On joue et on recommence la partie

Le football

La fin de saison est aux portes des clubs. Les petits mots prennent du volume. Chaque membre du staff prépare sa feuille de route. Tend l’oreille aux amis, prend note de ce qu’ils pensent de l’entraîneur et de tel ou tel joueur.

La recette est la même, on négocie avant la grande réunion pour savoir qui partira, qui restera, et on décidera du coût de tel joueur qui souhaiterait répondre à une sollicitation de X club. La formule est connue, les joueurs peuvent quitter leur club librement et signer où ils le désirent selon quelques conditions. En nous plongeons dans les années 2006, Patrick Noviello est journaliste d’une chaîne télé, lui-même enseignant à l’Ecole de journalisme de Toulouse dont il est issu. Il anime sa dernière conférence théâtralisée «C’est moi c’est l’Italien» aborde, à travers l’histoire de sa famille, les questions liées aux migrations. Il disait que «le sport aime les belles histoires de Petit Poucet qui gagne à la fin face aux ogres. Mais elles sont de plus en plus rares». Il fait référence à l’entraîneur italien qui venait d’écrire un magnifique conte qui restera dans les annales footballistiques. «Gloire au roi Claudio» a même titré la Gazzetta Dello Sport après que l’équipe qu’il entraîne, Leicester, ait conquis le titre de champion d’Angleterre.

Zidane : «Les miracles n’existent pas dans le football»
«C’est un conte de fées comme seul le football peut l’écrire. C’est la magie du football, bravo à Claudio Ranieri, bravo aux joueurs», s’enthousiasme Gianni Infantino, son compatriote, président de la Fifa. Zinedine Zidane, ancien champion du monde français et qui fut entraîneur du Real de Madrid a préféré recadrer les choses : «Les miracles n’existent pas dans le football. Ranieri, l’entraîneur, et les joueurs ont accompli un travail phénoménal. N’est-ce pas des mots qui illustrent parfaitement ce qui se fait au sein d’un club, comment sont travaillées les stratégies, comment on fait aimer un club aux joueurs et surtout comment est définie la ligne à suivre pour atteindre l’objectif du club tant lors des compétitions nationales ou internationales. Ce qui s’est fait ressemble un peu au travail de Djamel Belmadi qui a réussi à faire prendre en charge l’avenir des Verts par ses joueurs.

La presse britannique le surnomme «le bricoleur»
Ce journaliste rappelait que Ranieri, un nom qui a toujours rappelé des grands clubs : la Fiorentina, la Juve, l’As Roma, Chelsea… Mais c’était un nom rarement gravé dans le bronze des palmarès (une Coupe d’Italie avec Florence, une Coupe d’Espagne avec Valence et un titre de champion de Ligue 2 avec Monaco). A 64 ans, après une expérience ratée, virée au bout de quatre matches, le sélectionneur de la Grèce, pas grand monde ne croit plus en lui… «Quand je suis arrivé, les bookmakers ont dit : Ranieri sera le premier entraîneur viré cette saison», aime-t-il désormais à rappeler, hilare. Évidemment personne n’ose le qualifier de looser mais vu son effectif et son côté stratège du ballon rond, la presse britannique le surnomme «le bricoleur». Mais derrière le tacticien au look très professoral, se cache aussi un sacré meneur d’homme. Pour la première victoire de sa formation sans encaisser de but, il offre des pizzas à tous ses joueurs… Une autre belle leçon d’amour pour un club. On devine, une fois de plus, que le football est avant tout une histoire de famille, celle d’un personnage dans un pays de sport. Dans un club, il y a bien un comité qui gère et ce n’est certainement pas le supporter qui prend les commandes à la place des gestionnaires, en majorité, il n’a de yeux que pour son équipe et s’emporte quand celle-ci est en difficulté, au point de s’en prendre à l’arbitre ou aux joueurs adverses.

Le public responsable de la transformation du football ?
Le sociologue Nicolas Hourcade, professeur agrégé de sciences sociales, spécialiste des supporters évoquant justement le supporter, disait «ne sachant pas reconnaître le ‘beau jeu’ et n’étant pas imprégné de la morale du fair-play, le public serait en partie responsable de la transformation, jugée négative, de l’esprit du football : à mesure que ce sport se développe, l’idéal n’est plus de jouer honorablement, pour la beauté du geste, mais de gagner à tout prix».

«Je suis bien à Leicester, je ne pense pas bouger»
Quant au journaliste Patrick Noviello : le coach italien a su très vite que ce pari anglais était sans doute sa dernière chance. Alors il a fait comme d’habitude, s’est appliqué, a galvanisé ses troupes et formé un véritable groupe. Et le travail a payé. Va-t-il devenir à nouveau courtisé par les plus grands clubs, comme quelques-uns des joueurs qu’il a su mettre dans la lumière ? «Je suis bien à Leicester, je ne pense pas bouger. Je pense que ce sera mon dernier club et j’espère qu’ils me donneront un contrat long de six ou sept saisons de plus avant que je me retire», déclarait-il en 2006. Et enfin, mais, comme Zidane, le coach italien ne croit pas au miracle. Selon lui, il faudra attendre au moins vingt ans pour qu’une équipe d’outsiders comme la sienne soit à nouveau championne de Premier League. «Les plus riches, ceux qui peuvent choisir les meilleurs joueurs, vont gagner», commente-t-il. D’accord, mais lui a montré qu’il y avait quand même encore la place…
Résumé de H. Hichem