Droits de l’Homme et liberté de la presse Le deux poids deux mesures du Parlement européen

Le Parlement européen a voté, jeudi 11 mai dernier, une résolution sur «le respect des droits humains» en Algérie, adoptée par la gauche, les Verts, le groupe S&D, Renew, le PPE, le groupe ECR, «demandant instamment – nous citons – aux autorités algériennes de libérer immédiatement toutes les personnes détenues arbitrairement et inculpées pour avoir exercé leur droit à la liberté d’expression, y compris le célèbre journaliste Ihsane El-Kadi, qui a été condamné en avril à une peine de cinq ans de prison et à de lourdes amendes pour des accusations infondées liées au fait qu’il aurait reçu des fonds pour propagande politique et atteinte à la sécurité de l’Etat.»

«La résolution appelle les autorités algériennes à modifier les accusations liées à la sécurité dans le Code pénal utilisées pour criminaliser le droit à la liberté d’expression. La résolution dénote que, depuis les manifestations dites du Hirak en 2019, la situation de la liberté de la presse s’est considérablement dégradée en Algérie, les autorités bloquant de plus en plus de sites d’information et de publications critiques à l’égard du gouvernement». «Le Parlement demande instamment à toutes les institutions de l’UE et aux Etats membres de condamner ouvertement la répression de la liberté de la presse en Algérie, tout en appelant la délégation de l’Union et les ambassades des pays de l’UE à demander l’accès aux journalistes emprisonnés et à assister aux procès. Enfin, les députés veulent que les autorités algériennes garantissent l’autorisation de visa et d’accréditation aux journalistes étrangers, ainsi que leur liberté d’exercer». Cette résolution a été adoptée par 536 voix pour, 4 contre et 18 abstentions.
Nous avons cité délibérément la résolution telle qu’elle est parue sur le site du Parlement européen pour bien montrer à quel point ces eurodéputés se croient en droit de donner leurs directives à des pays tiers. La dernière phrase «les députés veulent que les autorités algériennes garantissent l’autorisation de visa et d’accréditation aux journalistes étrangers (…) démontre clairement que ces gens n’éprouvent aucune difficulté à poser des exigences à des Etats qui ne font pas partie de l’Union européenne. C’est absolument sidérant et cela démontre que l’Europe n’en a pas fini avec sa vieille mentalité coloniale. Bien entendu, la réaction de l’Algérie ne s’est pas fait attendre. Le Parlement et le Sénat ont réagi vigoureusement devant cette ingérence manifeste dans les affaires intérieures du pays, suivis par de nombreuses voix qui se sont élevées contre cette immixtion arrogante dans nos affaires internes. Le Parlement arabe au Caire et le Parlement panafricain ont aussi exprimé leur rejet et, pour faire court, ont conseillé à leur homologue européen de se mêler de ses affaires et de ne pas politiser les questions des droits de l’Homme à des fins d’ingérence.

Julian Assange : pas de résolution, Messieurs les députés du Parlement européen ?
Plutôt que de prendre la défense d’un El-Kadi Ihsane qui a été jugé selon le Code pénal algérien et qui a été condamné en fonction de ce qui lui était reproché, à savoir recevoir de l’argent d’un pays étranger, ce type qui a mangé à tous les râteliers, voire tout le râtelier, avec ses maîtres, allant des oligarques aujourd’hui en prison au terrorisme islamiste, en passant par le MAK, a diffusé de la propagande antinationale. Il n’est ni un Mandela ni un Che Guevara, il est un ex-trotskyste devenu néolibéral servant les intérêts de l’Empire, le Navalny ou le Guaido algérien. Il appartient à la 5e colonne avec d’autres que nous combattrons toujours. Par contre, on aimerait bien savoir quelles sont les résolutions de ce Parlement européen en faveur du journaliste Julian Assange qui dépérit dans une cellule en isolement dans la prison de haute sécurité de Belmarsh, en Grande-Bretagne, dans des conditions pires que celles réservées aux véritables terroristes, alors que toute l’affaire montée contre lui est une mascarade mal ficelée, et que sa santé se détériore jour après jour. Or, Julian Assange n’a pas reçu d’argent de cercles occultes. Alors, Mesdames et Messieurs les députés européens, à part une proposition de résolution en mai 2022 pour vous procurer bonne conscience et qui n’a abouti à rien, qu’avez-vous l’intention de faire pour réclamer la libération de Julian Assange ? Voilà une lutte qui vaut la peine d’être menée pour les chantres de la liberté d’expression et des droits de l’Homme que vous prétendez être. C’est chaque jour qu’il faudrait battre le tambour pour alerter le monde sur la façon ignoble dont l’Occident traite un journaliste ! Quant à votre protégé El-Kadi Ihsane, nous vous rassurons tout de suite, il est beaucoup mieux traité que Julian Assange qui est en train de mourir à petit feu dans une prison occidentale «démocratique».

Et les opposants en Ukraine ? Et les journalistes de RT ? Et Mumia
Abu Jamal ?
Vous êtes-vous jamais inquiétés du sort du journaliste Mumia Abu Jamal reclus à perpétuité depuis 1982 aux Etats-Unis alors qu’il est innocent ? Vous parlez de liberté d’expression, combien de journalistes ont-ils été virés des rédactions occidentales pour avoir livré une information non conforme au discours dominant ? Vous êtes-vous préoccupés du sort des journalistes de RT qui ont été mis au chômage suite à la censure qui a frappé cette chaîne entraînant sa fermeture ? Avez-vous pondu une résolution pour protéger la liberté d’expression contre cette décision qui n’a rien à envier aux différents régimes fascistes que votre Europe a engendrés depuis le siècle passé ? Où sont vos résolutions pour défendre la presse et les partis d’opposition en Ukraine qui ont été interdits et dont beaucoup de journalistes et militants ont été arrêtés, torturés, voire carrément liquidés ?

Et la liberté d’expression au Maroc, il en est quoi ?
Qu’en est-il d’une résolution contre le Maroc par rapport aux traitements inhumains infligés aux journalistes sahraouis par l’entité voyou du Maroc ? Expliquez-nous donc pourquoi vous n’avez jamais jugé utile de pondre une résolution en faveur des journalistes et militants sahraouis qui croupissent dans les prisons marocaines depuis des années et qui y subissent la torture, ni la façon brutale dont les manifestations sahraouies sont réprimées. Vous ne vous inquiétez pas non plus du sort du journaliste et militant sahraoui Taleb Alisalem qui, bien que vivant en Espagne, reçoit des menaces de mort quotidiennes. Pourtant, vous avez vos propres outils pour vous tenir informés, dont votre champion en matière des droits de l’Homme, à savoir Amnesty International.

Voyons donc son rapport 2022/23 sur le Maroc et le Sahara occidental : « (…) Les téléphones de la défenseure sahraouie des droits humains Aminatou Haidar avaient été ciblés et infectés par le logiciel espion Pegasus de la société NSO Group. Les autorités ont fait un usage excessif de la force pour disperser des manifestations pacifiques à au moins deux reprises, notamment lors de mouvements pour de meilleures conditions de travail pour les enseignants et pour la défense des droits des Sahraouis. Plusieurs participants ont été arrêtés. Les manifestations de militants sahraouis au Sahara Occidental ont été violemment réprimées. En avril, des policiers ont été roué de coups de poing et de pied l’étudiant en journalisme Abdelmounaim Naceri jusqu’à ce qu’il perde connaissance. Il était en train de filmer un sit-in organisé par de jeunes Sahraouis devant la préfecture de Smara, une ville du Sahara Occidental, pour protester contre les conditions sociales. Toujours en avril, les autorités locales de la ville de Laâyoune, également au Sahara Occidental, ont refusé d’autoriser l’enregistrement du bureau exécutif nouvellement élu de l’Association sahraouie des victimes de graves violations des droits de l’Homme commises par l’Etat marocain (ASVDH) au motif qu’elle faisait obstruction au travail des administrations publiques.
A suivre…
Mohsen Abdelmoumen