Qu’est ce qui attend le futur Gouvernement ?

Avec l’avènement d’un nouveau Parlement

Après la communication des résultats provisoires des législatives du 12 juin, les projecteurs se braquent actuellement sur la composante et le programme du futur Exécutif. Entre les promesses électorales et la réalité du terrain, il y a tout un fossé à combler. Déjà, l’année 2020, marquée par la pandémie du Covid-19, a eu de graves conséquences économiques, sociales et sanitaires.

L’année passée, le produit intérieur brut du pays avait baissé de 4,7% tandis que le taux de chômage s’est aggravé en atteignant 14,5%. L’ensemble des indicateurs socio-économiques, déjà dans le rouge depuis 2015, se sont dégradés encore plus en raison des conséquences de la pandémie. L’effondrement des prix du baril de pétrole en 2020 a entraîné un lourd déficit de la balance commerciale des biens de l’ordre de 10 milliards de dollars. Le déséquilibre de la balance des paiements fera passer les réserves de change de 62 milliards de dollars à fin décembre 2019 à 42 milliards de dollars à fin décembre 2020. L’Algérie qui rejette tout recours à l’endettement extérieur se voit fragilisée par cette érosion rapide de ses réserves de change. Concernant les équilibres financiers internes, le Gouvernement adopte une loi de Finances complémentaire pour faire face aux dépenses supplémentaires engendrées par la Covid-19. Ainsi, le déficit budgétaire prévisionnel de l’année 2020 passe de 1.533 milliards de dinars à 1.977 milliards de dinars.
Mais un certain nombre de mesures prises par le Gouvernement l’année écoulée feront éviter le pire au pays. N’en déplaise à certains, l’Algérie ne s’est pas retrouvé dans l’obligation d’aller mendier l’aide internationale pour faire face à cette situation exceptionnelle. Trois jours avant le 12 juin 2021, date de la tenue des élections législatives, le ministère des Finances rend public un communiqué sur la conjoncture économique du pays. «Depuis le début de l’année 2021, les signes fondamentaux d’une reprise de l’économie mondiale en relation avec le reflux de la pandémie du Covid-19 ouvrent de nouvelles perspectives favorables pour l’ensemble des économies, notamment, celles développées et émergentes», lit-on dans ce communiqué. Avant d’ajouter «dans un tel contexte, les principaux indicateurs macro-économiques et budgétaires de notre pays confirment une certaine reprise de l’activité économique et montrent une prise en charge des besoins des citoyens en matière de revenus et de couverture sociale et sanitaire».
Ainsi, le ministère des Finances annonce une croissance de 4,2% en 2021 contre une prévision de 3,9% prévue au mois de janvier 2021. Un taux de croissance qui va presque rattraper le niveau perdu en 2020. Dans cette croissance, le secteur des hydrocarbures réalisera un très fort taux de 10,1%. Du jamais vu depuis près d’une décennie. La croissance hors- hydrocarbures ne sera pas en reste en réalisant 3,2%. Le secteur agricole risque de ne pas contribuer à cette croissance en raison de la sécheresse qui a sévi cette année. Concernant le commerce extérieur, les indicateurs se sont nettement améliorés en comparaison avec ceux de 2020. Le déficit de la balance commerciale des biens n’a été que de 1,3 milliard de dollars durant les cinq premiers mois de l’année en cours contre 3,9 milliards de dollars durant la même période de l’année passée. Les recettes des exportations des hydrocarbures ont augmenté de 32,70%, tandis que celles des exportations hors-hydrocarbures ont progressées de 81,71% par rapport aux cinq premiers mois de 2020.
Cette amélioration de la balance du commerce extérieure est en grande partie liée à la reprise des marchés pétroliers. Le prix moyen du Brent, baril de référence de la mer du Nord, est passé de 41,75 dollars durant les cinq premiers mois de 2020 à 63,16 dollars durant la même période de l’année en cours. Plus important encore, le ministère des Finances annonce que «le niveau des réserves de change a repris durant le mois de mai 2021 un trend haussier», une situation qualifiée d’inédite et qui n’a pas été observée depuis plusieurs mois. En clair, le Gouvernement qui remplacera celui de Djerad héritera d’une situation moins contraignante que celle qui a prévalue depuis le début de l’année 2020. Mais est-ce à dire que l’Algérie est sortie de la situation de crise dans laquelle elle se débat depuis 2014 ? Absolument pas. Si on parle d’une amélioration de certains indicateurs économiques en ce début d’année 2021 rien ne nous dit que cette tendance se maintiendrait dans les mois ou les années à venir.
L’économie et les équilibres financiers internes et externes du pays resteront vulnérables tant que le pays continue de dépendre et dans une large proportion, des hydrocarbures. Si la dette extérieure de l’Algérie n’a pas dépassée les 2% du produit intérieur brut (PIB) en 2020, la dette publique interne, par contre, dépasserait les 56% du PIB en 2021. Le futur Gouvernement doit ainsi veiller à la préservation des réserves de change et à réduire le déficit budgétaire tout en stabilisant la dette publique interne. Il doit également trancher la problématique du soutien des prix et des transferts sociaux qui ne doivent bénéficier qu’aux catégories à faible revenu. Le prochain exécutif qui sortira de ce nouveau Parlement doit relancer l’investissement, diversifier le mix énergétique et assurer une croissance économique supérieure à 3% pour les cinq prochaines années.
Il doit, entre autre, lancer dans les plus brefs délais les grands projets économiques comme celui du port d’El-Hamdania, les mines de fer de Ghar-Djebilet, de zinc d’Oued Amizour et de phosphate de Tébessa. Sortir de la dépendance des hydrocarbures et diversifier l’économie ne sont plus des slogans creux, que les différents Gouvernements n’ont pas cessé de clamer, sans pour autant les concrétiser tout au long de ces trente dernières années. Ces objectifs deviennent une nécessité urgente pour éviter au pays les conséquences socio-économiques et politiques de l’effondrement à répétition des marchés pétroliers. Le futur Gouvernement n’a plus de rente pétrolière à distribuer.
En sept ans, les réserves de change ont perdues 152 milliards de dollars, passant de 194 milliards de dollars en 2013 à 42 milliards de dollars à fin 2020. Le déficit budgétaire ne fait que se creuser depuis l’épuisement du fond de régulation des recettes en 2017. Le discours démagogique, le populisme et les fausses promesses n’ont plus de place dans l’Algérie de 2021. Le futur Gouvernement dispose d’un sursis de cinq ans pour redresser le pays. Et le choix des hommes sera déterminant pour la réalisation des objectifs qui sont déjà fixés.
Nadji C.