Sept ONG demandent des comptes à la France et des réparations pour les 19 civils tués au Mali

France/Mali

Sept organisations de défense des droits de l’Homme ont demandé, jeudi 1er avril 2021 à la France, que l’enquête doit faire toute la lumière sur la frappe aérienne française du 3 janvier dans le centre du Mali, qui a tué 19 civils, selon l’ONU.

Le rapport fait état qu’au terme de l’enquête conduite par la division des droits de l’homme de la Mission de l’ONU au Mali (Minusma), appuyée par la police scientifique des Nations unies, sur les événements survenus le 3 janvier près de Bounti (centre), la Minusma est en mesure de confirmer la tenue d’une célébration de mariage qui a rassemblé sur le lieu de la frappe une centaine de civils parmi lesquels se trouvaient cinq personnes armées, membres présumés de la katiba Serma. La «katiba Serma» est affiliée au «Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans» (GSIM). Au moins 22 personnes ont été tuées, dont trois des membres présumés de la «katiba Serma».
Dix-neuf sont morts sur le coup et trois au cours de leur évacuation, affirme le document. Le groupe touché était très majoritairement composé de civils qui sont des personnes protégées contre les attaques au regard du droit international humanitaire, rappelle la Minusma. L’Elysée a de son côté assuré qu’il n’y avait pas de mariage, que le renseignement avait formellement établi avoir affaire à un des nombreux rassemblements de terroristes dans la région et que l’intervention d’une patrouille d’avions français lâchant trois bombes avait neutralisé une trentaine de ces individus. Les éléments disponibles permettent d’exclure la possibilité d’un dommage collatéral, avait déjà fait savoir, en janvier, l’état-major français dans un communiqué.
Dans un communiqué commun l’Association malienne des droits de l’Homme, Action contre la Faim, CARE France, Handicap international, la FIDH, l’Observatoire Kisal et Oxfam France ont écrit : «Nos ONG demandent à ce que toute la lumière soit faite sur les frappes du 3 janvier 2021 à Bounti, et soutiennent la recommandation de la Minusma (mission des Nations unies au Mali) exhortant la France et le Mali à mener une enquête indépendante et transparente sur les circonstances de cette frappe et les dommages causés aux civils. «La France devrait montrer l’exemple de bonnes pratiques en matière de protection des civils en partageant, en toute transparence, les éléments d’information liés à ces frappes pour rendre compte de l’impact des opérations militaires sur les civils et en versant des dédommagements aux victimes et à leurs familles», poursuivent les ONG.
«Les ONG signataires rappellent que les opérations de lutte contre le terrorisme ne peuvent se conduire au détriment du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’Homme», soulignent-elles. Mardi 30 mars 2021, une enquête de la Minusma a conclu qu’une frappe aérienne conduite par la force française Barkhane avait tué 19 civils au cours d’un mariage. Le rapport constitue la plus grave mise en cause d’une opération française par les Nations unies depuis le déploiement des forces françaises dans le Sahel. Le ministère français des Armées a réfuté avec force ses conclusions, en prétendant que le 3 janvier, les forces armées françaises avaient effectué une frappe aérienne ciblant un groupe armé terroriste identifié comme tel et non des civils, près de Bounti (centre).
Cette frappe soulève des préoccupations importantes quant au respect des principes de la conduite des hostilités. Lors de son point de presse quotidien, le porte-parole de l’ONU, Stéphane Dujarric, a, quant à lui, fait savoir que ces préoccupations portaient aussi sur «les principes de précaution et l’obligation des Etats membres de tout faire pour vérifier que les cibles sont bien des objectifs militaires». La Minusma recommande aux autorités maliennes et françaises de diligenter une enquête indépendante, crédible et transparente. Elle préconise d’examiner les processus préalables aux frappes, voire de les modifier. Elle recommande aussi aux Français et aux Maliens de chercher à établir les responsabilités et d’octroyer, le cas échéant, une réparation aux victimes et à leurs proches. Rapporte-t-on.
Oki Faouzi