«Liberté», un témoin de l’histoire récente de l’Algérie, nous quitte

Triste nouvelle pour la presse en Algérie

Le 27 juin 1992 et tandis que le terrorisme frappait l’Algérie, le journal « Liberté » fut crée. Une nouvelle bougie qui rejoint les autres journaux, face à l’obscurantisme des terroristes.Le journal « Liberté » a été crée dans un contexte d’ouverture de la presse écrite aux acteurs privés, initiée par l’ancien chef du Gouvernement Mouloud Hamrouche.
A l’instar des autres journaux, et médias, dont l’ENTV et la Radio, le journal « Liberté » a payé un lourd tribut face aux terroristes.
Une centaine de professionnels de la presse, dont ceux de « Liberté », ont été tués par les terroristes, de 1993 à 1997. Ces attaques terroristes ont commencé par une fetwa d’un imam dans une des mosquées gérées par l’ex-Front Islamique du Salut, à l’époque.
Dès sa création, « Liberté » a déjà choisi le camp de la démocratie et combattu les terroristes.
Il est, à l’instar des autres médias, témoin de l’histoire récente de l’Algérie, comme le dit son propriétaire Issad Rebrab dans sa lettre d’adieu, publiée à l’occasion de la cessation de paraître du journal.
« Liberté », réputé, à tort ou à raison, dans les années 1990, être proche du Rassemblement pour la Culture et la démocratie, RCD, a adopté, au fur et à mesure, une politique d’indépendance politique, se consacrant à la participation à la lutte contre les terroristes, et à laquelle participaient les journalistes et intellectuels, à l’instar des militaires, gendarmes et policiers et le peuple de l’Algérie démocratique.
La création de ce journal en 1992 était un renfort au camp démocratique contre l’obscurantisme du GIA. Hamid Mahiout, et Ahmed Benkherfella, Nourredine Serdouk, et Zine Eddine Aliou Salah, du journal « Liberté » ont été assassinés par les terroristes les deux premiers le 2 décembre 1995, le troisième le 2 octobre 1995 et le quatrième le 6 janvier 1995.
La disparition du journal « Liberté » est une très triste nouvelle, en particulier pour ceux qui ont assisté au combat livré contre les terroristes dans les années 1990. Un témoin de l’histoire récente de l’Algérie qui nous quitte.
Le journal est en bute, depuis quelques années, aux difficultés financières, avec la publicité réduite. « Liberté », propriété du richissime Issad Rebrab, tentant de continuer à être publié et malgré les difficultés financières, mais il a été à bout de souffle en avril 2022. Le propriétaire du journal, Issad Rebrab, a, dans une lettre publiée par le journal dans sa dernière publication, jeudi, imputé la disparition de « Liberté » aux difficultés financières.
« Aux concitoyens et amis du journal ayant exprimé leur souhait de voir sa parution se poursuivre et à ceux n’en ayant pas compris les motifs, je confirme que sa situation économique ne lui permet qu’un court et vain sursis. Ce quotidien d’information a été proposé à la vente mais il a été victime, comme beaucoup de supports de presse, de l’évolution mondiale des comportements des lecteurs qui s’oriente vers la presse électronique. Le problème procède autant de l’état général récessif de la presse papier que du contexte commercial qui prive le journal de la contribution de vitales annonces publicitaires et de l’amenuisement accéléré du lectorat. Depuis un temps, le journal est distribué à perte. Et la perspective n’est point encourageante. La décision est aussi à replacer dans un contexte plus large d’évolution dans l’organisation des activités que j’ai, jusqu’ici, initiée et dirigée », écrit Issad Rebrab dans sa lettre.
La retraite de Rebrab
« Depuis plus d’une année, j’ai placé le groupe Cevital dans une perspective d’un nouveau départ devant faire suite à mon retrait de la vie active que mon âge a rendu nécessaire et que j’annoncerai prochainement.
Les modestes réalisations dont je suis l’initiateur et le promoteur m’ont demandé une vie d’efforts et de sacrifices.
Au moment où je prends enfin une retraite effective, j’ai voulu faire en sorte que la relève qui me succédera puisse se consacrer au seul impératif de développement des activités industrielles du groupe, libérées des contraintes particulières de gestion d’une entreprise de presse », note Issad Rebrab.
« Je tiens particulièrement à exprimer ma reconnaissance aux générations de lecteurs de «Liberté» qui, par leur présence, lui ont constamment donné sa raison d’être et, dans les moments les plus difficiles, lui ont fourni la meilleure raison de résister et de persévérer.
Je tiens aussi à rendre hommage aux générations d’employés qui y ont successivement partagé l’exigeante tâche de confection quotidienne du journal et fait de lui l’œuvre impérissable qu’il est.
Je m’incline devant la mémoire de ceux d’entre eux qui, sous les balles assassines du terrorisme, ont payé de leur vie la cause de progrès et de démocratie qu’il a toujours défendue. J’ai une pensée attristée pour d’autres parmi eux qui ont eu à subir l’épreuve imméritée de la prison.
Je remercie enfin les différents partenaires, annonceurs, imprimeurs et diffuseurs qui ont participé à sa réalisation », note Issad Rebrab. Sofiane Abi