, 33 : 35) :“Certes, les hommes qui se soumettent (à Allah) et les femmes qui se soumettent (à Allah), les hommes qui ont la foi et les femmes qui ont la foi, les hommes qui sont obéissants et les femmes qui sont obéissantes, les hommes qui sont véridiques et les femmes qui sont véridiques ; les hommes qui sont constants et les femmes qui sont constantes, les hommes qui s’humilient (à Allah) et les femmes qui s’humilient (à Allah), les hommes qui font l’aumône et les femmes qui font l’aumône, les hommes qui jeûnent et les femmes qui jeûnent, les hommes qui gardent leur chasteté et les femmes qui gardent leur chasteté, les hommes qui se souviennent beaucoup d’Allah et les femmes qui se souviennent beaucoup d’Allah : pour eux, Allah a préparé le pardon et une puissante récompense. “Et lorsque l’on combine ces actes méritoires tels que la prière, le jeûne et la charité (trois des cinq piliers de l’Islam) pendant le mois de Ramadan, qui est décrit comme un mois de bénédiction lorsque le Saint Coran a été révélé, Allah promet d’immenses récompenses. xii Mohammed (psl), le Messager d’Allah a dit : xiii “Celui qui observe le jeûne pendant le mois de Ramadan par foi sincère et dans l’espoir d’obtenir les récompenses d’Allah, alors tous ses péchés passés seront pardonnés.”
M.CH
(Suite et fin)