L’implication du privé dans la gouvernance des investissements publics s’impose !

Trouver un compromis entre l’investissement et l’endettement

La crise sanitaire du Coronavirus s’est mutée en une triple crise économique, sanitaire et sociale et menace tous les aspects d’un retour éventuel à une vie plus ou moins normale après presque deux ans de lutte accrue.

Toutes les mesures prises pour contenir la progression de ce virus ont précipité la pire crise financière de l’Algérie qui tentait déjà de mener un vaste programme de réformes pour amortir l’impact dévastateur de la crise économique de 2016. L’Etat a agi rapidement à travers une réponse budgétaire de plus de 22 milliards de dinars essayant, en parallèle, de mettre en œuvre son Plan de relance économique (2020/2024) nécessitant d’importants fonds et une stratégie efficace et pratique pour financer les projets et maîtriser la dette et les flux financiers illicites. La crise du Covid-19 a révélé également la vulnérabilité du système financier et bancaire pénalisé à long terme par des problèmes sous-jacents : manque de liquidité, vétusté des réseaux bancaires et la mauvaise gouvernance. La question de financement de l’économie se pose toujours à cause du manque de ressources financières et la hausse des déficits structurels qui menacent la relance des investissements, notamment, publics depuis des mois.
Conjoncturellement, l’Etat devra déplacer son attention des besoins des entreprises en matière de liquidité vers la mise en œuvre d’une stratégie facilitant l’accès au crédit aux entreprises des deux secteurs confondus, public et privé, et encourager le financement de l’investissement par les fonds propres pour minimiser le risque de l’endettement des entreprises. Trouver un compromis entre l’investissement et l’endettement, ce qui n’est pas évident pour l’Etat qui manque de recettes et de liquidité et malgré ces difficultés, il essaie d’optimiser la politique de soutien à l’économie et à la société. Ces solutions temporaires et limitées, ce qui a incité la Banque Centrale à prendre des mesures exceptionnelles pour aider les banques commerciales qui traversent une grave crise de liquidité depuis des mois.
Dans cette perspective, rappelons-le, la Banque d’Algérie a validé un plan de refinancement de 2.100 milliards de dinars, entré en vigueur au début du mois en cours. Ces mesures sont prises dans l’objectif d’aider les banques commerciales à accorder plus de crédits aux investisseurs publics et privés et réduire le risque de l’endettement des entreprises à moyen terme. Faciliter davantage l’accès au crédit aux entreprises privées afin de contribuer au financement des projets structurants en partenariats avec les entreprises publiques. Encourager ainsi le Partenariat public-privé (PPP) pour pouvoir réaliser certains objectifs stratégiques à long terme. Certes, la question de l’aléa moral se pose, mais la coopération entre les deux secteurs devient nécessaire pour surmonter la crise socio-économique que vit le pays. Recourir à ces financements alternatifs au budget de l’Etat réduirait les déficits publics. Lors d’un atelier organisé par le Conseil national économique, social et environnemental (Cnese), sous le thème «Financement de l’économie : mobilisation des capitaux privés pour des investissements utiles», son président Rédha Tir a réitéré l’impératif d’impliquer davantage «les opérateurs privés dans le financement des projets économiques en Algérie afin d’atténuer la pression sur le Trésor public», expliquant que «le financement de l’économie nationale devra se faire en recourant, non pas au Trésor public, mais à l’épargne privée, ou encore aux capitaux dormants ou exploités dans le secteur informel».
C’est la stratégie adoptée par les pays développés pour soutenir leurs économies et pour atténuer le risque de l’endettement. Au-delà des services de la finance islamique qui commencent dans le pays, l’ouverture des capitaux et le recours au fonds propres permettraient de diversifier les sources de financement et ainsi relancer l’activité économique, notamment, celle de l’exportation en berne. Cet atelier était une occasion pour les opérateurs économiques (public-privé) et les experts économistes pour échanger sur les modes de financements possibles et accessibles réglementairement pour financer l’économie nationale.
Le P-dg du groupe Cevital, Issad Rebrab a appelé à la réactiver «le crédit acheteur, autrefois utilisé dans les années 80 mais actuellement interdit par la Banque d’Algérie, permettant de bénéficier de taux d’intérêt pratiquement négatifs, au niveau international, tout en donnant accès à des crédits à l’étranger et en devise, sans recourir aux ressources du Trésor public». De son côté, l’économiste Mohamed-Chérif Belmihoub a estimé que «le foncier des entreprises publiques représente une opportunité qui peut attirer les opérateurs privés à venir investir au vu de la valeur de ce foncier». Les intervenants ont pointé, par ailleurs, les contraintes administratives, réglementaires et logistiques qui entravent les projets de partenariats publics-privés.
Samira Takharboucht