Pour faire un roman, il faut un sujet clair et une imagination fertile

Un roman naît de la découverte qu’en fait l’auteur en l’écrivant

Réaliser un roman n’est pas une sinécure, il faut avoir en tête la configuration de l’œuvre romanesque et rédiger dans une langue abordable mais rigoureuse.En écrivant son roman, l’auteur va de découverte en découverte. Il découvre que la vie humaine n’est pas si simple qu’on ne le pense, chaque individu ayant un caractère qui s’accommode difficilement de l’immense diversité des autres, ceux qui sont autour de lui et ne cherchent qu’à se satisfaire au détriment de tous. Il découvre qu’en écrivant un roman, on crée tout un monde fait de diversité concernant les mentalités et de mystères entourant quelques catégories d’individus. L’écriture d’un roman exige de l’auteur un grand nombre de précautions, ne pas mettre côte à côté des caractères très susceptibles, soupçonneux, sanguins incompatibles pour mener ensemble une vie équilibrée faite d’entente réciproque et de relations fondées sur les principes de moralité sans lesquels toute vie collective est impossible. Le roman psychologique tourné vers l’intériorité des personnages a montré combien il est difficile de connaître une vie saine et épanouissante au milieu des caractères aussi dissemblables qu’imprévisibles. Ajoutez à cela que celui qui compose un roman, c’est avant tout pour créer le plaisir de lire et pour cela il faut savoir procurer des situations de détente moyennant des scènes humoristiques qui procurent beaucoup de plaisir à la plupart des lecteurs en mal de livres intéressants. Un bon roman sort des mains d’un écrivain plein de talents et attentif aux particularités des personnages qui suscitent des interrogations, il fait des découvertes intéressantes sur les anomalies liées à l’état psychologique de toutes sortes d’individus parmi lesquels il choisit ceux qui doivent jouer des rôles majeurs ou mineurs en vue d’une harmonie des rôles à l’intérieur du roman qui donne l’illusion du réel.

Comment arrive-t-on à la création d’un roman ?
On s’inspire de la vie de tous les jours dans tous ses hauts et ses bas. C’est souvent en écrivant qu’on découvre des tranches de vie intéressantes et à partir desquels la configuration du roman apparait dans toutes ses composantes : titre reflétant le contenu, rôles des personnages, relations perturbées ou plus ou moins bonnes. Et à mesure qu’il écrit, l’auteur découvre l’état d’esprit de chacun qui a du mal à s’accorder avec celui des autres pas toujours accommodants. Celui qui écrit finit par être convaincu que l’écriture est un art qu’on a ou qu’on n’a pas, et élaborer un roman exige de plus grandes qualités : capacités de réflexion, niveau de langue suffisant, facilités à rédiger en bon style. Parmi ceux qui ont crée des romans, il y en a qui copient la réalité ou qui partent de faits vécus pour démarrer en évitant d’employer les prénoms connus, pour brouiller les pistes, après ils imaginent des itinéraires pour chacun des acteurs et de façon que l’ensemble soit cohérent. Une œuvre romanesque est comme un film, il ya des péripéties marquées par des actions et un dénouement qu’on arrive à saisir mais à la fin, à condition d’avoir suivi le déroulement avec attention. Lorsqu’arrive la fin, on a le sentiment d’avoir appris quelque chose et c’est là qu’on attribue une appréciation : bon mauvais, c’est un navet, quelquefois, on regrette même d’être rentré et d’avoir gaspillé son argent pour un tel film qui n’a aucun sens. Le roman, c’est la même chose, si l’auteur tient à ce que son roman soit agréable à lire et marque fortement les lecteurs parce que le contenu est émaillé de petites anecdotes drôles qui donnent du piquant à l’ensemble du récit, on trouve le roman sensationnel parce très enrichissant avec ces petites histoires qui donnent envie de poursuivre la lecture ; on a l’impression d’apprendre beaucoup plus sur la vie, ce qui veut dire qu’on anticipe les aventures malencontreuses et inopinées qui surviennent au cours de notre vie au quotidien. C’est généralement les écrivains férus de littérature populaire qui introduisent malgré eux des faits divers au fur et à mesure de leur narration, cela fait partie de leur vécu dont ils tirent des anecdotes drôles bonnes pour créer la joie de lire. Au fil des pages, on trouve aussi des proverbes et légendes en rapport avec le thème du roman et pouvant illustrer des situations abracadabrantes, ou peu claires et qui demandent beaucoup de réflexion. Par ailleurs, les anecdotes extravagantes des temps anciens, les proverbes et légendes nous permettent de replonger dans la littérature ancestrale, ils représentent nos racines.

Origines, structures, démarches des romans différentes d’un auteur à l’autre
Kateb Yacine, en partant de la guerre de libération nationale et de faits de vie familiale attachée aux traditions ancestrales et de vie scolaire de l’époque coloniale, a découvert une matière extrêmement riche pour élaborer un roman. S’appuyant sur ces sources, l’auteur fait «Nedjma», mais la maison d’édition du Seuil trouve le roman trop épais, elle demande à Kateb de l’amputer d’une partie s’il veut être édité, il accepte à son corps défendant et le livre parait. «Nedjma» est un chef d’œuvre qu’il n’est pas donné à tout le monde de comprendre, à l’exception de ceux qui ont l’habitude de lire de tels romans. Et avec la partie retirée de «Nedjma», Kateb élabore un deuxième chef d’œuvre «Le Polygone étoilé» conçu selon la technique du nouveau roman, à savoir, pas de lecture linéaire, la lecture avance au rythme de la pensée des personnages qui les rattachent au présent, au passé et au futur. Bien des gens qui ont tenté une lecture de ces lectures se sont trouvés perdus, habitués qu’ils étaient à lire des romans linéaires avec un début, des étapes intermédiaires et une fin, avec le nouveau roman, on a l’impression de tourner en rond et de retrouver le début à la dernière page. On a adapté «La modification», nouveau roman de Alain Rob Grillet, au cinéma et on en a tiré un film projeté une fois à la cinémathèque d’Alger. Ce film s’intitule « La Modification » comme le roman d’où il a été tiré. Au début la salle était archipleine, au fur et à mesure du déroulement, la salle se vidait et à la fin, il est resté trois personnes, peut être des gens qui avaient lu le roman et l’avaient bien compris. Dans ce film il y avait trois personnages, un voyageur qui allait de Paris à Rome où il rendait visite à une amie, arrivé a Rome, il revenait à Paris où il avait sa femme. Ainsi, il faisait des aller et retour Paris-Rome, la plupart ne l’avait pas compris, ils ont préféré sortir.
Il y a toujours eu des écrivains originaux et de génie comme André Gide qui, après la découverte d’un fait divers, a eu l’idée de bâtir un roman de plus de 400 pages inspiré de ce même fait divers et qu’il a intitulé « Les faux monnayeurs ». Il a découvert dans ce fait divers de dix à vingt lignes, toute la configuration du roman c’est-à-dire toute sa structure et le travail de rédaction a fait le reste ; il a fallu à l’auteur broder de longues parties qu’il a imaginées pour donner forme à un chef d’œuvre de plus de quatre cent cinquante pages d’une lecture agréable. Il a dû faire un travail colossal en inventant de nombreux personnages fictifs et leur attribuer des rôles, et il fallait que l’ensemble soit cohérent et donne l’illusion du réel.
En le lisant, les lecteurs pourtant habitués aux romans fantastiques, découvrent une œuvre originale en ayant l’impression de lire des faits et évènements vécus. D’autres romanciers célèbres avaient opté pour la méthode expérimentale ou méthode scientifique consistant à réunir la matière nécessaire avant d’écrire le roman comme par exemple Emile Zola, bien connu, pour réaliser «Germinal» roman qui raconte les conditions de vie et de travail des masses ouvrières, s’est rendu plusieurs fois chez les mineurs pour découvrir leurs conditions de vie difficiles et dans la mine pour les voir travailler. Après s’être bien informé, Zola s’est mis à écrire un roman qui sera réaliste, conforme à la réalité qu’ on appelle aussi «roman naturaliste».
Gustave Flaubert a utilisé la même méthode pour faire un roman historique «Salammbô» ou il reconstitué tout l’empire romain allant de l’Afrique du Nord jusqu’en Palestine. Ainsi, il a parlé des ruines romaines de l’Algérie jusqu’à El Quods, en passant par Carthage.
Il a décrit les guerres puniques en faisant de belles descriptions très colorées, on a l’impression en les lisant que tout s’est passé au moment où on lit.
Boumediene Abed