«Pelé est éternel» : Des milliers de Brésiliens réunis à Santos pour veiller le «roi»

L’émotion est forte aux abords du stade Vila Belmiro de Santos où des milliers de personnes se sont massées, lundi 2 janvier, afin de rendre un dernier hommage au «roi» Pelé, légende du football morte le 29 décembre.

Pour être parmi les premiers à apercevoir le cercueil, certains supporters n’ont pas hésité à arriver avec 24 heures d’avance, quitte à dormir devant la porte principale de l’enceinte.
Benhur et Lusien sont arrivés quelques heures avant l’ouverture au public. Le couple, qui vit à Sao Paulo, a pris sa place dans la file «seulement» à 7h. Pour les deux fans du Santos FC et de Pelé (qui se disent des «éternels santistas»), il était impensable de ne pas être là.
«J’ai le sentiment d’accomplir mon devoir en étant ici pour lui dire adieu», explique Benhur, 55 ans. «Santos, c’est une histoire de famille. On transmet la passion de génération en génération. Je l’ai eue par mon père et je l’ai donnée à mon fils. Et tout ça, c’est grâce à Pelé. Il a même inspiré l’hymne de Santos. Tous ceux qui aiment le foot devraient venir ici lui rendre hommage.»
«Moi, j’ai vu Pelé jouer. Je me souviens du jour où il a marqué son millième but comme si c’était hier. Il n’y en a pas deux comme lui. Il n’y a que ceux qui l’ont vu jouer qui peuvent comprendre notre émotion», continue Lusien, native de Santos âgée de 64 ans. «Ma mère a eu sept enfants et ils sont tous fans de Santos. Je ne pouvais manquer ce dernier hommage. Pelé, c’est le ‘roi’, c’est le mythe. Pelé est éternel.»
Dans la longue file qui s’étend sur des centaines de mètres, beaucoup sont venus en famille. L’occasion pour des pères et des mères de présenter le héros de leur enfance à leur propre descendance. Épisodiquement, des chants et des danses éclatent tandis que des marchands ambulants proposent des tee-shirts souvenirs ou de l’eau fraîche sortie d’immenses glacières.

Le stade décoré par les «torcidas»
Le cercueil du «roi» est arrivé au petit matin, un peu avant six heures. La dépouille est partie de l’hôpital Albert Einstein de Sao Paulo dans un corbillard noir. À Santos, il a été accueilli par des chants et des feux d’artifice de supporters avant d’être placé au centre du stade, sur la pelouse.
À 10h, la porte 1 s’ouvre enfin pour laisser entrer le public. Dans le calme, les gens longent les barrières, passant près d’immenses couronnes mortuaires, à la mesure du mythe qu’était Pelé, envoyées par des stars du football. Le stade a été entièrement décoré par les «torcidas», les groupes de supporters. Les fans ne peuvent cependant s’approcher qu’à quelques mètres du cercueil. Une distance suffisante pour envoyer une fleur, avoir la chair de poule ou sentir les larmes monter. Et de se dire que le «roi» est vraiment parti…
Pour accéder au cercueil, il faut faire partie de la famille ou des proches. Ou être une personnalité et donc arriver sur la pelouse par une entrée VIP. Le spectacle est saisissant depuis les tribunes.
D’un côté, le cortège populaire en maillot de football, condamné à la déambulation sous un soleil écrasant ; de l’autre, le défilé des privilégiés en costume-cravate, qui peuvent s’arrêter et se recueillir à l’ombre. Une aberration alors que le «roi» est loué de tous, notamment pour sa simplicité et son accessibilité. Dans cette file spéciale, le président de la Fifa, Gianni Infantino, est l’un des premiers à venir saluer la dépouille du seul homme à avoir remporté trois fois la Coupe du monde. «Pelé est éternel», déclare-t-il aux journalistes, reprenant le slogan des Brésiliens, avant d’ajouter avec un brin de démagogie : «Je vais demander à ce qu’un stade porte son nom dans chaque pays du monde.»

Larmes au QG des supporters
Les fans ressortent par la porte numéro 7. Juste en face se trouve le bar «Confrérie de l’Allemand», lieu incontournable des supporters de Santos. Les «torcidas» ont préféré attendre ici avant d’aller rendre hommage au «rei». Et animent la veillée en agitant d’immenses banderoles, arrachant des sourires après l’émotion ressentie à l’intérieur de l’enceinte. D’autres sont accoudés dans l’échoppe, parcourant le fil de leurs souvenirs de Pelé et s’interrogeant sur l’absence de Neymar, dont la présence était pourtant annoncée par les médias : «Il devrait être là. Si Pelé était le ‘roi’ de Santos, Neymar en est le prince», assure l’un d’eux. Le Parisien sera finalement représenté par son père.
«Pelé représente tout pour nous», explique Giovanni, qui dit avoir été élevé dans la Torcida Sangue Jovem, le plus important groupe de supporters du club de Santos, fondé à l’occasion du millième but du «roi» en 1969. «C’est l’étendard de la ville, pas seulement des supporters. Au Brésil, peu importe quelle équipe tu soutiens, tout le monde est sensible à la personnalité et à ce que représente Pelé. Aujourd’hui, tout le monde est triste.»
Un autre membre de la Torcida Sangue Jovem poursuit : «Dans la file, il y a des maillots des clubs Palmeiras, Corinthians, Botafogo… D’habitude, ce serait la bagarre pour cet affront, mais aujourd’hui, on tolère», sourit-il, mi-figue, mi-raisin. «Car Pelé appartenait à tous les Brésiliens.»
R. S.

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