Le programme du Gouvernement face aux tensions budgétaires et sociales

Economie

Le Conseil des ministres a examiné le programme économique du Gouvernement le 30 août 2021, où la problématique a été le retour à la croissance afin d’atténuer les tensions sociales.

La nécessité de réformes systémiques autour d’une nouvelle gouvernance, s’impose, nécessitant une nouvelle politique et la moralisation de la société du fait que la bureaucratie et la corruption accentuent le divorce entre l’État et les citoyens et constituent un frein à l’investissement national et international productif 1.-Situation de l’économie nationale entre 2020/2021 Les réserves de change ont évolué ainsi : 2001 : 17,9 milliards de dollars, – 2002 : 23,1 milliards de dollars, – 2003 : 32,9 milliards de dollar, – 2004 : 43,1 milliards de dollars,– 2005 : 56,2 milliards de dollars, – 2010 : 162,2 milliards de dollars,– 2011 : 175,6 milliards de dollars,– 2012 : 190,6 milliards de dollars,– 2013 : 194,0 milliards de dollars,– 2014 : 178,9 milliards de dollars,– 2015 : 144,1 milliards de dollars,– 2016 : 114,1 milliards de dollars,– 2017 : 97,33 milliards de dollars,– 2018 : 79,88 milliards de dollars,– 2019 : 62 milliards de dollars-2020, 44,2 milliards de dollars et à 44 milliards de dollars fin juin 2021 malgré toutes les restrictions à l’importation, paralysant la majorité de l’appareil de production et accélérant l’inflation du fait du déséquilibre offre/demande (un exemple, les pièces détachées de voitures ont flambé d’environ 100% et le prix des voitures qui n’est pas un luxe, pénalisant les couches moyennes pas ceux qui possédent une voiture de services où tout est pris en charge).

Les exportations hors hydrocarbures en baisse en volume entre 2007/2020 (pétrole et gaz) sont dérisoires, de la (valeur annoncée de 2 milliards de dollars le premier semestre 2021, étant constituées de dérivés d’hydrocarbures et de semi-produits) plus de 98% des entrées en devises avec les dérivés qui proviennent des hydrocarbures. Les importations massives de services (rubrique souvent oubliée entre 9/10 milliards de dollars/an entre 2010/2019) entre 2000/2020 approchant les 1000 milliards de dollars, pour une entrée en devises d’environ 1044 milliards de dollars (étant le solde des réserves de change au 31/12/2020), n’ont pas été proportionnelles aux impacts économiques et sociaux. Alors que faire sans endettement extérieur et surtout avec la crise économique que traverse la majorité des pays développés et émergent, les firmes étant endettés, sans l’investissement direct étranger qui ne viendra que si les réformes sont entamées sérieusement pour permettre un partenariat gagnant-gagnant. Il est admis par les experts qu’il faudrait une importation en devises par an 2021/2022, entre 15/20 milliards de dollars uniquement pour relancer l’appareil productif, existant et pour les nouvelles réalisations sachant que seulement selon les estimations du ministre de l’Industrie fin 2020, pour les projets du fer de Gara Djebilet et le phosphate de Tébessa, l’investissement nécessaire est de 15 milliards de dollars, projets hautement capitalistiques dont la rentabilité ne se fera pas avant cinq années s’ils sont lancées en 2021, sans parler du port de Cherchell d’un coût estimé entre 5/6 milliards de dollars, et du projet gazoduc Nigeria–Algerie (NIgal) évoqué récemment par le ministre de l’Energie d’un coût estimé par les Européens de plus du 17 milliards de dollars.

Il faut être réaliste et pour être crédible, les recettes en devises si le cours se maintient entre 65/70 dollars et le gaz entre ¾ dollars le MBTU, sous réserve d’une relance de la production de Sonatrach qui connaît une baisse entre 20/25% de sa production en volume physique entre 2010/2020, ne dépasseront pas 25 milliards de dollars, au maximum 30 milliards de dollars, il ne faut pas parler de dépenses de plusieurs dizaines de milliards de dollars alors que l’Algérie, outre la crise de gouvernance est en crise de financement souffrant d’un manque de devises, et de rigidités structurelles, faute de réformes. La solution de facilité est la planche à billets dont pour 2021 la Banque d’Algérie se proposant d’émettre 2 100 milliards de dinars environ 16 milliards de dollars qui sans contreparties productives risquent d’accélérer comme au Venezuela la spirale inflationniste, devant nous comparer aux pays similaires. L’Algérie devra à tout prix, éviter l’expérience de la Roumanie communiste qui pour préserver ses réserves de change, avec une économie interne en berne, a restreint d’une manière drastique les importations ce qui a conduit à l’implosion sociale. C’est que le taux de croissance du produit intérieur brut (PIB) à prix courants, a été en 2015, de 3,7%, en 2018 de 1,4%, en 2019 de 0,8% et en 2020 de – 6,5%, donc une croissance inférieure à la pression démographique s’élevant, selon les projections du gouvernement à 3,2% en 2021 mais un taux de croissance se calcule par rapport à la période précédente, qui a été négatif donnant en termes réels un taux à prix constants variant entre 0 et 1%. Il s’ensuit de cette décroissance que le taux de chômage selon le FMI à environ 15% en 2021, incluant les emplois temporaires, certains travaux improductifs – faire et refaire les trottoirs – et la sphère informelle, qui représente plus de 50% du total hors hydrocarbures.

Ce constat renvoie au couple taux de croissance faible et pression démographique galopante, la population de l’Algérie ayant évolué de 30,87 millions d’habitants en 2000 à 44,7 millions d’habitants en 2020, avec une projection à 51,309 millions en 2030. Cela implique la nécessité de créer plus de 350 000/400 000 emplois par an, en plus de ceux nécessaires à contenir le taux de chômage actuel. Le travail au noir (sphère informelle) de certaines catégories de la sphère réelle (après les heures de travail formel), parfois la petite corruption de ceux qui détiennent certains segments du pouvoir économique au niveau local, la cellule familiale, paradoxalement, la crise du logement (même marmite, même charges) et les subventions et transferts sociaux mal ciblés et mal gérés, jouent temporairement et imparfaitement comme tampon social. L’annonce des représentant du patronat d’une perte d’emplois uniquement pour le BTPH d’environ 1,7 million, les services cafés, restaurants hôtels qui ont licencié une partie de leur personnel, du directeur général de l’Agence nationale d’appui et de développement de l’entrepreneuriat, en janvier 2021, d’environ 220 000 micro-entreprises recensées en difficulté financière, et l’adoption de procédures de l’allocation de la caisse allocation chômage, et le rééchelonnement des dettes de certaines entreprises et à effacer les pénalités de retard, est-elle une solution pérenne ? Comme l’assainissement des grandes entreprises publiques, qui selon le ministre délégué auprès du Premier ministre chargé de la Prospective, le 3 janvier 2021, l’équivalant de près de 250 milliards de dollars ayant été alloué par l’État au secteur public marchand sur les vingt-cinq dernières années.

Dans le cadre de la cohésion sociale et face à la détérioration sociale amplifiée par l’épidémie du coronavirus, il est prévu que le maintien des transferts sociaux budgétisés inchangés par rapport à 2019, s’établissant à 14,04 milliards de dollars au cours de 128 dinars un dollar au moment de l’établissement de la loi de finances, soit 8,4% du PIB. Ainsi, malgré les subventions de certains produits, la majorité des produits connaissent une hausse vertigineuse ayant un fort impact sur le pouvoir d’achat des Algériens. Or, le besoin est historiquement daté, évoluant avec le nouveau comportement de consommation des ménages, devant l’éclater par produits selon le modèle de consommation par couches sociales, fonction de la stratification du revenu national. La perception de l’inflation est différente d’une personne qui perçoit 200 euros par mois de celle qui perçoit 5 000 euros ou plus, n’ayant pas le même modèle de consommation. L’on devra analyser objectivement l’indice d’inflation de l’ONS et dont la composition du panier n’a pas été actualisée depuis 2011, avec la sous-estimation du taux d’inflation qui selon les données de l’ONS entre 2000/2020 approche les 100%. La décision récente, afin de préserver les réserves de change (vison purement monétariste) d’interdite les importations de produits finis, si elle n’est pas bien ciblé, tenant compte de la production intérieure risque d’amplifier le processus inflationniste avec l’extension de la sphère informelle dont le prix des produits s’aligneront sur celui du marché noir où déjà avec l’annonce de la levée des restrictions de voyages, le cours a largement dépassé le 30 août 2021 les 213 dinars un euro ( achat).

(A suivre) Abderrahmane Mebtoul Professeur des Universités Expert international