Comme un corps qui ne mange pas

L’esprit qui ne lit pas maigrit

C’est là une vérité incontestable qui s’est vérifiée par des exemples d’individus totalement étrangers aux livres ou aimant passionnément la lecture au point de ne pas pouvoir s’en passer.

Lire est bon pour la santé mentale qui est d’une influence sur la santé physique. On dit que le moral est bon, tout dans l’organisme va parfaitement. Mais «lire» a aussi cet avantage d’entraîner quatre activités représentées par chacune de ses lettres : langage, image, raisonnement, écrit. Ces activités perpétuellement exercées par la lecture. Le langage se développe à mesure que l’on lit, et qu’on découvre toutes les affinités de la langue véhiculées par un ensemble d’expressions qu’on lit et relit au fur et à mesure ; celui qui lit régulièrement n’a point de difficultés pour s’exprimer tant il a devant lui un choix de mots ou d’expressions qui conviennent pour dire une chose.
Et que d’images viennent à l’esprit au fil des lectures, c’est une succession infinie de mondes et de situations qui défilent dans l’esprit de celui qui lit en essayant à chaque fois d’analyser et de comprendre de nombreux détails qui ont leur importance pour cerner le sens pas toujours facile à décrypter tant il y a de passages polysémiques qui accentuent les ambigüités et ne facilitent pas l’accès au sens. Pour aller au sens, il faut un raisonnement logique qui conduit au contenu sémantique d’après les images qu’il suggère et la logique veut qu’un mot soit placé au bon endroit comme élément d’ensemble signifiant.
On n’a qu’à voir l’organisation d’une phrase bâtie selon les règles d’une syntaxe rigoureuse pour obtenir un sens et ce à l’image de l’organisation d’une page et de tout un livre. Ce qu’on lit est toujours un écrit plus ou moins long et construit pour donner des idées enrichissantes. Celui qui ne lit pas s’appauvrit culturellement, son niveau de langue baisse de jour en jour et sa mémoire s’atrophie. Il finit par atteindre un niveau zéro de la pensée. Lire est comme boire et manger, ne pas lire, c’est aller à l’inverse.

Lire est bon pour la santé mentale
C’est d’une importance capitale pour améliorer l’état d’esprit. Mais c’est une activité qui s’apprend depuis la petite enfance avec l’aide du maître d’école conscient de ses responsabilités. Ce dernier, à condition qu’il soit aidé par l’administration, doit à partir du moment où les élèves ont appris à déchiffrer, sensibiliser ses apprenants à la lecture de bandes dessinées et destinées aux tout petits, une manière d’ouvrir leur esprit à la curiosité. On suggère que dans un premier temps, de faire des photocopies de bande dessinée à distribuer aux élèves, s’il y a une photocopieuse, ou une imprimante manuelle, tant mieux, sinon l’école pourrait bien aider à photocopier des petites bandes dessinées qui racontent des petites histoires intéressantes pour les petits. On fait découvrir aux enfants les bienfaits de la lecture et ils lisent passionnément. Et s’il y a un réel suivi pédagogique, l’apprentissage se poursuit d’année en année avec naturellement l’idée d’adapter les histoires à l’âge des enfants.
Il faut organiser à chaque semaine une séance pour contrôler les élèves, savoir s’ils ont lu l’histoire en mettant en relief l’intérêt qu’ils ont de lire de manière régulière pour développer le goût de lire qui ne vient pas de manière magique mais par la pratique régulière de la lecture. C’est de cette façon qu’on apprend l’art de bien lire pour bien nourrir l’esprit de la même façon que l’on apprend à nourrir le ventre en mangeant et en buvant de l’eau intelligemment. Lire régulièrement, c’est développer son esprit mais aussi développer son niveau de culture générale, essentiel pour la vie et développer son niveau de langue qui est un atout important. Savoir parler pour celui qui a acquis un bon niveau de culture, c’est être préparé à une vie heureuse. Plus tard dans le cycle moyen et secondaire, le jeune apprend à lire les romans, qui sont de belles histoires qui vont le passionner, s’il y a un bon suivi pédagogique depuis le primaire, on suppose que le jeune a reçu de bonnes orientations de lecture.
Mais sachez bien que la lecture qui permet l’épanouissement de la personne, n’empêche pas l’apprentissage des matières scientifiques, au contraire ça ne peut qu’aider le jeune dans l’acquisition de toutes les matières enseignées. Savoir bien parler et avoir un bon niveau de culture, c’est s’assurer une belle place au soleil pour l’avenir. Celui qui a beaucoup lu a appris à apprécier les meilleurs hommes et femmes de culture, il apprend aussi à découvrir les bons auteurs, y compris les auteurs de belles poésies qui, malheureusement, ne trouvent pas de lecteurs intéressés. Il faut se donner la peine de lire au moins une partie de ce qui est bien écrit.

L’esprit de celui qui ne lit pas maigrit comme un corps qui ne s’alimente pas
Ya-t-il une différence, au bout d’un certain nombre d’années entre celui qui a beaucoup lu et celui qui n’a jamais ouvert un livre. On a vu dernièrement des gens bien habillés, s’adresser à des écrivains publics pour se faire remplir les formules de chèques secours, on voit bien jusqu’où peut aller l’ignorance. De plus, pour celui qui a une belle voiture et une tenue soignée, mais qui ne sait ni lire ni écrire, la perte d’autonomie est indiscutable. La pire des situations pour un homme ou une femme ingénieur, étudiant, un citoyen quelconque est de pas savoir écrire ou parler, à moins de parler en langue populaire, mais pour se dire n’importe quoi, quelquefois des vulgarités. En réalité, ces illettrés sont beaucoup plus à plaindre qu’à blâmer. Ils sont à plaindre, parce que tout ce qu’ils font, c’est au vu et au su de tout le monde et leur langue de transmission au quotidien est le parler populaire truffé de banalités, de formules et gestes stéréotypées que les utilisateurs emploient à longueur de journée pour discuter de choses qui n’ont aucun intérêt pour les autres, ceux qui écoutent.
C’est une manière de parler pour parler, ou pour meubler le vide, faire passer le temps. Les illettrés et les incultes de manière générale se retrouvent sur un même terrain de l’inculture de tous ceux qui sont limités parce qu’ils sont incapables d’aborder les sujets scientifiques ou de culture générale. N’ayant jamais rien appris sur le théâtre, surtout le théâtre de l’antiquité, de l’antiquité elle-même, de genre romanesques, de poésie classique, de contes d’auteur par rapport au conte populaire, d’inventions et découvertes dans l’ancien temps ou dans le présent, c’est là des thèmes qui ne les a jamais alimentés, au point de faire preuve d’une extrême pauvreté ou de maigreur intellectuelle ou culturelle. Partout, on ne parle que de d’actualités, de choses qui font rire ou qui font mal, de mariages, de divorces, du coût de la vie.
La cherté de la vie vaut la peine d’être débattue et c’est l’affaire de tous. Ceux qui font des discussions trop terre à terre sont en réalité victimes et les circonstances sont telles qu’ils n’ont jamais eu l’occasion et les moyens intellectuels d’aborder les grands sujets scientifiques, techniques, culturels. Parlez leur de thérapie et de catharsis comme vertus du théâtre, ils restent bouche bée. Il y a quelques essais chez les jeunes d’aujourd’hui, mais c’est des gouttes d’eau dans le désert.

Les illettrés de maintenant n’ont même pas l’étoffe de ceux qui n’avaient pas connu l’école dans l’ancien temps
Les anciens avaient eu le mérite de travailler la langue populaire au point de créer une langue populaire de haut niveau qui leur a permis de s’exercer à des joutes oratoires, consistant en des métaphores, proverbes, histoires légendaires qu’on s’échangeait dans les discussions oratoires. Artisans, paysans, poètes anciens de l’oralité, vieux sans activités mais férus de connaissances, faisaient partie de ces gens de haut niveau de langue qui éprouvaient un grand plaisir à se mesurer pour se jauger personnellement et se remettre en question.
C’est une école de la sagesse des anciens qui s’est créée d’elle-même entraînant dans leur sillage tous ceux qui avaient la volonté de devenir un participant aux débats. On faisait la différence entre tel ou tel poète de l’oralité tant il y avait de poètes dans ces temps anciens et qui rivalisaient d’ardeur sur tous les sujets pouvant intéresser le public. Dans la langue arabe dardja, il y avait plusieurs niveaux, un niveau bas qui était celui du marchand ambulant ou du garçon de café, il y avait un haut niveau, celui des sages débatteurs qui avaient coutume de jouer avec les hyperboles, métaphores, sentences, adages anciens, maximes, images animales. On admirait ceux qui récitaient des poèmes de grandes valeurs, des sourates coraniques parce que cela entrait dans la discussion.
Boumediene Abed