«Damas est contre la normalisation avec Israël»

Interview de Bachar Al Assad à RT :

Dans la mi-juin 2022, le président de la République arabe syrienne Bachar al-Assad a accordé une interview à la chaîne RT en arabe pour une nouvelle édition de News Maker, tournée dans la capitale syrienne Damas. A la question de savoir : pourquoi Damas a-t-il soutenu l’opération militaire spéciale russe en Ukraine ? Bachar Al Assad a indiqué qu’il y a plusieurs raisons. Premièrement, la Russie est l’alliée de la Syrie, et la Russie est confrontée à une guerre qui selon lui n’est pas liée à l’expansion de l’OTAN, comme certains peuvent le penser. Cette animosité existait déjà avant le communisme et la Première Guerre mondiale, c’est une guerre permanente, et la Russie joue un rôle important pour garantir l’existence d’un équilibre international. «Nous pouvons donc considérer la Russie sous deux angles. La première est celle d’un allié : si notre allié triomphe dans la bataille, ou si sa position politique est renforcée sur la scène internationale, alors c’est une victoire pour nous aussi. D’un second point de vue, la puissance de la Russie constitue aujourd’hui un rétablissement, certes partiel, d’un équilibre international. Ce rééquilibrage que nous recherchons aura un impact sur les petits pays, y compris la Syrie. C’est ma vision stratégique du fond du problème, sans entrer dans d’autres aspects juridiques» dit-il. Ce dernier considère la bataille pour un nouvel ordre mondial comme la fin du système unipolaire créé à la suite de l’effondrement de l’Union soviétique ; C’est partiellement correct si l’on se réfère à l’OTAN après la disparition du Pacte de Varsovie, ou si l’on considère la situation d’un point de vue politique et la domination des puissances occidentales, sous la direction des États-Unis, au Conseil de sécurité de l’ONU. Le système unipolaire a été créé après la Seconde Guerre mondiale, lorsque la Conférence de Bretton Woods a établi un nouvel ordre monétaire qui a fait du dollar américain la monnaie de réserve mondiale. Aujourd’hui, ce sont les résultats économiques de cette guerre, notamment le statut du dollar. Si le dollar continue à régir l’économie mondiale, rien ne changera, quels que soient les résultats de la guerre. Le Président syrien révèle que l’utilisation du dollar c’est du vol pur et simple car, après la Seconde Guerre mondiale, les Américains se sont engagés à ce que le dollar reflète la réserve d’or (ils ont rattaché le dollar à l’or). Au début des années 1970, sous l’administration Nixon, Oui, c’est un outil de sanctions. Tant que le dollar est une monnaie mondiale et qu’il continue à être réglé par les banques américaines ou ce qu’on appelle la Réserve fédérale américaine, vous êtes sous l’autorité, de ce dollar ; et donc, votre avenir en tant qu’État, pays ou société, en tant qu’économie est à la merci des États-Unis. C’est un élément central des sanctions, et sans lui (le dollar) l’Amérique ne serait pas du tout une superpuissance. En répondant à la question de quelles sont les cartes dont dispose Damas pour restaurer ses biens et ses territoires ? Pour les forces kurdes celles qui contrôlent les puits de pétrole avec le soutien américain. Il y a des forces qui agissent sous l’autorité des Américains et en leur nom, contre l’unité de la société syrienne. La résistance populaire puisque la grande majorité de la population refuse de traiter avec l’occupant et cette trahison. Cela a déclenché un conflit entre ces forces et la population locale, estime Bachar Al Assad. En ce qui concerne la reconstruction du pays. Existe-t-il des plans urgents à cet égard ? Il y a ceux qui se préparent à investir en Syrie en contournant les sanctions, a répondu Al Assad, un processus de reconstruction a commencé, même s’il est limité. Cela se fait en partie grâce aux investisseurs, aux entreprises ou aux particuliers qui reconstruisent leurs installations et leurs infrastructures, et en partie grâce à l’effort de l’État pour reconstruire les artères qui constituent le cœur de la vie économique dans certaines grandes villes.
A la question de savoir quelles mesures ont été prises pour le Sommet arabe qui sera accueilli par l’Algérie, Bachar Al Assad a rétorqué «le seul poids de ce Sommet est peut-être le fait qu’il se tienne en Algérie. C’est un fait, je ne suis pas diplomate ici. Les relations de la Syrie avec l’Algérie, en toutes circonstances et depuis son indépendance de la France au début des années 1970, ont été constantes.
Il y a quelque chose de solide entre les deux peuples, peut-être parce que l’histoire est similaire malgré les différentes périodes. Mais si nous nous adressons à la Ligue arabe, indépendamment du Sommet d’Algérie, la question n’est pas le retour ou le non-retour de la Syrie, et le mot retour est erroné car la Syrie est toujours dans la Ligue arabe. Son adhésion a été suspendue, et la Syrie n’est pas partie. La question est que fera la Ligue arabe à l’avenir, que la Syrie soit dans la Ligue ou non. Réalisera-t-elle l’une ou l’autre des aspirations des citoyens arabes ? Je ne pense pas qu’elle ait réalisé quoi que ce soit au cours des trois dernières décennies ; et certainement, au cours des dix dernières années, elle a servi de couverture à l’agression contre la Libye, contre la Syrie et à toute autre agression. La question est donc de savoir si elle sera en mesure de changer cette politique ou non. Si la Ligue arabe continue avec cette approche, rien ne changera. En fin de compte, les États arabes sont soumis à des pressions extérieures dans tous les domaines. Tant que ce sera le cas, le résultat sera le même et il sera négatif. Par conséquent, le retour de la Syrie ou la fin de la suspension est quelque chose de formel.
Cela pourrait avoir quelques avantages, mais nous ne comptons pas dessus». Des pays arabes ont normalisé des relations avec Israël, est-ce que la Syrie dispose d’une position à ce sujet ?
L’intervenant a rejeté le terme de normalisation depuis le début du processus de paix dans les années 90. Le terme de normalisation est artificiel dans la mesure où il vise à pousser les Arabes à faire des concessions à Israël en échange de rien ; tel est l’objectif.
La Syrie est contre une relation avec Israël. Cela a été le cas dès le début depuis que ce processus a commencé avec l’Égypte au milieu des années 70.
La Syrie ne changera jamais sa position tant qu’il y aura des terres occupées, par les Israéliens. A déclaré le Président Bachar Al Assad au média RT arabe.
Par Oki Faouzi