« Il était un fervent amoureux de son pays l’Algérie »

Hommage à Pierre Audin, décédé à l’âge de 66 ans

Pierre Audin, le fils de Josette et Maurice Audin, tous deux défenseurs de la cause algérienne, est décédé dimanche dernier à l’âge de 66 ans des suites d’une longue maladie a-t-on appris dans un communiqué transmis par l’association Josette et Maurice Audin.C’est avec une immense tristesse que nous annonçons le décès de notre ami Pierre Audin, survenu ce dimanche 28 mai 2023, des suites d’un cancer. Commencent les rédacteurs du communiqué avant de poursuivre « la vie de Pierre aura été consacrée au combat incessant, aux côtés de sa mère Josette, pour que soit dite toute la vérité sur les circonstances de la disparition de son père, Maurice Audin, mathématicien et militant actif du Parti communiste algérien. Engagé sans réserve pour l’indépendance de l’Algérie, il fut enlevé le 11 juin 1957 à Alger, puis torturé et tué par les militaires français. Ce combat, qui concernait aussi les milliers d’autres Algériennes et Algériens qui ont subi le même sort, est devenu emblématique de la lutte contre la torture et les exactions commises au nom du« maintien de l’ordre » et de la « pacification ».
Avec sa mère Josette et sa sœur Michèle, Pierre aura dû attendre septembre 2018, soit plus de 61ans après les faits, pour savourer une première victoire, lorsque le président de la République française a rendu visite à Josette Audin à son domicile et reconnu la responsabilité de l’État français dans la mort de son mari, rendue possible « par un système légalement institué qui a favorisé les disparitions et permis la torture à des fins politiques ». Mais de nombreuses questions subsistaient et Pierre Audin avait continué sans relâche sa lutte pour qu’il y soit également répondu.
Quelles ont été les circonstances exactes de la disparition de Maurice Audin ? Où se trouvent son corps et ceux des nombreux combattants pour l’indépendance de l’Algérie et civils victimes de disparitions forcées ? Quand les historiens pourront-ils enfin accéder sans entraves à toutes les archives, sur ce sujet et sur tous les autres ?
L’Association Josette et Maurice Audin est plus que jamais déterminée à poursuivre cette quête pour que toute la lumière soit faite sur « l’affaire Audin » et sur tous les crimes commis à l’époque coloniale au nom de l’État, en Algérie comme en France.
Pierre Audin était Algérien et Français. Il avait été très fier d’obtenir enfin il y a un peu plus d’un an le passeport algérien qui lui était promis depuis longtemps. À chacun de ses nombreux voyages en Algérie, il était reçu avec une ferveur populaire extraordinaire. Le rassemblement sur la Place Audin à Alger, il y a exactement un an, pour l’inauguration d’un buste de Maurice Audin, en est le témoignage le plus récent.
La vie de Pierre aura aussi été marquée par sa passion pour les mathématiques et son désir de permettre au plus grand nombre l’accès à la culture scientifique, langage universel, lien entre les peuples et emblème de la liberté. Il a magnifiquement mis en pratique ses idées dans ce domaine en passant la plus grande partie de sa carrière au Palais de la Découverte, où il a communiqué son enthousiasme à des générations de jeunes et moins jeunes.
Il a aussi, autant qu’il a pu, porté ce message en Algérie où, à chaque occasion, il a captivé, avec un humour communicatif, des auditoires divers. Le développement de la coopération scientifique entre la France et l’Algérie lui tenait particulièrement à coeur. Il a conçu dans ce but un projet consacré à la médiation scientifique. Il s’agit de contribuer à la création en Algérie d’un réseau de centres de culture scientifique couvrant tout le pays et coordonnés par un centre national, ainsi que d’une formation universitaire de médiateurs scientifiques. » Les rédacteurs (trices) dudit communiqué précisent que « Pierre Audin agissait aussi depuis longtemps pour la coopération franco-algérienne en matière de recherche en mathématiques. Il a activement participé à la création du Prix de mathématiques Maurice Audin et à son maintien, contre vents et marées, au fil des années. La pérennisation de ce prix, auquel il était tant attaché, deviendra très probablement une réalité dans les tous prochains mois, grâce aux efforts conjugués des responsables algériens de la recherche et de l’enseignement supérieur, de l’Académie des sciences, des sociétés savantes de mathématiques et de notre association. » Tout en poursuivant : « Dans ces domaines également, l’Association Josette et Maurice Audin entend poursuivre les actions de Pierre et espère les voir se concrétiser très rapidement. Comme celui de Maurice et de Josette Audin, le souvenir de Pierre sera un guide pour l’Association Josette et Maurice Audin, qui poursuivra sans relâche les actions qu’il menait sur tous les fronts.
Esprit d’une grande finesse, rigoureux, lucide et exigeant, Pierre Audin était un homme attachant, généreux, prévenant, passionné et plein d’humour. Le connaître et travailler avec lui a été un honneur et une chance.
Nous adressons à la famille Audin, toute notre sympathie. Nous sommes toutes et tous à ses côtés en ces circonstances douloureuses. »
Le collectif Toulousain Josette et Maurice Audin rendra hommage à son combat le 12 Juin prochain à l’occasion de la commémoration du 66ème anniversaire de la disparition de son père, sur le parvis Josette et Maurice Audin, devant la médiathèque grand M. a-t-on appris.
Dans un tweet de l’ambassade d’Algérie à Paris, nous pouvons lire « Profondément attristés par la disparition de notre compatriote Pierre Audin, fils de Maurice Audin… Il était un fervent amoureux de son pays l’Algérie. Nos sincères condoléances à sa famille et à ses proches, nous partageons votre peine en ces moments difficiles »
Pierre Mansat à La NR : (Ancien président de l’association Josette et Maurice Audin) « Pierre Audin était très aimé en Algérie et en France pour son engagement sans faille pour la vérité, pour la liberté… La délégation de l’association Josette et Maurice Audin qu’il a conduite en Algérie, l’année dernière, en a été une démonstration éclatante. Un exemple de droiture… »
De Paris
Hadj Hamiani