La pandémie et la finance, un choix stressant

Entre l’envie d’y aller

La JS Kabylie et d’autres clubs aussi avouent la fragilité de leur trésorerie. Ils sont soumis à une rude épreuve de gestion.

L’impossibilité de répondre à leurs engagements vis-à-vis des joueurs et du personnel du club, pose un réel problème. La fièvre atteint le sommet des clubs. La JSK n’y échappe pas. Cette situation qui secoue la plupart des clubs, risque de déstabiliser les faibles et de déstabiliser également la reprise à laquelle tout le monde appelle. Il y a des joueurs, présidents et entraîneurs qui ne font pas l’unanimité pour une reprise immédiate, mais essayent surtout d’apaiser les craintes de plus en plus manifestées par les joueurs sur leur santé. «Parce qu’ils ont aussi des enfants, des bébés et une famille», a ainsi déclaré un attaquant algérien évoluant à l’étranger, ce qui poussent quelques dirigeants à opter pour «la meilleure chose à faire : mettre un terme à la saison». Une option synonyme de cataclysme pour les finances des clubs. En attendant, l’avenir du football est scruté avec attention par le reste du monde sportif, notamment par la plupart des clubs professionnels des Ligues 1 et 2 qui peinent à joindre les deux bouts pour assurer les salaires et tenir le coup pour boucler, éventuellement, cette fin de championnat – si reprise il y a – et penser à la nouvelle saison.
Derrière le rideau de ces hypothèses, une réunion s’est tenue mercredi écoulé par vidéoconférence entre les secrétaires généraux de cinq associations africaines de football. Outre la Fédération algérienne de football, les Fédérations camerounaise, sénégalaise, malienne et guinéenne se sont exprimées sur cette question de reprise. Au terme de cette réunion, trois propositions pour l’actuelle saison de football 2019/2020 ont été faites. La première est de décréter la saison blanche. La seconde, poursuivre la compétition après la levée du confinement. Enfin, la troisième alternative est l’organisation de play-offs pour désigner les vainqueurs et ceux qui rétrogradent. Ces scénarios seront remis au secrétaire général de la Confédération africaine de football pour information et avis, si nécessaire. Pendant ce temps «le club kabyle et les autres se mordent les doigts, coincés entre les pressions des joueurs et celles de leur staffs. Le président Cherif Mellal n’est pas le seul à faire face à une situation aussi fébrile».
Lors de son intervention dans l’émission sportive «La troisième mi-temps» diffusée samedi sur la chaîne algérienne A3, il reconnaîtra que son «équipe souffre financièrement à l’instar des autres équipes de la Ligue 1. Il faut savoir que les sponsors n’ont pas été à la hauteur, ils n’ont pas été d’un grand apport pour nous à la JSK. On a reçu pratiquement aucun centime depuis plusieurs mois», a t-il expliqué. La JSK s’apprête à encaisser la somme de 550 000 dollars US pour avoir atteint les poules de la dernière Ligue des champions, ce qui constitue une bouffée d’oxygène, en attendant mieux. «C’est vrai que l’argent de la CAF va nous soulager quelque peu du fait qu’il nous permettra de régler quelques mois de salaire des joueurs et du staff technique, mais j’espère que l’argent des sponsors, les droits TV et les subventions de l’État ne vont pas tarder à suivre pour nous aider à surmonter cette étape difficile», dira le président Cherif Mellal qui compte stabiliser son effectif pour l’année prochaine.
Pour Azzedine Bennacer, nouveau promu, à la tête du NC Magra qui s’est exprimé sur les colonnes de notre confrère El Watan, il raconte la vie dure que mène son club, lequel à ce jour n’est soutenu par aucun sponsor, ni société nationale. Il évoque les autres clubs qui sont à l’abri de toutes mauvaises surprises «des clubs ont touché un milliard de centimes de la part de Sonatrach». Il aurait tant souhaité en bénéficier de même mais, dit-il «notre dossier constitué dans ce sens, n’a reçu aucun retour». Pas seulement «on a également sollicité de nombreuses sociétés, à l’instar de Mobilis, mais aucune suite positive…» Il confie au journal que «depuis juillet 2019, le club a dépensé 6 milliards de centimes… Comme les autres clubs, dira-t-il, on a payé 2 mois de salaires puis plus rien. Il faut compter aussi les dépenses des jeunes catégories. Ceci a accentué nos difficultés cette saison». Un autre club patauge dans une situation plus violente, pour citer la JSM Béjaïa.
Abdelkrim Bouledjloud, le premier responsable de ce club affirmera «que son club a hérité des dettes antérieures des anciens entraîneurs, qui datent de 2015, 2016 et les anciens joueurs de 2016, 2017, 2018, qui n’ont pas été payés. Il pense qu’ils sont lésés par rapport aux clubs la Ligue 1 et on trouve pas logique qu’on donne 200 milliards de centimes à un club, et un autre n’a même pas droit à 1 milliard de centimes. L’Etat est en train de faire dans les deux poids deux mesures… Pourquoi donner 100 milliards de centimes à un club et un autre rien ? Ça fausse même l’éthique sportive». Mohamed Mecherara ancien président de la LFP, sollicité pour donner son avis, dira «les salaires astronomiques que perçoivent les joueurs sont à l’origine de l’hémorragie que connaissent un grand nombre de clubs. Ce n’est pas l’arrêt du championnat dû au Covid-19 qui a plongé les clubs dans la faillite. Ce qui les a mis dans cette situation, c’est l’excès dans les dépenses, provoquées surtout par les salaires exorbitants. Ce sont des salaires qui n’ont aucun rapport avec le monde professionnel, qui paye les joueurs avec ce qu’il fait entrer comme argent. Chez nous, il n’y a aucune entrée d’argent». Il ira encore plus loin dans son raisonnement en évoquant le fait que «ces clubs ne payent ni impôts ni sécurité sociale». «Les clubs ne développent ni les ressources ni savent réduire les charges… Le drame est que l’Etat ne contrôle pas l’argent qu’il donne», regrette Mohamed Mecherara.
H. Hichem