Si l’histoire pouvait témoigner !

Mascara (Sig) : le Moudjahid Chabane Mohamed, un brave parmi les braves

Il y a 66 années au moment même où retentirent les premiers coups de feu, précurseurs de la libération de l’Algérie du joug colonial, fut propagé, le 1er Novembre à minuit, un manuscrit original titré «Proclamation au peuple algérien, aux militants de la cause nationale», à Ighil Imoula, un village perché sur une colline à une trentaine de kilomètres au Sud de Tizi-Ouzou.

C’est par cette proclamation qui commence par : «A vous qui êtes appelés à nous juger…» que le peuple algérien, ainsi que le monde entier apprirent le déclenchement de la lutte armée pour la libération nationale. Né le en 1930 à Ghazaouet (ex-Nemours) dans la wilaya de Tlemcen, originaire d’une famille humble, simple et d’une modestie solide, Chabane Mohamed poursuivait ses études à Rouen en France durant l’année 1948, un diplôme dans le domaine de la spécialité du béton armé, alors que la reconstruction de la France battait son plein. En 1957, ne désirant pas rester dans le pays colonisateur, il prendra les maquis à perte de vue longeant à partir de Tlemcen. Il côtoiera les grands de la révolution algérienne à l’exemple de Houari Boumediene, colonel Lotfi, le commandant Sayah Missoum dit Hansali, le martyr Okacha, et le commandant si Rachid Mostaganemi, et la liste demeure longue pour tous les mentionner… qui étaient tous basés dans la Wilaya V, Zone II. Désigné comme membre zonale responsable au cours de son parcours du combattant, le Moudjahid Chabane Mohamed de 1956 à 1957 fut appelé comme membre du commandement des frontières (CDF), dans la zone Ouest du pays en compagnie du commandant Si Rachid et le commissaire politique, le nommé Cheikh. En 1958, il sera dirigé vers le centre de commandement des zones opérationnelles du nord du pays, puis responsable de la logistique puis commissaire politique et membre du MALG (ministère de l’Armement et des liaisons  générales).
Au cours de son combat, le défunt Moudjahid Chabane Mohamed, plus précisément en septembre 1958, sera victime d’une explosion de bombe pour laquelle il était dans l’obligation d’être maintenu dans un hôpital de campagne en observation. Après cet éprouvant accident, on lui confiera la tâche de prendre en charge cet hôpital de campagne. En effet, beaucoup d’entre eux, ses compagnons d’armes ne revinrent jamais, mais la graine qu’ils ont répandue a fini par donner ses fruits, avec le recouvrement de l’indépendance nationale, le vrai et inestimable prix arraché par les armes, qui aurait duré plus de sept années d’une âpre lutte et lourds de sacrifices.Remémorer Chabane Mohamed, au cours de son combat contre le colonialisme français, gravé à jamais au cœur de l’histoire, la proclamation du 1er Novembre 1954 résonnera jusqu’à la fin des temps tel un cri de guerre contre l’occupant. Pour pérenniser ce défunt Moudjahid, natif de Ghazaouet (Tlemcen), on citera les embuscades dont a fait état le doyen dans le quotidien français édité à Oran L’écho d’Oran, qui se sont amplifiées entre Marnia (Maghnia) et Port-Saïd, Boukanoun et la bande frontalière entre le Maroc et l’Algérie où Oujda était la base de repli pour une partie des Moudjahidine. Il y a lieu de souligner le rapt de la fille du directeur du port de Ghazaouet, un certain Gomez.
En plus de ces opérations minutieusement préparées, il y a lieu de souligner, que plusieurs militaires français ont été abattus par le groupe dont le Moudjahid Chabane Mohamed faisait partie, à l’exemple des dix militaires abattus par les moudjahidine près de Port-Saïd en plus de l’attaque du bus reliant Maghnia–Port-Saïd, faisant plusieurs morts et blessés. Le défunt Moudjahid Chabane Mohamed, rappelons-le, après l’indépendance en 1962, s’installera à Sig, distante d’une cinquantaine de kilo mètres de la ville de Mascara où il fondera une famille, et ce, jusqu’à sa mort le 16 août 1999. Il sera nommé trésorier avec les pouvoirs les plus étendus dans la gestion financière des hôpitaux de l’Oranie, pour rejoindre de 1964 à 1967, le poste de directeur de l’hôpital militaire de Bab-El Oued, et en 1970, il sera appelé à la fonction d’officier administratif à l’Ecole de la santé militaire de Sidi Bel-Abbès. Par décret présidentiel, Chabane Mohamed sera désigné directeur administratif au ministère de la Santé, fonction qu’il assumera de 1973 à 1976. Il occupera plusieurs fonctions dont directeur de l’hôpital psychiatrique de Sidi-Chami (Oran), et ce, jusqu’à l’année 1988, date à laquelle il était parti à la retraite.
Le moudjahid Chabane Mohamed, fervent défenseur pour l’écriture de l’histoire de la révolution nationale, s’est distingué d’après sa famille aux régions ouest du pays où il a combattu l’ennemi. Malheureusement le défunt Moudjahid Chabane Mohamed n’a pas repéré sa place à Ghazaouet, sa ville natale. Façonnée à des fins politiques et prise en gage dans des joutes secrètes, l’authentique Histoire de l’Algérie, anti-indépendance ou post-indépendance, reste voilée chez les Algériens, toutes lignées réunies. Dans un autre contexte, le défunt Moudjahid Chabane Mohamed était l’un des rares officiers de l’armée de libération nationale (ALN), portrait élogieux d’un officier, à côtoyer le colonel Boumediene et s’était retiré de la politique, n’étant pas d’accord sur la conquête du coup d’état du 19 juin 1965. En refusant de soutenir l’ascension illégitime de Boumediene, il se retire des feux de la rampe, et ce, en se consacrant à des mémoires sur le combat des moudjahidine de la Wilaya V Zone II (Oranie). Même les membres du «clan d’Oujda» s’entre-déchirent. Chacun voulant légitimer son autorité, ils se délégitiment en tant qu’institution clanique. Ici aussi, le débat tourne autour de la figure de Boumediene qui place qui il veut quand il veut et où il veut. Irrévocablement, ils sont obligés de revoir chaque fois leur perception de l’histoire. En effet, depuis quelques temps, l’on assiste à un déluge de déclarations opposées, livrées par de tierces personnes ou plutôt via des clans, sur la Révolution de libération nationale et ses acteurs, avant d’être réfutées par des témoignages émanant d’un autre clan. Ses fils, à l’exemple de Samir et sa famille rencontrés à Mascara, demandent à tous ceux qui l’ont connu au maquis et au cours de son parcours professionnel d’avoir une pieuse pensée pour ce brave parmi les braves. Ine Fine, à quand la véritable réécriture de l’histoire de la révolution algérienne?
Manseur Si Mohamed