«Des envahisseurs du football de la dernière heure ont tout faussé»

Djamel Menad :

Le championnat de football, actuellement suspendu, pour cause du coronavirus, les clubs restent victimes de ce virus.

Il ne reste que huit journées à disputer. Actuellement, le CR Belouizdad est provisoirement champion d’Algérie. Mais l’est-il pour les autres clubs ? Que non, vous répondent-ils. Aucun titre de champion ne serait attribué et il n’y aurait aucune relégation en Ligue 2. Pourtant, le président de la Ligue de football professionnel, annonçait récemment sur le plateau d’une chaine de télé publique, que «Ça va être très difficile à mon sens de reprendre le championnat après plus de deux mois d’arrêt, c’est pour cette raison que je pense que si la compétition ne va pas reprendre officiellement, le CRB sera déclaré champion dans la mesure où ce club est le leader de la Ligue 1. Cela veut dire qu’on va prendre en compte le classement de la 22e journée de la L1», a-t-il indiqué. Les présidents de clubs critiquent vivement cette décision et proposent de terminer la saison, «pas question, on est toujours dans la course pour le titre». D’autres questions ont été abordées lors des diverses interviews réalisées avec des ex-joueurs internationaux, notamment les projets sportifs, le marketing sportif, la communication, les finances, les sponsors, l’innovation, les événements sportifs, les marques et bien d’autres sujets couronnant l’actualité sportive nationale. Après Ali Fergani et Mustapha Kouici, c’est avec Djamel Menad que nous poursuivons cette série d’entretiens.

La Nouvelle République : Djamel Menad, vous écoutez les différents sons du football national, et nous sommes persuadés que vous n’êtes pas indifférent à ce qui s’y passe, notamment après cette triste histoire de l’enregistrement sonore, n’est-ce pas ?
Djamel Menad : Je trouve cela scandaleux. Vous n’auriez pas un autre qualificatif qui puisse illustrer cette triste affaire ? Tenté de truquer un match pour gagner trois points et grimper au classement, c’est franchement mesquin. Ce n’est plus du football, c’est du pur trucage au sens légal du terme. Ce qui me froisse le plus, c’est lorsque que je suis seul et je me dis, c’est gens qui combinent, trichent, négocient des matchs, ont-ils une conscience ? Quelle histoire veulent-ils écrire et laisser derrière eux après leur passage dans ce monde du football ? Pensent-ils à cela ? À leur propre histoire qui révélera demain ce qu’ils ont fait à ce football ? C’est triste, honteux pour eux et pour ceux qui l’avaient fait par le passé et Dieu seul sait qu’ils étaient nombreux à tenter de s’enrichir sur le dos du sport au moment où des millions de supporters applaudissaient naïvement un match truqué. Quelle honte. Par contre, je tire un chapeau bas au Ministre de la jeunesse et des sports, qui s’est démarqué de ses prédécesseurs en allant déposer plainte contre X. Ses prédécesseurs auraient pu le faire au lieu de se limiter aux promesses. J’ajouterai, si vous le permettez, que ce genre de combines ne doit pas nous entonner, elles existent depuis l’arrivée des envahisseurs au football, lequel souffre encore de nos jours et dont des agents de joueurs profitent de ces situations scabreuses. C’est vous dire les divers championnats ont été, depuis des années tous truqués, c’est ce qui rend malade les gens honnêtes qui sont, il faut le dire, peux nombreux.

Abordant à présent, si vous le voulez-bien, le dossier de la reprise, celui qui fait l’actualité. Dites-nous de quel côté se range Djamel ?
Il faut reprendre ou pas ? Je sais que le docteur Djamel-Eddine Damerdji, en sa qualité de président de la Commission médicale de la Fédération algérienne de football, soulignait récemment avec force qu’il ‘y a un risque réel de contamination au cas où le championnat reprendra ses droits. Les joueurs sont en contact avec la société et ils peuvent transmettre le virus le jour du match, notamment par des gouttelettes’.» Oui, il a parfaitement raison, mais moi je me mets du côté de ceux qui pensent qu’il faut reprendre la partie. Mais avec des conditions, surtout…lesquelles ? D’abord, il y a les infrastructures sportives qui doivent être prêtes à accueillir dans les meilleures conditions les compétitions et les joueurs aussi. Ceci d’une part, et d’autre part, il y a un élément important qui est souvent négligé et qui est celui de la programmation des matchs. C’est l’été, les chaleurs, et les horaires peuvent peser énormément sur les joueurs, donc sur la qualité du jeu, surtout si le coup d’envoi est fixé à 14h comme cela se faisait il y a encore quelques temps. A ce niveau là, il faudrait que des pauses plus informelles soient prévues, elles sont bien entendu à l’appréciation de l’arbitre. S’hydrater, souvent, par les 32° ou 37 ° C, ce qui est envisageable pour un athlète de haut niveau, surtout que les joueurs manquent de compétitions. Je dis, qu’il ne faudrait pas arrêter le championnat, il faut y aller jusqu’au but, la concurrence est rude, la course au titre se dispute encore. Il reste encore huit matchs, c’est énorme et peuvent produire des surprises. C’est vous dire que nul n’est à l’abris d’une surprise et cela concerne aussi les relégables qui souhaitent échapper à la trappe.

Ce sera alors une reprise avec des conditions ?
L’enjeu et qu’il y ait un max de sécurité pour les joueurs. Avant de commencer, il faudrait que les dirigeants s’assurent que leurs acteurs ont tous subit des examens médicaux et surtout étaient testés négatifs au coronavirus…

Pas que cela je suppose…
Oui, je voudrai aussi rappeler que dans le chapitre infrastructures, les dirigeants devront aussi jeter un œil aux vestiaires. Je pense, connaissant l’état de cette structure, ils gagneraient à être rafraîchis, notamment par l’installation des séparations…Il y a aussi le transport des joueurs, les clubs doivent veiller à ce que les joueurs ne soient pas transportés dans un même bus, c’est important et veiller également que ce que les dirigeants ne soient pas très nombreux, on ne va pas à une fête foraine.

Le marketing, vous dites…
L’auto financement, la réussite repose d’abord sur les compétences du président du club sportif.

C’est-à-dire ?
Celui qui doit être avant tout un sportif ou un ancien sportif, celui qui maitrise parfaitement la gestion allant des tâches administratives, du personnel et du développement de son club que de la finance. Vous savez parfaitement que le football est également créateur d’emplois. Ce que beaucoup de gestionnaires négligent.

Et s’agissant de la communication ? Avec une bonne communication, votre club peut gagner en visibilité. Il n’y a rien de plus efficace pour accroître l’intérêt des sponsors à votre égard. Disposer d’un site internet ou d’un blog peut être ainsi un atout considérable pour convaincre les entreprises de vous sponsoriser ?
S’agissant de la communication, un sujet qui me tient à cœur. Une bonne communication, permet au club de gagner en visibilité. Il n’y a rien de plus efficace pour accroître l’intérêt des sponsors. Quels sont les clubs qui disposent aujourd’hui d’un site internet ou d’un blog qui est à jour ? Alors qu’ils constituent un atout considérable pour convaincre les entreprises de sponsoriser. Mais hélas, on a l’impression que personne ne bouge. Je dis que le développement fulgurant des technologies de communication et l’apparition des réseaux sociaux, devront normalement pousser les clubs à s’adapter, et surtout à repenser leur modèle de fonctionnement. Ce qui est regrettable, c’est le fait que ces nouveaux outils d’échanges et d’interactions ne figurent pas dans la feuille de route de nombreux clubs, si ce n’est pour poser problème ou dénoncer X ou Y. Je me demande comment ces clubs peuvent-ils garder le contrôle de leur information sans la communication. Et comment ces gestionnaires peuvent-ils communiquer avec leur public ?

Selon vous, le marketing repose ou se développe sur l’image du club ?
De manière directe et indirecte, elle repose grâce entre autres aux fans qui coproduisent l’information et la font véhiculer puisqu’ils la consomment, et cette consommation doit toucher tous les âges des fans, y compris les ultras ou les hommes d’affaires. Le manager doit, dans sa communication, cibler un public très large. Or aujourd’hui, combien sont-ils ceux qui créent des espaces pour accueillir leurs supporters, proposer les tenues ou autre gadgets ? Rien de cela, et c’est regrettable. J’ajouterai, les sponsors ont aussi leur place dans ces opérations de marketing, ils peuvent se trouver leur logo sur les maillots ou autres vêtements. Mais hélas, un simple épicier est mieux structuré qu’un club. Souvent les sponsors le font par amour au club et ne veulent pas assister à la mort à petit feu de ces équipes qui veulent s’accrocher au championnat. O a tendance à oublier que le meilleur sponsor est le plus souvent le magasin du coin (ou les commerces, services et autres organismes locaux) avec lequel le club ou les joueurs établissent un lien de confiance depuis longtemps.

Que nous prépare Djamel Menad ?
Pour l’instant je me repose, je pense que cela devrait bouger pour moi en 2021.Ce sera, ici, chez moi, en Algérie, pas ailleurs.
Propos recueillis par H. Hichem