Tabagisme féminin en Algérie, un constat très inquiétant

Le tabagisme féminin sur le nouveau-né

La Direction de la prévention et de la promotion de la santé avec la DSP de Annaba avait célébré la Journée mondiale sans tabac, sous le thème «Le tabac, une menace pour le développement».

Certainement le tabac qui contient des substances cancérigènes réduit l’espérance de vie des fumeurs de 8 ans par rapport aux non fumeurs.
A ce sujet, il faut souligner que le cancer du poumon représente aujourd’hui la première cause de mortalité chez l’homme et que, il est plus fréquent chez la femme que le cancer du sein. Le tabac, un mal récurrent qui prend, chaque jour des proportions de plus en plus inquiétantes, un mal qui nuit non seulement à la santé, mais également aux «bourses» puisque la moyenne des dépenses d’un fumeur est de 3 500 dinars par mois. Moins grave mais tout aussi handicapant, l’emphysème pulmonaire (irritation des voies respiratoires provoquant une réduction du calibre des bronches) touche plus de 3 millions d’individus par an. Or, sa fréquence de 8% chez les non fumeurs est 4 fois plus importante (40%) chez les fumeurs. Ceci dit, ce «suicide à petit feu», comme le qualifient les spécialistes de la santé, n’épargne désormais personne. Si certains y voient une évasion dans un quotidien stressant, d’autres en ignorent les réelles raisons et surtout les conséquences, la consommation de tabac, car faudrait-il le rappeler est à l’origine d’environ 15 000 décès annuellement dans notre pays. Il est à noter d’autres effets indésirables tels que la tachycardie de 10 à 20 pulsations par minute qu’entraîne une augmentation de la pression artérielle et du débit cardiaque, multipliant par 2,5 à 7 le risque d’infarctus du myocarde et par 3,5 en moyenne celui de mort subite par manque d’oxygénation du cerveau. Au cours de notre investigation journalistique à Annaba, nous avons croisé des groupes de jeunes adolescentes ou d’adultes fumant jusqu’à un paquet par jour. Fréquentant aussi bien les salons de thé que les pizzerias sur la côte ou les discothèques au bord de la mer. Nous en avons même déniché au sein de l’université Badji Mokhtar de Annaba.

Une accoutumance juvénile
Sur l’échantillon de femmes de 18 à 30 ans interrogées 9 sur 10 nous ont déclaré avoir été poussées vers la cigarette à cause de problèmes familiaux. D’autres fument par plaisir, c’est le cas de Lynda 22 ans étudiante à la fac «je me sens parfaitement bien quand je fume» ce qui n’est pas étonnant puisque le tabac induit au niveau de récepteurs centraux du système nerveux central appelés centres du plaisir une réponse chimique : les endorphines (hormones physiologiques) responsables de l’état de béatitude dans lequel sont plongés les fumeurs dés la première bouffée. Le risque étant que l’accoutumance aidant, il faut des choses de plus en plus élevées de nicotine pour recréer ce sentiment de bien être recherché. Souad 22 ans trouve, quant à elle, «qu’il y a de plus en plus de femmes fumeuses en particulier dans les salons de coiffure» cependant si ce phénomène social prend de l’ampleur, il reste toujours étranger aux mœurs de la moyenne de citoyens pour qui fumer reste l’apanage des hommes. Si dans un passé pas très lointain, la consommation du tabac était juste à la portée des hommes, on assiste depuis quelques années à la généralisation du phénomène, y compris parmi les femmes. Pour des raisons que même les spécialistes n’arrivent pas à définir, la femme algérienne est de plus en plus fumeuse. Beaucoup de fumeurs veulent arrêter de fumer mais ne le font pas. Étant une sorte de drogue, après consommation durant de longues années, la cigarette crée une dépendance, donc s’y détacher «n’est pas du tout chose facile», comme le confirme Tayeb fumeur depuis des années. On compte dans le monde plus d’un milliard de fumeurs, dont 20% environ sont des femmes. Toutefois, l’épidémie de tabagisme parmi les femmes est en augmentation dans certains pays. La Journée mondiale contre le tabac leur est consacrée.
Selon l’OMS, le tabac tue chaque année 5 millions de personnes dans le monde. Le tabagisme réduit la fécondité des femmes. Cette réduction est majorée par l’âge et le niveau du tabagisme (avec une relation dose-effet) ; La ménopause intervient plus tôt chez les fumeuses (avancée en moyenne de 2 ans, voire davantage). Enceintes, les fumeuses voient leur risque de fausse-couche ou d’accoucher prématurément multiplié par deux, le risque de grossesse extra-utérine multiplié par 1,5 lorsque la future maman fume moins de 10 cigarettes par jour, par 3 à partir de 20 cigarettes et par 5 au-delà de 30.
Notons que les effets immédiats de la cigarette chez les deux sexes sont un état de fatigue, de somnolence et un ralentissement des réflexes. Mais à long terme, les risques de stérilité chez la femme sont à craindre.
En effet, les fumeuses ont 3,3% plus de risque que les autres femmes d’attendre plus d’un an avant d’être enceintes. De plus elles font deux fois plus d’avortements spontanés et de grossesse extra-utérines que les autres. Sur le fœtus, les effets de la cigarette sont tout aussi graves puisque ses constituants passent la barrière placentaire entraînant un retard de croissance intra-utérine. Le poids de naissance des enfants nés de méres fumeuses est en moyenne de 200 grammes inférieur à la moyenne. Le tabagisme passif par inhalation forcée dans les ambiances enfumées est tout aussi dangereux puisqu’il cause dans certains cas la mort subite du nouveau-né en particulier chez le fœtus de faible poids. Il ne faut pas non plus perdre de vue que du point de vue mortalité, le tabac serait responsable de la mort de 500 000 femmes par an et que selon l’OMS il y aurait environ 1 milliard de fumeurs dans le monde.

Des bénéfices colossaux
Le lobbys qui sont derrière cette véritable manne ont enregistré des bénéfices de 256% au cours des dix dernières années. Cependant l’impunité n’est plus de mise puisque des parties civiles ont eu gain de cause au cours de célèbres procès faits à des marques connues de tabac et ce grâce à la corrélation faite par les scientifiques entre la prise de tabac et les risques de cancer. L’inversion de la tendance plus de filles fumeuses que de garçons chez les adolescents pousse ces multinationales peu scrupuleuses à prospecter un terrain nouveau : le marché féminin potentiellement plus lucratif en Europe aux Etats-Unies et en Asie.
Oki Faouzi