L’économie secrète

L’argent des dealers

Entre la contrebande, le trafic de drogue, des psychotropes, des cigarettes, de carburant et des armes, des dizaines de milliers de milliards sont générés chaque an. Une véritable économie souterraine existe au pays. La lutte acharnée à laquelle les services de sécurité mènent contre les réseaux de trafic en tous genres a déjà permis de récupérer une partie de l’argent noir.

En Algérie la contrebande rapporte quelque 10.000 milliards de centimes aux contrebandiers, tandis que le marché de la drogue rapporte chaque année près de 3.000 milliards de centimes aux trafiquants, sans parler du trafic des psychotropes qui se développe chaque année et qui engendre, à lui seul, quelques 50.000 milliards de centimes, cette économie souterraine fait vivre des milliers de trafiquants et leurs familles. De l’argent sale que les services de sécurité arrivent mal à contrôler.
Où va l’argent des dealers ? Il y a trois semaines, la Division économique et financière de la Police judiciaire de Boumerdès avait éliminé un réseau de trafic des cigarettes, son démantèlement avait permis aux enquêteurs de la Sûreté de wilaya de mettre la main sur un gros butin, 7,6 millions de paquets et tabacs de cigarettes et près d’un million d’unités de substance olfactive, cette marchandise représente une somme d’argent estimée à 400 milliards de centimes. En plus, les policiers chargés de cette affaire, ont saisis près de 3 milliards de centimes en liquide, une somme d’argent représentant les revenus des ventes des cigarettes. Cette affaire a été couronnée par l’arrestation de 12 trafiquants et la récupération de sept machines à compter les billets de banque. Cette affaire n’est qu’un exemple parmi des milliers d’autres.
La criminalité génère des milliers de milliards, elle cache une économie souterraine. Au niveau mondial, le marché de la drogue génère entre 300 et 500 milliards de dollars de bénéfice, soit le deuxième marché planétaire après les armes et bien avant le pétrole. En Algérie, le Maroc continu d’éjecter des tonnes de drogue.
Chaque année, une moyenne de 70 tonnes de drogue est saisie en Algérie, alors qu’une partie de kif traité arrive à se faufiler dans les villes du pays. En tout, cette drogue glissée génère 3.000 milliards de centimes.
Le problème pour les trafiquants c’est d’écouler cette gigantesque manne d’argent le plus souvent en liquide et de ne pas se faire repérer. Plusieurs techniques sont utilisées par les trafiquants pour faire éjecter leur montagne d’argent. Pour ça, ils ont inventé toute sorte de stratagème rusé, qu’on appelle le blanchiment d’argent.
Écouler l’argent dans l’immobilier, dans l’achat des voitures de luxe, l’achat ou la location des boutiques, des restaurants et souvent dans les boites de nuit et dans les lieux touristiques, les trafiquants « investissent » leurs argents sales. Plusieurs cas de figures flagrants sont à signaler. Prenons le cas du tristement célèbre baron de drogue de Saïd Hamdine, appelé « La Mama » (arrêté en 2013), où son empire d’argent est blanchi dans l’immobilier, notamment dans l’achat de somptueuses villas à Hydra, quartier chic de l’Algérois. Blanchir des sommes importantes ne pose guère de soucis pour les trafiquants qui arrivent, souvent, à ouvrir facilement des commerces avec les revenus des ventes des drogues. Les milliers d’enquêtes diligentées par les services de sécurité, Police et Gendarmerie, avaient souvent tombé dans ce genre d’affaires.

Les 20 barons, « La Mama » et les somptueuses villas et voitures à Alger
La guerre déclarée aux barons de la drogue a porté ses fruits durant la période 2012-2018. Une période qui a été marquée par l’arrestation de 20 barons notoires, certains étaient recherchés par les services de sécurité depuis les années 70 et 80. Parmi ces chefs de drogue figurent le baron de drogue appelé sous le sobriquet « La Mama », aujourd’hui âgé de 60 ans. Il avait été arrêté en novembre 2013 par les brigades anti-stups de la Police Judiciaire (PJ) lors d’une opération ciblant une villa haut de gamme à Saïd Hamdine. Il s’agit du plus grand baron de la drogue, recherché depuis plus de cinq ans dans le cadre de plusieurs affaires liées notamment au trafic de cannabis. Un récidiviste trafiquant de cannabis, il avait déjà fait la prison durant les années 70 et 80 pour le même module de crime. L’homme, âgé de 60 ans, avait bâti un véritable empire de la drogue durant son triste parcours, en arrivant à blanchir son sale argent dans l’immobilier et l’acquisition des voitures. Originaire d’Alger, ce cerveau de la drogue était très connu des services de police avait séjourné durant les années 1990 en Europe (là où il a également blanchi son argent), avant de décider de retourner au pays pour reprendre du «service», à savoir le trafic de drogue.
A Alger, ce grand dealer recrutera des jeunes filles ainsi que son bras droit connu sous le nom de «Baby». «La Mama», comme on le surnomme dans le milieu de la drogue, avait recruté des jeunes filles, dont certaines âgées à peine de 18 ans. Il avait aussi épousé l’une d’elle pour qu’elle devienne sa garde rapprochée. Il s’est acquis d’une superbe villa dans un quartier huppé de Saïd-Hamdine, sur les hauteurs d’Alger, afin d’éviter les représailles des policiers, d’autant plus qu’il était recherché dans le cadre de cinq mandats d’arrêt. A ses acolytes qu’il avait rencontrés sur ces lieux, il donnait des instructions pour chaque opération de vente de cannabis. Son épouse, appelée «Soussou», avait, à maintes reprises, participé à la livraison d’importantes quantités de drogue à ses «clients». L’arrestation des deux narcotrafiquants, qui remonte en 2013, avait été exécutée par une centaine d’éléments de police à Saïd-Hamdine. Ce jour-là, « La Mama » avait fixé un rendez-vous à son bras droit appelé « Baby » pour lui remettre 30 millions de centimes, une somme qui représente les revenus de la vente de cannabis. C’est à ce moment-là que les éléments de la brigade anti-stups avaient intervenus, en interpellant, en flagrant délit, les deux dangereux trafiquants de drogue, dont le baron d’Alger. La perquisition du domicile du baron d’Alger avait également permis la récupération de 3,5 kg de cannabis.
Lors de la même perquisition, l’épouse du baron, Soussou, avait tenté de jeter la drogue par l’une des fenêtres de la villa, mais c’était sans compter de la vigilance des policiers, l’épouse de « La Mama » avait été arrêtée à son tour. Le nom de « La Mama » est cité dans l’affaire des 100 kg de drogue acheminés vers Alger en 2008. Il est également derrière l’affaire des 25 kg de cannabis découverts à Belouizdad en 2010, et de celle remontant à 2011 lorsque les éléments de la PJ avaient traité une affaire de trafic de 5 kg de résine de cannabis, saisis à Belouizdad.

Les Peugeot 407, les 400 millions et le bel appartement d’Alger-Centre
Les grands réseaux de trafic de drogue sélectionnent souvent des endroits les plus chics du pays, là où ils investissent leur argent sale pour l’achat d’immobiliers de première classe. En Juin 2011, les éléments de la Police Judiciaire de la Division Centre de la Sûreté d’Alger ont mené une enquête sur un réseau international de trafic de cannabis qui blanchit l’argent des ventes de cannabis dans l’achat de l’immobilier en plein cœur de la capitale. Au cours de leurs investigations, les policiers avaient suivi, pendant trois mois, les activités de ce réseau international. Le but des enquêteurs c’était aussi d’arriver à l’identification du principal fournisseur, car c’est à ce niveau-là qu’il faut frapper. Au bout d’une surveillance de trois mois, les enquêteurs de la Division Centre de la SWA avaient réussit de mettre la main sur une grosse quantité de cannabis estimée à 140 kg en plein Alger-Centre. L’opération a été menée vers les coups de 20h00 du 7 juin 2011, lorsque les policiers avaient localisé trois véhicules de luxe (achetés par les revenus des ventes de drogue), conduits par quatre trafiquants. Suivant l’itinéraire emprunté par les convoyeurs de kif traité, les policiers étaient en contact permanent avec leurs collègues qui se trouvaient eux à la salle des opérations sise au siège de la Sûreté d’Alger. Au bout d’une heure de surveillance, les trois véhicules se sont arrêtés dans une ruelle à Alger-Centre pour, qu’en ensuite se diriger vers un appartement tout en tenant entre leurs mains des sacs noirs bourrés de cannabis. Après que les quatre trafiquants eurent rejoint l’appartement, les éléments de la Police Judiciaire avaient donné l’assaut. Ici, la récolte était qualifiée de très importante, avait exprimé un commissaire de la Sûreté d’Alger.
En effet, les policiers avaient réussit à saisir 140 kg de drogue, 400 millions de centimes (l’argent représentant les revenus de la vente de cannabis), trois véhicules de marque Peugeot 407 et l’arrestation de l’ensemble des membres de ce réseau international de trafic de stupéfiants.
Sofiane Abi