«Les petits fellahs attendent le chef du gouvernement d’un pied ferme !»

Mascara (Mohammadia) : les petits fellahs, ces laissés-pour-compte

En date du 11/3/2020, une réunion a été observée au niveau de la direction de l’hydraulique, où ont pris part le directeur de l’hydraulique de la wilaya de Mascara, le directeur de l’unité de Sig, le secrétaire général des fellahs de la daïra de Bouhenni (Mohammadia), les présidents d’associations et un groupe de fellahs pour discuter et résoudre l’ensemble des préoccupations et des problèmes dans lesquels les fellahs de la plaine de la Habra pataugent.

L’état actuel est à l’origine de l’envasement des barrages et notamment celui de Fergoug qui irrigue la plaine du Habra située à Mohammadia. L’envasement du barrage de Fergoug qui a été évalué à 100%, a réduit automatiquement la capacité des retenues des eaux. Le niveau d’eau a complètement chuté. Il en est de même pour le barrage de Sidi-Bouhnifia. Sa capacité initialement de 75 millions de mètres cubes, ne serait actuellement que de 45 millions, soit un envasement de 41%, ce qui dénote un rapport évident au degré d’envasement. A tous ces faits, un trait commun : tous les travaux d’entretien et de drainage des barrages ne sont que gaspillage et arnaque si au préalable aucune mesure n’est appliquée pour limiter les effets de l’érosion constatée au niveau de tous les bassins versants. L’exemple d’une société turc ou syrienne qui a eu le palmarès d’escroquer un marché de dévasement du barrage Fergoug, en dit long sur des transactions octroyées à un niveau centrale à des amateurs de pêches en eaux saumâtres.

Mohammadia : les oranges manquent de jus !
Cette situation s’est traduite par la disparition totale ou partielle de certaines cultures arboricoles à l’exemple des agrumes et les oliveraies pour lesquels le recul des superficies irriguées se fait ressentir et des complications à préserver le potentiel productif au niveau des plaines de la Habra et Sig sont observées, et l’exploitation méthodique des terres des plaines intérieures de Ghriss-Tighennif et les effets négative à venir sur le plan socio-économique seront incalculables pour la wilaya où cette ressource devient de plus en plus rare et difficile à mobiliser. Une approche nouvelle s’avère urgente et est à prospecter au niveau local et régional. Le manque d’eau dans la daïra de Mohammadia, qui ne date pas d’hier, est désormais ressenti par la population et les fellahs. Le périmètre irrigable à partir du barrage de Fergoug couvre une superficie de 19 610 hectares dont 5 100 hectares en agrumes, en constante déperdition vu la salinité des sols. Les minces disponibilités en eau, qui se sont d’abord faites ressentir au niveau du barrage, il y a de cela plus de deux décennies, sont également dues aux grandes altérations à partir des canaux d’irrigation «saccagés» qui nécessitent une rénovation complète pour économiser et utiliser une partie non-négligeable à l’amélioration des rendements du maraîchage et de l’arboriculture.

«Arrachage sauvage de la vigne de cuve autorisé»
Il y a lieu de souligner, que depuis quelques temps dans la wilaya de Mascara, l’arrachage sauvage de la vigne de cuve a pris des proportions inquiétantes, qui a engendré une régression de la pluviométrie, selon des experts agricoles. L’urgence, dont personne ne veut plus entendre parler, signale ce manque d’eau dans une région réduite au silence par des responsables qui a d’ailleurs occasionné la suppression de certaines cultures annuelles dans le strict souci de préserver la vie, voire la survie de l’arboriculture ou du moins de ce qui en reste.

Le calvaire des petits fellahs perdure depuis 2008
Les autres zones distantes du réseau principal accusent, elles aussi, un déficit en eau. Les exploitants qui sont à plusieurs reprises montés au créneau, notamment lors de la visite de l’ex-président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika dans la wilaya de Mascara, durant le mois de juin 2008, ont exprimé leur ras-le-bol au niveau de cette zone insuffisamment irriguée et de façon irrégulière. C’est cette situation qui prévaut dans la daïra de Mohammadia. Les citoyens rencontrés accusent les exploitants du périmètre irrigable à partir des canaux de détournement illégal aux dépens de la population qui endure le calvaire. Accusations mutuelles ou pas, la guerre de l’eau a déjà été entamée dans une wilaya où les forages illicites et autorisés sont pompés au profit du seul cercle restreint des épaules larges et autres gros bras intouchables et qui ont pignon sur la région.
Au passage, nous signalerons que le barrage de Fergoug alimente également la zone industrielle d’Arzew. Cette ponction qui s’est faite sur les eaux destinées à l’irrigation a été évaluée à 800 litres/seconde. Soit un total de 30 millions de m3/an. La compensation de prélèvement qui s’effectue depuis 1976 est en principe prévue à partir du barrage de Sidi M’hamed Benaouda (Relizane). Il était subtile de la part de la Sonatrach ou des responsables de la zone industrielle d’Arzew de venir en aide notamment dans le cadre des opérations de drainage et d’entretien des barrages au niveau de la wilaya de Mascara, pour plus de justice.

Sig : l’arboriculture en déperdition !
Dans la daïra de Sig, la même situation est omniprésente. Elle est due elle aussi à l’envasement du barrage Sarno, situé à quatre kilomètres de cette importante localité et alimentée par un barrage plus important, celui de Chorfa. Le périmètre de Sig est concerné exclusivement par la grande hydraulique. La petite hydraulique, susceptible de développer l’irrigation dans une région, est évidement conditionnée par de nombreux apports en eau, ce qui n’est plus le cas actuellement.

La cause sera-t-elle entendue ?
Une autre tare se présente : la salinité des sols. La région se trouve confrontée au manque d’eau, subissant un autre problème de taille, une contrainte naturelle qui a atteint la cote d’alerte. Le taux de salinité refoulé à la surface est de l’ordre de 11 à 12 grammes de teneur en sel par litre. Une grande partie de l’arboriculture a été abîmée par cette catastrophe naturelle. L’arboriculture est complètement menacée. Plusieurs cas de dépérissement de sujets sont visibles à l’œil nu. Plusieurs terrains incultes sont carrément envahis par les eaux salées et prennent la forme d’un véritable marécage, les sels qui remontent à la surface détruisent ainsi l’arboriculture. Des cas de dépérissement ne cessent de se propager et aucun renouvellement de plantation n’est possible sans l’assainissement général de la plaine. La cause sera-t-elle entendue par les décideurs en faveur des petits fellahs de la wilaya de Mascara ? Ces derniers, loin des salons calfeutrés, et autres tapis persans et autres méchouis offerts par les gros nababs de la région, veulent du concret sur le terrain, tout en affirmant qu’ils demeurent des figurants lors de ces visites éclair, pour faire salle comble aux officiels.
Des marginalisés et mis à l’écart de la tarte nationale offerte aux gros propriétaires terriens qui se sont sucrés à outrance, sans pour autant donner de résultat tangible en matière de rendement. Ine-fine, le discours entre la réalité et le vécu est complètement immense à digérer vu l’absence d’adhésion nécessaire d’une concession équitable entre les fellahs toutes tendances confondues. Une intervention du chef du gouvernement est souhaitable pour séparer le bon grain de l’ivraie dans une wilaya qui piétine le bon sens par son déficit. La wilaya de Mascara mérite mieux ! Pour conclure, si visite il y a du chef du gouvernement dans la wilaya de Mascara, les petits fellahs de la plaine de la Habra attendent d’un pied ferme les décisions qui s’imposent !
(Suite et fin)
Manseur Si Mohamed