L’Etat accorde annuellement 18 milliards de dinars d’aide à la production locale

L’Algérie importe annuellement 800 millions de dollars de poudre de lait

Depuis le lancement de l’offensive russe en Ukraine, la question de l’augmentation des prix et du risque de pénurie de certains produits de large consommation est sur toutes les lèvres. Pour éviter un vent de panique inutile, le ministre de l’Agriculture et du Développement rural, Mohamed Abdelhafid Henni, tente un discours rassurant, affirmant que l’Algérie dispose d’un stock suffisant de céréales jusqu’à la fin de l’année. Rassurant ainsi le consommateur sur la disponibilité des produits de large consommation (le pain, l’huile et le lait) subventionnés par l’Etat.
Ces trois produits sont souvent orientés vers le profit et la spéculation qui se répercutent sur les prix de vente du produit.
Pour faire face à toutes éventuelles pénuries, le Gouvernement a préféré anticiper dans le contexte actuel pour éviter de mettre à mal le consommateur, mais aussi les producteurs agro-alimentaires et laitiers.
Dans son intervention devant les députés, jeudi dernier, le ministre a réaffirmé l’attachement de l’Etat à son caractère social et de soutien aux ménages à travers le maintien du système des subventions publiques des produits de large consommation en soutien au pouvoir d’achat des Algériens, durement touché par la crise sanitaire. Cette aide financière indirecte offerte aux ménages algérien pèse lourdement sur les caisses de l’Etat qui débourse plus de 18 milliards de dinars annuellement pour aider les producteurs locaux du lait frais, selon le premier responsable du secteur.
Cette démarche s’inscrit dans le cadre de la réduction de la facture de l’importation de la poudre de lait et d’orienter de plus en plus les laiteries à s’approvisionner auprès des producteurs locaux. Plusieurs mesures de soutien ont été prises par les autorités en faveur des éleveurs et des entreprises de collecte de lait en vue d’encourager cette filière à augmenter sa production.
M. Henni a mis en avant tous les efforts entrepris par l’Etat pour développer cette filière afin de subvenir aux besoins croissants des consommateurs, sans toucher au prix du lait en sachet, fixé par voie réglementaire à 25 dinars.
Jusqu’à présent, le Gouvernement refuse de libérer les prix administrés du lait en sachet, malgré les appels de certaines parties à revoir ce tarif et le plafonner autour des 35 DA. Une demande que les autorités ont déclinée, autorisant, par ailleurs, les producteurs laitiers privés à importer à nouveau la poudre de lait après quatre mois de gel des dérogations sanitaires pour l’importation de cette matière première pour soutenir leur niveau de production. De leur côté les laiteries publiques sont tenues de garder leur dynamique de production bénéficiaire des subventions étatiques.
Selon le ministre, le montant des subventions accordées à la production locale du lait frais «comprend principalement les subventions destinées aux éleveurs de vaches laitières (12 DA par litre), les collecteurs de lait (5 DA) et les laiteries (4 DA)». Par ces aides financières directes, l’Etat souhaite tirer profit du potentiel de la production du lait cru et réduire par conséquent la facture d’importation de la poudre de lait qui s’élève, selon M. Henni «à plus de 800 millions de dollars annuellement». «Le secteur public importe, à lui seul, une quantité estimée à 180.000 tonnes par an de poudre de lait, destinée à la production de lait en sachet, vendu à un prix réglementé (25 dinars), tandis que le secteur privé importe une quantité estimée à 200.000 tonnes, destinée à la production de lait en carton, vendu à prix libre et de divers produits laitiers (fromage, yaourt, etc.)», a-t-il précisé.
Si l’Algérie arrive à renforcer et augmenter la production du lait frais localement, les laiteries publiques et même privées pourraient se détourner de la poudre de lait importée. C’est dans cette perspective que le ministère de tutelle a élaboré sa nouvelle stratégie qui comprend plusieurs mesures incitatives, dont «l’importation de vaches laitières pour encourager la production locale de lait frais et la réduction de la facture d’importation de la poudre de lait», a expliqué M. Henni, affirmant que cette stratégie vise aussi «le renforcement des investissements dans la filière lait en octroyant le foncier agricole et en développant la production locale de fourrages destinés à l’alimentation du bétail et à l’élevage de vaches». «Le secteur examine, également, la possibilité d’intégrer le plus grand nombre de laiteries dans ce plan, en fonction des quantités disponibles de matière première», a-t-il ajouté.
Par ailleurs et en réponse à la question sur une éventuelle pénurie du blé et hausse des prix du pain, le ministre a réaffirmé que «l’Algérie avait procédé avant la flambée récente des prix des céréales sur le marché international, à l’importation de « grandes»quantités lui permettant de couvrir les besoins nationaux en 2022».
Quant au retour à la subvention des minoteries, le ministre a indiqué que «dans l’objectif d’examiner cette problématique, une commission paritaire a été mise en place au niveau du ministère de l’Industrie pour étudier les dossiers en suspens et prendre en charge les projets non encore lancés, estimés à plus de 100 nouvelles minoteries au niveau national».
Samira Takharboucht