Des verrous contre l’intrusion de l’argent dans les élections

Loi électorale

Par ses effets attendus sur la moralisation de la vie politique et la lutte contre la corruption et l’argent sale, la future loi électorale devrait rendre possible l’organisation d’élections honnêtes et transparentes et renforcer ainsi la démocratie en Algérie, en encourageant notamment les jeunes et les femmes à intégrer davantage les Assemblées élues.

C’est la conviction des experts qui ont élaboré la mouture de l’avant-projet de la loi électorale, remise aux partis politiques pour enrichissement. A travers ses 313 articles, cette mouture comprend des dispositions qui devraient permettre une rupture radicale avec les pratiques de fraude qui ont entaché les scrutins par le passé. Ces pratiques étaient fondées sur la «logique» des quotas de sièges dont la répartition entre les partis politiques concernés était décidée en dehors et à l’insu des électeurs. Elles étaient également mues par la fameuse chkara (sachet en plastique noir contenant l’argent des transactions électorales) pour la confection des listes et en particulier le choix des noms à mettre en tête (les trois ou quatre premières places) pour être sûrs qu’ils passeraient.
Mercredi, lors d’une journée d’information destinée à la presse, le président de la Commission nationale chargée de l’élaboration du projet de révision de la loi organique portant régime électoral, Ahmed Laraba, et les sept membres de la Commission, ont exposé les nouveautés et les principales suggestions contenues dans la mouture de l’avant-projet de la loi électorale. Parmi celles-ci : la réduction du nombre de membres (de 50 à 20) du Conseil national de l’Autorité nationale indépendante des élections (ANIE) qui est seule chargée d’organiser les élections du début de l’opération électorale jusqu’à la proclamation des résultats ; interdiction aux candidats de recevoir des dons de la part des personnes morales, ainsi que des personnes ou parties étrangères ; obligation à chaque candidat d’ouvrir un compte bancaire et désigner un trésorier pour gérer toutes les finances durant la campagne électorale ; une aide financière dépassant le montant de 1.000 DA doit être obligatoirement remise au candidat par chèque afin d’«assurer un contrôle rigoureux et une traçabilité des mouvements des fonds reçus» ; la composante de chaque liste électorale doit contenir un tiers de jeunes (âgés de moins de 35 ans) ; la campagne électorale des jeunes sera complètement prise en charge par l’Etat, à savoir le transport, les travaux d’imprimerie et la location des salles ; le même nombre d’hommes et de femmes dans la même liste électorale ; option pour la liste ouverte qui permet de rompre avec le système de quota et d’empêcher l’achat des voix ; la disposition obligeant les partis politiques à disposer de 4% de l’électorat au sein des Assemblées élues lors des précédentes élections pour prétendre à un mandat parlementaire, ne concerne pas les nouveaux partis et les candidats libres. Selon Ahmed Laraba, la Commission qu’il préside avait reçu, jusqu’à mercredi, les suggestions de deux partis politiques et cinq associations, précisant que le délai reste «ouvert». Les partis politiques semblent absents de ce débat. Seule la disposition imposant le seuil de 4% de l’électorat au sein des Assemblées élues lors des précédentes élections pour prétendre à un mandat parlementaire, a eu un écho. Par le passé, des partis ont proposé leurs listes pour l’inscription de candidats qui non seulement n’étaient pas membres de ces partis mais, pire que cela, n’en partageaient pas du tout la ligne politique. On a parlé également de marchandage «sonnant et trébuchant» autour des listes de ces partis qui avaient l’avantage de détenir l’agrément. La compétition électorale a fini par être motivée par l’attrait du salaire, mirobolant, et autres avantages offerts au député, alors qu’elle devrait se dérouler autour de programmes. Le programme a pour fonction de distinguer les partis en les situant avec précision dans l’échiquier politique pour permettre aux électeurs de choisir sur la base de convictions. Mais, sur les dizaines de partis en Algérie, combien ont un programme ? Force est de constater que le souci du programme politique, qui exige de mobiliser des compétences, ne semble pas être une préoccupation pour de nombreux partis. Par contre, à défaut de programme, il y en a qui exploitent les aspects identitaires comme «fonds de commerce» pour espérer gagner l’électorat.
Lakhdar A.