Quel sort pour les étudiants Algériens de l’Ukraine ?

Ils étudiaient dans les Universités ukrainiennes avant la guerre

Des centaines d’étudiants Algériens qui ont fuit la guerre en Ukraine se trouvent dans une situation très complexe. Arrivant à la fin du cursus pédagogique, ces étudiants Algériens refusent de retourner au pays de peur de voir tout perdre derrière-eux. Leur sort est incertain. Ces derniers errent aujourd’hui dans les villes de l’Europe de l’Est à la recherche d’une solution, après avoir échappé à la guerre en Ukraine. Chahine, ce jeune universitaire algérien de 28 ans est actuellement réfugié en Pologne. Cet étudiant en Designer vit dans le doute, il nous a livré ses impressions sur la guerre en Ukraine et sur ce qu’il pense sur son sort.

Fuyant la guerre en Ukraine pour sauver leur vie, les étudiants Algériens, en centaines, se sont réfugiés dans les pays voisins, entre autres la Pologne, Roumanie, Bulgarie, Moldavie et Slovaquie. Devant le rapatriement organisé par l’Etat algérien, la majorité écrasante de ces étudiants refusent leur retour en Algérie car, disent-ils, leur sort est incertain.
En effet, ils faisaient des études dans les Universités ukrainiennes, certains sont même à leur dernière année d’étude, d’autres sont déjà à leur troisième année. Ils étaient presque arrivés à la fin de leurs cycles pédagogiques. Cependant, la guerre qui s’est éclatée le 24 février dernier en Ukraine, leur a réservé un autre sort, beaucoup sévère.
Fuyant la guerre, des centaines d’étudiants Algériens sont aujourd’hui dans le doute, leur sort est incertain, ils ne peuvent plus retourner en arrière, voire au pays, alors que le cas de chaque étudiant n’est pas encore tranché ou remplacé par une autre solution, une autre réservation.
Certains ont rejoint la Pologne, d’autres ont choisi la Bulgarie et la Roumanie, tandis que d’autres étudiants, qui ont fuit l’Ukraine sont déjà en France et en Allemagne.
Si certains parmi ces centaines d’étudiants Algériens ont trouvé la chance d’êtres hébergés par des proches ou amis, d’autres, en revanche, ont été sévèrement impactés par la guerre en Ukraine, aujourd’hui ils passent leurs jours dans les rues, dans un froid glacial de l’Europe de l’Est.
Livrés à eux-mêmes, ces étudiants Algériens sont en détresse. Ils espèrent une solution tout comme ils appellent les hautes autorités algériennes à intervenir pour traiter leur cas. « Si je retourne au pays, je vais perdre mes études et mon argent. Mon avenir est en jeu. Je ne suis plus en mesure d’imaginer ce qui m’arrive actuellement.
Mon vœu est que l’Etat algérien nous propose une alternative, par exemple de pouvoir poursuivre nos études dans une Université algérienne.
Je fais des études sur la médecine, c’est ma spécialité », dira avec un profond doute le jeune étudiant Chahine.
Ce jeune réfugié Algérien vit actuellement en Pologne, il est hébergé temporairement dans un hôtel partageant une chambre avec neuf autres étudiants Algériens.
Ils sont tous à la recherche d’un travail pour pouvoir louer un studio dans les périphéries de la capitale Varsovie. Ces étudiants refusent de retourner au pays, ils veulent à tout prix poursuivre leurs études quel que soit le sacrifice à faire.

Le rêve brisé de Chahine
Il y a trois ans de cela, Chahine comme beaucoup d’autres étudiants Algériens, débarque à Kiev, la capitale de l’Ukraine, pour s’inscrire dans une Université de la métropole ukrainienne. Heureux, comme c’était le cas pour des centaines d’universitaires algériens, Chahine avait choisi la spécialité Designer pour faire ses études, avoir son diplôme et rentrer au pays pour bâtir son avenir. Aujourd’hui, Chahine, âgé de 28 ans, originaire de la commune de Boufarik (Blida), est à sa troisième année d’étude, bientôt, dans un an, il aura son diplôme. Toutefois, voilà que la guerre éclata à Kiev, en face son rêve d’avoir un diplôme et endosser une carrière professionnelle prometteuse s’éteint. Le moral bas, la peur au ventre, le jeune étudiant a fini par fuir l’Ukraine en laissant tomber son rêve et son avenir derrière lui. Il a fuit Kiev le 25 février passé, soit au lendemain du lancement de l’opération militaire russe en Ukraine.
« J’ai fui la guerre avec sept autres Algériens. « Nous nous sommes rendus à la gare de Kiev pour prendre un train vers la ville de Lviv, qui se trouve à 360 kilomètres des frontières avec la Pologne. Sur place, il y avait trop de monde, des milliers de civils ukrainiens attendaient le seul train en partance vers Lviv. Nous étions obligés d’attendre plusieurs heures pour pouvoir prendre le seul train qui part vers cette ville, sous les sirènes d’alarmes qui retentaient chaque instant, les explosions de missiles qui tombaient et les tirs d’armes automatiques qui retentaient partout, sans parler des cris de femmes, d’hommes et d’enfants. Des scènes apocalyptiques et inimaginables à l’esprit. Des scènes horribles, c’est ce que nous avons vécus tout au long de notre périple à Kiev. Fort heureusement, que nous sommes parvenus à monter dans le train, mes sept amis et moi. Toutefois, le train nous a abandonné à mi-chemin car, la menace des missiles russes étaient fortement présentes, selon les dires du conducteur du train. Alors, nous avons marché pendant de longues heures », nous a raconté Chahine. Ce dernier, est parvenu à atteindre le poste-frontière de Mydeka, entre la Pologne et l’Ukraine, après une rude épreuve de marche.

Cauchemar au Poste frontière
de Medyka
« Lorsqu’on est arrivés à la frontière entre l’Ukraine et la Pologne, notre joie était grande, on était huit Algériens. Cependant, notre exaltation n’a pas duré trop puisqu’en face, nous avons fait face à d’autres malheurs inattendus. Il y avait trop de monde, en milliers, de toutes nationalités mais, la grande majorité sont des réfugiés ukrainiens. On ne savait pas encore quoi faire, pour pouvoir passer la frontière polonaise, il fallait attendre des dizaines d’heures fatigantes », relate le jeune étudiant de Blida. Epuisé par la guerre en Ukraine, par la grande traversée qu’il a faite avec ses sept jeunes compatriotes, Chahine continu à nous livrer ses impressions : « Au bout de quatorze heures de file, notre tour est enfin arrivé. En face d’une petite porte, un garde-frontière de l’Armée polonaise est posté devant moi, tandis que beaucoup d’autres soldats, embusqués, sont derrières lui. En lui montrant mes documents d’identité, le passeport et la carte de résidence en Ukraine, le soldat polonais m’a posé la question suivante : «Quelle est ta nationalité ? Alors, je lui ait répondu que je suis un Algérien. Très vite, il m’a embarqué avec mes sept compagnons, ils nous ont mis par terre, les mains derrières les têtes, et ils ont commencé à nous tabasser à l’aide des crosses de leurs Kalachnikovs, et j’ai commencé a hurler avant de perdre connaissance », nous raconté le jeune étudiant Chahine. « Ils nous ont traité comme des terroristes. C’est pareil pour tous les étudiants Maghrébins, tous ont été maltraités par les soldats polonais. Ces derniers agissaient avec brutalité, haine et force.
J’ai reçut plusieurs coups de crosse à la tête. J’ai perdu ma valise, fort heureusement que j’ai pu garder mes documents personnels, c’est le plus important », dira Chahine. Ce jeune étudiant de 28 ans vit actuellement à Varsovie, il a été hébergé par un jeune couple algérien établi en Pologne. Ces peines sont grandes et son sort est flou, il ne sait plus quoi faire, retourner au bled tout en laissant tomber ses études ou attendre encore et voir ce que les prochains jours lui montrent. Son portefeuille est presque vide, sans argent ses jours sont limités en Pologne, alors qu’il a payé des centaines de millions en Ukraine pour avoir le diplôme tant attendu par ce jeune étudiant.
Une victime collatérale de la guerre en Ukraine. Quel sort pour cet étudiant algérien et pour ceux qui sont dans le même cas que Chahine ?
Sofiane Abi