Benabderrahmane serre la vis sur l’octroi des incitations à l’investissement !

Plus de 10 milliards USD volatilisés en Algérie dans des investissements fictifs

Comment le secteur public peut-il jouer un rôle directeur dans la croissance industrielle ? C’est la question que se posent depuis des années des experts et des chefs d’entreprises (sérieux) et cherchent à trouver des réponses à l’échec de leur stratégie d’investissement national.

C’est ce qu’a essayé de faire le Gouvernement durant les trois jours qu’a duré la Conférence nationale sur la relance industrielle, organisée à Alger. Les intervenants et participants ont fait le point sur la situation du secteur industriel et des débats ont eu lieu sur l’élaboration d’actions effectives à mettre en œuvre pour impulser l’investissement national. Le Premier ministre et ministre des Finances, Aïmene Benabderrahmane porte un regard croisé sur l’entreprise et les banques publiques et promet de mener une véritable révolution en faveur du développement du secteur. Il a fait état des préalables à revoir avant la mise en œuvre de la nouvelle feuille de route du ministère de l’Industrie. Plusieurs décisions importantes ont été annoncées lors de cette Conférence.
S’exprimant en marge de la clôture de la Conférence nationale sur la relance industrielle, le chef du Gouvernement a réitéré l’engagement de l’Etat à lever les contraintes administratives, financières et réglementaires, pour assainir le climat des affaires et bâtir une industrie solide et résiliente. Il a dépeint un tableau plutôt morose du secteur industriel, notamment, de l’investissement local. Dans sa dernière déclaration, il a indiqué que «l’État a accordé 10 milliards de dollars entre 2018 et 2019 sous forme d’incitations et d’avantages fiscaux pour l’investissement, mais il n’a pas eu le retour sur ces investissements et de création d’emplois», affirmant ainsi son engagement à réviser l’approche sur l’octroi des investissements pour exclure les rentiers.
«Ces incitations qui devraient profiter uniquement aux véritables investisseurs», promettant de lutter contre les faux investisseurs et les rentiers, se poursuivront jusqu’à l’assainissement total du secteur économique du pays, a-t-il laissé croire.
Les pouvoirs publics lancent de ce fait un grand chantier de réforme du secteur industriel. A commencer par la restructuration des entreprises publiques budgétivores, exposant le Trésor public déficitaire à un risque important et le pays à la dégradation des indices macro et micro-économiques. L’aide financière de l’Etat n’a pas suffit à les sauver de leur naufrage. Ce qu’a déploré le Premier ministre et ministre des Finances, mettant en avant les efforts «infructueux de l’Etat pour les protéger de la faillite». «La contribution de l’Etat à l’assainissement des entreprises publiques en difficulté a dépassé à ce jour 2.900 milliards», a-t-il indiqué. Un lourd fardeau supporté par le Trésor public qui est aujourd’hui incapable d’intervenir en faveur de ces entreprises qui provoquent des distorsions économiques. Un nouveau mode de gouvernance s’impose pour redresser ces entreprises qui peinent, malgré les efforts de l’Etat à se mettre sur orbite du développement économique du pays.

Feu vert pour l’ouverture des capitaux de banques publiques
«Le Gouvernement œuvrera à garantir d’autres outils pour le financement des entreprises publiques, en vue d’alléger la charge sur le Trésor public», a indiqué le chef de l’Exécutif, réitérant ainsi la volonté de l’Etat de mettre un terme à la corruption et la bureaucratie associée pour plus d’efficacité et de l’innovation.
Les banques publiques sont aussi concernées par ce constat et cette réforme. Elles sont une grande source de perte pour l’Etat. La solution adéquate est d’ouvrir des capitaux de banques publiques. «L’ouverture des capitaux de banques publiques à l’entame de l’année 2022», a annoncé Benabderrahmane, ajoutant que «le capital de certaines entreprises publiques sera ouvert via la Bourse en vue d’améliorer les mécanismes de gestion de la Bourse d’Alger et lui conférer un rôle important». Le but est de renforcer les marchés financiers intérieurs pour encourager l’investissement local, générer de la valeur ajoutée afin de couvrir les déficits publics.
Cette autodétermination ne signifie pas, par ailleurs, que l’Etat va les abandonner, bien au contraire, il est disposé à «relancer les entreprises publiques qui connaissent une stagnation en s’appuyant sur des partenariats fructueux», a-t-il indiqué, tout en surveillant de près leur mode de gestion à travers «la soumission des gestionnaires à une évaluation périodique, semestrielle et annuelle pour évaluer l’efficacité du processus de gestion», a souligné le Premier ministre. Son souci est de stimuler la compétitivité.
«Œuvrer à réunir les conditions de développement d’une institution sans distinction entre les secteurs public et privé et à l’encourager afin de fournir les besoins du marché national et, par la suite, accéder aux marchés étrangers, en sus de garantir les normes nécessaires de la concurrence du produit national».
En attente d’un impact de cette Conférence, le Gouvernement doit mettre les bouchées doubles. Le chemin est encore long à parcourir pour assainir les finances publiques et instaurer une bonne gouvernance.
Samira Takharboucht